La colonne se met en branle. On est samedi 8 juin 2019. Week-end de Pentecôte. Les chapitres se succèdent. Au total le serpentin fait six kilomètres. À chaque intersection des bénévoles flanqués d’un gilet de sécurité bleu balisent le trajet et régulent la circulation. La nuit a été courte mais comme il y a zéro kilomètre au compteur le pas est alerte et les chants entonnés à pleine voix se succèdent. La nuit a été courte car le rendez-vous de départ à l’église St Sulpice était à 5h30 pour remettre son sac et sa tente au camion correspondant à son chapitre. Ne gardant sur soi qu’un petit sac à dos avec le nécessaire pour une journée de marche. Le temps prévu maussade, comme disent nos amis d’outre-Jourdain, est au contraire agréable, frais et sec.
La très grande majorité des participants est jeune, voir très jeune, mais quelques uns plus âgés aussi vieillissent la moyenne. L’habit général est celui de marcheurs habitués et souvent un chapeau distinctif personnalise l’individu. Les passants sur le parcours sont surpris et quelques uns hostiles. On fait connaissance tout en marchand au gré du flot. Comme toujours il y a les habitués et les nouveaux. L’attente de conseils et le plaisir d’en donner. Le passage d’un bord de trottoir se fait sans effort. Plus tard une racine émergeant à peine du sol fera trébucher. Porte de St Cloud, Montrouge, Châtenay-Malabry, Saclay, il faut traverser cette banlieue pour sortir de la ville. À partir de Saclay la végétation commence, le parcours est fait de chemins qui longent les routes et parfois coupent à travers champs. La sécurité autoroutière toujours, des motards remontent ou descendent la colonne. À certains carrefours les camionnettes de l’ordre de Malte assure la partie médicale. Le groupe d’abord en « bordel couvrez » se met peu à peu en ordre de marche. Les chapitres se morcellent en laissant un espace entre eux.
Un chapitre c’est un groupe de pèlerins qui feront le pèlerinage ensemble. Ils marcheront, chanteront, prieront, prendront leurs repas, se regrouperont pour dormir. Un chef de chapitre coordonne l’ensemble. Le chapitre est identifié par un saint patron, matérialisé par une croix au bout d’un manche où est inscrit le nom du saint et d’une bannière à l’aspect médiéval avec les armes du saint, du chapitre. Le chapitre St Bentham et Sarah se réfère a deux saints syriens martyrisés et chassés de la plaine de Ninive. Le groupe est conçu en partie de jeunes volontaires ayant effectué des missions d’aide dans divers pays du Moyen-Orient. Deux grands drapeaux de l’association flanquent la croix et la bannière. (Et oui ! Ami locuteur, tu te souviens que l’on se tutoyait parfois, c’est de là que vient l’expression). Une autre sous-partie est constituée de futurs militaires se destinant à la Marine Nationale. Et puis quelques autres sans regroupement distinctif. Une trentaine. Le pas s’allonge et cela tiraille déjà un peu. Les premières sensations de brûlures sont perçues par le cerveau. Certains chapitres ajoutent à la souffrance le port d’un brancard sur lequel oscille St Louis, la Vierge Marie et son enfant, ou d’autres statues de saints. On cherche du regard Don Camillo ou le baptême d’un navire nouvellement construit. Peu à peu, des curés, des moines, des séminaristes, s’insèrent dans le cortège. Dans les chapitres, où ils apportent quelques réflexions. Entre les chapitres, où ils assurent la confession. C’est une confession ambulatoire en quelque sorte. Adaptée à l’air du temps. Comme à l’hôpital tout est devenu ambulatoire. Faites de la place ! Ici ce n’est pas la place qui manque mais en ravitaillant en vol, les prêtres ne ralentissent pas la patrouille. De plus l’adage : « Si tu ne vas à Lagardère, Lagardère viendra à toi », trouve ici sont expression. Le chrétien même très pratiquant comme le sont ceux-ci présents rechignent à se confesser. Faute de temps. Si tu ne peux aller à la boulangerie, le boulanger viendra klaxonner devant ta maison et te proposera ses miches. (Hop, hop, hop. Tu te souviens ami lecteur, pas de cela chez nous ! Spécialement aujourd’hui). Les maltais de La Croix commencent à avoir des clients. On se déchausse, se déchaussette et on montre ses premiers bobos. D’autres passent sans trop se moquer car il appréhendent le moment où leur tour viendra.
Chants profanes, chants religieux, chants cosaques, chants militaires, alternent. Ce chapitre étant à vocation moyen-orientale, le je vous salut Marie se récite en arabe :
Ess salamou ala-y-ki, ya maryam
Ya moum-tali-a-ta ni-a-matan
Arabbu ma-a-ki...
Ce chant qui dit « Allah » pour Dieu, le groupe constitué de catholiques bigarrés : deux Indiens (noirs-noirs) de Pondichéry, d’un Africain, d’un blanco-asiatique, de deux Syriens, deux Libanais, ont tendance à énerver les identitaires de l’Action Française qui marchent deux chapitres devant. Rien n’est dit mais cela se sent. « Notre père qui êtes aux cieux » « Abana allathi fiasawamat ». Heureusement Aurélien, futur officier de la Marine attaque « Auprès de ma blonde ». Tout le monde connaît. Puis viendront les rosaires, les chapelets. Au début chacun pense à ce qu’il dit mais peu à peu cela devient une respiration, une corde où accrocher sa douleur, une litanie de derviche-tourneur. Je vous salue Marie, Notre père, credo, toute la messe de ton enfance te revient en mémoire. Tes lèvres ânonnent le latin comme elles ont ânonné les disques des Beatles : « Let it be, let it be ! ».
« En passant par la portière, parachutiste souviens-toi. Qu’un jour il pourrait se faire. Que ton pépin ne s’ouvre pas, la la la la », continue Aurélien. Il est grand, très grand. Sa tête dépasse tout le chapitre. Il connait tous les chants et plus encore. À trois, quatre ils se relaient pour porter la bannière. Celle-ci accrochée à une potence offre une belle surface au vent. Marcher et la tenir haute est un défi. C’est une mortification supplémentaire que ces jeunes chrétiens offrent à Dieu. Viennent s’ajouter les drapeaux de beaucoup de pays du Moyen-Orient : Jordanie, Syrie, Irak, Kurdistan irakien, Égypte… et deux nouveaux territoires où l’association veut aider là aussi les chrétiens : Arménie et Éthiopie. Toutes ces voiles claquent au milieu des champs beaucerons. On peut rigoler. Trouver cela hors temps mais ce n’est pas sans noblesse. C’est fait en toute générosité. Dans un dialogue intérieur et partagé avec le clan et au-delà comme une antenne entre le ciel et la terre. Entre le spirituel et la sève dans les racines de la terre. Un arc électrique qui ne peut être rompu.
Première halte. Cela fait du bien même si on sait déjà que de redémarrer dans quinze minutes va recréer un peu de douleur mais on est content. Chacun cherche dans son sac ce qu’il a prévu de grignoter. Des bouteilles d’eau ont été distribuées à l’arrivée à la pose. Certains jettent déjà l’éponge. Une prise en charge en navette est prévue pour les fatigués, les éclopés. Suivra une halte plus longue pour le déjeuner. Puis une autre halte dans l’après-midi et puis l’arrivée au campement. 40 km. Pas mal pour un premier jour. Pour beaucoup l’organisme a déjà souffert. Passage d’une vie urbaine neutre à des moments d’exaltation spirituelle et physique. La journée a été longue et l’impression d’être parti depuis longtemps est prégnante. Soupe chaude et morceaux de pain, proposés par des dames plutôt âgées et surtout très souriantes, sont les bienvenus. Quelques tentes communes et surtout des tentes Quechua côte à côte qui vont penser au bord du périphérique Porte d’Aubervilliers. Les scouts, les louveteaux, ont leurs propres consignes, leurs propres rites. Scouts d’Europe. Louvette de bleu vêtues. Un autre groupe en chapeau à la Baden Powell. Les plus beaux sont les scouts marins. Les lampes s’éteignent. Il s’approche de minuit. Lever cinq heures. La nuit va être courte pour ceux qui ne s’endormiront pas tout de suite. Les jambes endolories et les pieds aux ampoules de Noël taquinent le pèlerin à la recherche d’un sommeil réparateur.
Une voix de haut-parleur provoque le réveil. Elle est aimable mais ferme. Il est cinq heures, le départ est à six. Il faut regrouper ses affaires. Plier la tente. Apporter sac et tente au camion. Un brin de toilette. Aller chercher un chocolat chaud et du pain. Ce sont les braves dames de la veille qui sont là souriantes. Elles n’ont pas beaucoup dormi. Chacun accomplit ses différentes obligations dans l’ordre qu’il veut. Le tout est de se rassembler en chapitre. Reformer la colonne dans le nouvel ordre du jour. Il n’a pas plu mais le terrain est boueux. C’est Woodstock sans un papier qui traîne, ni une bouteille en plastique. Quelques cadavres de bouteilles de vin, très peu, mais pas de pétard. On préférera l’extase à l’ecstasy. Tous les marcheurs le savent, le redémarrage est assez douloureux. Alors c’est en silence que chacun relance sa mécanique. Claudiquant avec les crampes et les ampoules. Les chapitres étrangers ont pris la tête du cortège. Beaucoup sont venus de très loin. Les Américains sont nombreux et la plupart de leurs bannières sont la bannière étoilée. Les porte-bannières américains ont le baudrier dans lequel on engage la hampe. Lunette de sport à verres opaques à reflets orangés. Tenue en textile technique. Et beaucoup d’accessoires. On va visiter Grand Canyon mais en pick-up. Les chrétiens français pensent que ce n’est pas du jeu. Ce n’est pas ça le pèlerinage. Tous catholiques mais chacun sa culture. Le tracé ne sera plus qu’à travers les champs de blé. Un long dragon chinois au milieu des épis, en lisière de bois épars. De temps en temps le chef de chapitre aborde un thème qui donne à réfléchir. Puis alternent à nouveau, les chants, les prières, les rires, les blagues, les chansons à boire ou tristes parce que le garçon ou la fille reste en rade parce que l’autre l’a quitté. Les haltes paraissent plus courtes. Les pas plus lourds. On coupe tout au cordeau. Pas question d’en rajouter. Le problème de la marche en groupe, c’est qu’on ne choisit pas son allure. Il vaut mieux être devant sinon derrière on doit cavaler pour boucher les trous quand le rythme d’accélère. Le fameux élastique. Certains jeunes n’ont déjà plus de voix. Le jeu étant de crier plus que de chanter. Quand on est jeune, il faut beaucoup de débit et de volume sonore, le contenu est moins important.
Aujourd’hui la halte du déjeuner sera aussi l’occasion d’assister à la messe en plein air. Des carrés balisés. Les chapitres se regroupent par genre, adultes, jeunes, famille. Organisation quasi militaire mais sans rigueur inutile. Tout est fermement suggéré et accepté d’emblée. Un chapiteau pour l’office. Un très grand nombre de prêtres officiant et parmi les pèlerins. Ici ou là, assis sur des chaises les prêtres confessent. Un très grand champ en pente conduit jusqu’à l’autel sur une estrade. Un théâtre naturel en herbe. Des écrans géants. Messe en latin. Longue. Chantée. Fervente. Les familles avec deux, trois enfants, très jeunes dont un encore accroché sur le ventre. Les catholiques prient leur Dieu. Il fait beau. La France des années soixante qui sans être celle des congés payés lui ressemble. Pour la communion, la consigne est de recevoir le saint sacrement à genoux et dans la bouche, pas debout et dans la main. Un prêtre avec le calice, un bénévole qui abrite le père d’un parasol, un scout en gants blanc qui tient la soucoupe. Un grand nombre de prêtres 14 000 hosties pour 14 000 pèlerins. Pas une image sur les chaines nationales. Trois tags dans un cimetière, des heures de commentaires sur toutes les chaînes d’info. 14 000 catholiques qui marchent 100 km pour montrer leur foi en leur Dieu et rien. La laïcité ce devrait être le respect des religions, mais pas pour tout le monde. De toutes les façons, les faux cathos qui ne vont même pas à la messe à Noël les traitent d’intégristes. Comme pour les musulmans, le catho qui ne pratique pas sa religion se permet de définir quel musulman est respectable, quel musulman est intégriste. Les croyants des religions du Moyen-Orient chez qui les athées n’existent pas, s’en amusent. Une religion n’existe que lorsqu’on la pratique, disent-ils. Les chapitres se reforment. Nouvelle étape pour finir une journée de 30 km. Au bivouac cela fera quarante plus trente en deux jours. Belle balade. La sono signale les objets perdus. Les enfants perdus. Les consignes pour la suite. Le groupe des éclopés s’agrandit. Les obèses sont ceux qui souffrent le plus, mais pas seulement.
Le second bivouac est dans un cadre spectaculaire. Un long chemin encaissé dans des carrières. Certains devront camper en bas, d’autres sur les buttes. Tout est en longueur, alors ce sont deux colonnes de fourmis qui se croisent. Les camions ont déchargé les sacs par région. 90% des sacs sont gris et de Decathlon. 99% des tentes sont rondes et vertes marque Quechua. Jusqu’au dernier moment le pèlerin pense qu’il ne retrouvera jamais ses affaires et puis miracle, là voilà la tente, là voilà le sac. Montage rapide. Toilette très rapide. Recherche de la distribution de soupe. Des toilettes ambulatoires. Des objets perdus. Certains iront à la veillée de prières puis peu à peu chacun regagnera sa tente. La nuit sera courte comme l’autre mais meilleure car le corps le réclame. La pluie est tombée drue vers les trois heures. Crépitement sur la toile de la tente. Un œil s’ouvre. L’autre se referme. Le corps de pelotonne dans le sac de couchage. Tel un fœtus il cherche la chaleur, le calme et à se rassurer. La voix du haut-parleur identique à l’autre matin, engage à se lever. Il est cinq heures. Elle le refera quelques minutes plus tard pour les récalcitrants. La voix de Jean Piat récite Charles Péguy. Oui, on peut se moquer mais c’est quand même une belle France qui est là. Qui n’a pas peur de l’effort, de la générosité, de certaines belles choses qui ne sont pas le caniche écarlate de l’art contemporain, ni le plug de la place Vendôme ou le groupe de la Fête de la musique à l’Élysée. Chacun choisit ses représentants. Chacun choisit ses repères. Chacun choisit son phare aux Kerguelen ou ailleurs.
Dépôt des sacs. Chocolat chaud dont la dégustation est proche d’un Vosne-Romanée ancien. C’est le dernier jour donc les douleurs basta, de côté, on fera avec. La pluie de la nuit c’est arrêtée et c’est dans la brume du matin que les troupes s’avancent. Les bannières de chrétienté claquent dans le vent. Les souliers sont déjà humides. Les Africains sont déjà numides. Le départ a été peut-être mal indiqué et chacun court pour retrouver son chapitre, sa place dans la colonne. Chaque groupe de jeunes veut prendre l’ascendant en décibels sur les autres. Il y avait quelque chose dans le chocolat ? Encore trente kilomètres, quarante plus trente plus trente en trois jours et aujourd’hui la messe à Chartres est à quinze heures trente. On avance devant ! Cent kilomètres en trois jours, de sept à soixante-dix-sept ans et pas une ligne dans l’Équipe. Merde ! Au loin, mais au loin seulement les deux flèches de la cathédrale de Chartres. La rumeur court que un mégot ou un court-circuit pourrait les enflammer. MDR. C’est à s’en étouffer, à se couper le souffle pour marcher. Les blés sont comme le sable du désert et la cathédrale comme un mirage. Plus tu t’avances plus elle recule. Comment veux-tu que... je te retrouve place Vendôme. Les heures ont passé vite sans vraie notion du temps. À quelques encablures de la cathédrale Aurélien entame page 61 du carnet de chant :
Notre-Dame nous voilà
Une flèche sacrée monte du sol natal
Et la France enchantée
Vous salue Notre-Dame
Les pèlerins qui vous aiment
Et adorent votre enfant
À votre appel suprême
Ont répondu « présents ! »Devant nous nous voilà,
Devant nous la madone de la France…
Ce n’est pas André Dassary mais c’est bien aussi. Quelques Chartrains applaudissent au passage des pèlerins. La cathédrale s’approche. Bien sûr elle est sur une hauteur mais le pèlerin s’en fout. Oui, il s’en fout, il pourrait faire le pèlerinage en marche arrière. Il a dépassé la douleur, dépassé la normalité. Dépassé les contingences. Il est chez lui. On est chez nous !
Seuls les huiles et les porteurs de bannières et de croix auront accès à l’église. Les autres devront rester dehors et suivre la messe dehors en regardant sur des écrans. Eh bien non, que nenni. Bien que catho, le Gaulois ou quasi-Gaulois reste indocile et rebelle. Certains du groupe se voient interdire l’accès à l’église. L’église ne peut pas accueillir tout le monde. Même pas en rêve pharisien ! Cent kilomètres pour rester sur le parvis, pour rester sur le parvis, on voit que tu es venu en voiture ! Le groupe récupère ses drapeaux de pays exotiques, Liban, Syrie, Éthiopie, s’insère dans la cohorte des bannières, fait claquer les oriflammes et entre chez Jésus comme dans une boite de nuit. VIP de la soirée. C’est la pointe de piment, de rebellitude, qui fait qu’au delà de tout la vie est extraordinaire. Chacun accroché à sa hampe a le sentiment d’avoir mérité d’être là. La messe est belle. Les parures des prêtres même très belles ne sont pas ostentatoires, elles expriment un respect pour quelque chose de plus grand qui les dépasse. Ce n’est pas de la flagornerie mais une adhésion aux ordres anciens. Ce n’est pas une posture mais de l’amour comme l’aurait souhaité le Christ. Un lien solide comme celui d’un bateau des sauveteurs en mer. La messe s’éternise. La communion aussi. Les douleurs dans les jambes reviennent. Tout le monde n’a pas l’étoffe d’un martyr. C’est quand la vraie pose ?
Tous les sacs ont été déchargés sur une esplanade près de la gare. Certaines régions ont été un peu mélangées. De nouveau l’inquiétude de ne pas trouver ses affaires. Le regret de ne pas avoir accroché sur son sac un gyrophare commandable à distance. Puis on le retrouve. Tous les pèlerins sauf ceux qui partiront en car ou en voiture se poussent le long d’un grillage pour accéder aux quais. Plusieurs trains spéciaux ont été réservés. L’attente est longue. Les jambes brûlent. La patience mise à rude épreuve commence à faire défaut. Un premier train est rempli. Est-ce qu’on sera dans le second s’inquiètent certains ? Puis peu à peu tout se met en ordre. L’organisation est parfaite. Personne ne sera oublié. Le train passe par Versailles, beaucoup y descendront. Gare Montparnasse. Une fois dans le métro certains croisent d’autres pèlerins et sont surpris et amusés d’aller dans la même direction. Dans les regards la complicité d’avoir vécu quelque chose d’important. Ensemble. Quelques jeunes font un peu de bruit. Des regards hostiles. Celui des pèlerins est indulgent mais c’est déjà le retour à la réalité. On se dit au revoir sans se connaître vraiment. La recherche d’une fratrie, de ne pas être qu’un individu isolé et préoccupé de son seul confort.
De 14 000 on est passé à un. Soi-même présentement. Aucun regret. Aucun sentiment de solitude. Une impression douce d’avoir vécu un temps privilégié. Des souvenirs de beaux regards. De cette sœur habillée de blanc dont le vêtement se salit par le bas. Les fillettes avec deux nattes africaines de chaque côté et leurs yeux polissons. Les autres un peu plus vieilles qui ont rempli leurs sacs de gourmandises. Les garçons en scouts virils et paramilitaires. Les familles qui veulent proposer autre chose qu’une après-midi devant une console de jeu. Des moines bénédictins avec leur coupe du Nom de la Rose. Les séminaristes poupons au regard exalté. Ce vieux monsieur qui s’appuie sur un jeune pour s’aider à avancer. 800 bénévoles pour encadrer et protéger le troupeau. Les douleurs si fortes un moment ont presque disparu. Quelques ampoules et quelques crampes rappelleront l’effort physique.
Salut les cathos. À une prochaine fois pour d’autres aventures.
Témoignage envoyé par un lecteur.
10 juin 2019, la messe de clôture à Chartres :