Deux « partis satellites » du parti majoritaire, dirigés par Jean-Claude Gaudin et Renaud Muselier, ont parfois reversé une partie de leurs finances à la maison-mère. Un procédé qui ouvre une brèche dans le système de plafonnement des dons aux partis politiques.
Mis en lumière par l’affaire Bettencourt, les micropartis qui gravitent autour de l’UMP font l’objet de multiples interrogations. Officiellement, ces petites structures, qui se sont multipliées ces dix dernières années ont eu pour seul et unique but de financer et de promouvoir l’action locale de leurs leaders à l’aube des différentes élections.
Mais les révélations sur les dons de Liliane Bettencourt à l’Association de soutien de l’action d’Eric Woerth ont changé la donne. Les micropartis sont depuis soupçonnés de servir de « pompe à finances » au profit du parti majoritaire, en reversant une partie de leur budget à l’UMP.
Pourtant, dans les comptes des micropartis les plus souvent évoqués - celui d’Eric Woerth donc, mais aussi celui de Laurent Wauquiez par exemple -, rien ne laisse présager une pareille pratique : en 2008, aucun des partis dirigés par un ministre n’a ainsi fait remonter de l’argent vers la maison mère. Au contraire, ils reçoivent régulièrement des subventions de la part de l’UMP.
Moins connues, deux petites structures basées à Marseille font cependant figure d’exception. A commencer par « Cap sur l’avenir 13 », créé en janvier 2001 - à deux mois des municipales - par Renaud Muselier, député des Bouches-du-Rhône et alors premier adjoint de Jean-Claude Gaudin à la mairie de la cité phocéenne. Le parti est domicilié rue Sainte-Cécile à Marseille, au siège de la fédération UMP des Bouches-du-Rhône, dont Renaud Muselier est le secrétaire départemental.
En 2002, le microparti, dont les finances reposent sur des dons de particuliers et les contributions d’élus locaux qui lui reversent une partie de leur indemnité, a envoyé 38.376 euros à l’UMP, qui venait tout juste de voir le jour. Rebelote en décembre 2008 : le parti de celui qui deviendra un mois plus tard conseiller politique de l’UMP et qui dispose alors d’un budget confortable de 574.627 euros - dont 142.945 euros de dons de personnes physiques - signe un chèque de 10.000 euros au parti présidentiel.
La même année, en juillet, l’UMP a reçu un autre don de 120.000 euros réalisé par un autre microparti marseillais inconnu du grand public : l’Union Républicaine et d’Action Communautaire (URAC), qui avait déjà versé 8.000 euros en 2007. La structure, créée elle aussi en 2001, est cette fois-ci dirigée par Jean-Claude Gaudin lui-même. Elle est domiciliée à la permanence de Dominique Tian, maire de deux arrondissements marseillais et député de la seconde circonscription des Bouches-du-Rhône. Son mandataire financier est Bernard Deflesselles, le député du secteur de La Ciotat qui était en 2008 membre du bureau politique de l’UMP.
En versant 120.000 euros à l’UMP, le parti du maire de Marseille, alors vice-président du conseil national du parti majoritaire, a réalisé de loin le plus gros don reçu cette année-là par la maison-mère. Cette somme constitue en outre le principal poste de dépense de l’URAC, qui déclare seulement 37.000 euros de « charges externes ». Aucune dépense de « propagande et de communication », pas d’aide à d’éventuels candidats…
En cette année d’élections municipales, l’activité politique du microparti semble quasi-nulle. Ce qui n’a pas empêché le parti de Jean-Claude Gaudin de récolter 81.000 euros de dons de personnes physiques. En revanche, Cap sur l’Avenir 13 semble avoir joué un rôle plus important lors de la campagne électorale des municipales de 2008, en accordant notamment 229.000 euros d’aides à un ou plusieurs candidats.
Mais pour ces deux structures, la question de la possible multiplication des dons reste posée, comme l’explique la Commission des comptes de campagne et de financement politiques (CNCCFP). Grâce à la multiplication de partis satellites, « une même personne physique peut financer plusieurs partis en versant à chacun le montant plafond des dons autorisés (7500 euros, ndlr), les partis bénéficiaires reversant ensuite l’argent récolté au parti central », explique François Logerot, président de la CNCCFP. Rien d’illégal là-dedans. Mais la manœuvre constitue « un détournement de l’esprit de la loi » selon les propres termes de François Logerot.
Contactés, Jean-Claude Gaudin, Renaud Muselier et Bernard Deflesselles n’ont pas répondu à nos questions pour le moment.