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Aux Européens rejoignant les "rebelles" en Syrie : "Ne vous laissez pas embrigader !"

Entretien avec Bahar Kimyongür

Le Belgo-Turc Bahar Kimyongür, 39 ans, militant d’Attac-Bruxelles, poursuivi pour terrorisme en 2006 mais acquitté en 2009, a un regard tout particulier sur les Belges partis en Syrie pour soutenir la rébellion contre le régime de Bachar el-Assad. Il est en effet originaire d’Antioche, dans la province turque du Hatay, par où transitent les jeunes candidats à la résistance.

Que se passe-t-il dans votre région d’origine ?

La situation est dramatique. On fait face à de véritables tour-opérateurs du terrorisme international. Pour 200 euros, en quelques heures, un jeune Bruxellois peut se retrouver, via Istanbul, à Antioche, où des recruteurs viendront le cueillir, en camionnette ou en 4X4 rutilant, afin de l’affecter aux brigades internationales de la rébellion : les étrangers de Sham, les Mouhajiroun, voire Al Nosra. Tous les camps de réfugiés syriens, le long de la frontière turco-syrienne, au sud d’Antioche, sont doublés de camps d’entraînement. Les ateliers de fabrication d’armes pullulent. La frontière est une passoire. C’est un vrai Far West. C’est Mad Max !

À entendre les rebelles aguerris, comme Abdel Rahman Ayachi, fils de l’imam franco-syrien Bassam Ayachi, ces volontaires sont des poids morts.

Je suis de près une maman dont les deux enfants sont partis se battre en Syrie. Comme beaucoup de jeunes volontaires, ils sont généralement affectés à des tâches de ravitaillement et de logistique, en arrière-garde. Pour monter au front, les brigades préfèrent les Libyens, les Yéménites ou les Tunisiens. Ce qui est inquiétant, c’est que ces jeunes sont exposés à des heures de formation théologique. Un véritable endoctrinement.

Qui sont ces jeunes ?

Parfois de simples frimeurs qui rêvent de se faire photographier le lance-roquettes à l’épaule ; des idéalistes qui croient sincèrement œuvrer à la « libération » de la Syrie ; des fous furieux, anciens délinquants, qui sont pressés d’en découdre ; et puis des idéologues, de vrais djihadistes.

Il y a donc bien un fond religieux.

Certains instrumentalisent la religion pour attiser la haine. Il faut que les parents des enfants qui partent en Syrie sachent que leurs mômes sont embrigadés par des réseaux qui ne sont pas émancipateurs, qui pratiquent la surenchère antichiite, anti-alaouite. La Syrie vit sous la coupe d’une dictature militaire, mais j’ai bien peur qu’on remplace un mal par un pire : le djihadisme inféodé aux pays du Golfe.

Que dites-vous aux jeunes tentés par la Syrie ?

Qu’ils se trompent de lutte. Que les réseaux qui les embrigadent, infiltrés de criminels sans foi ni loi, distillent la haine. En partant en Syrie, nos jeunes se livrent aux pires islamophobes que je connaisse, les sbires d’Al Qaïda et de Sharia4Belgium.

Propos recueillis par Ricardo Gutierrez

Le Soir, vendredi 7 juin 2013

 

Sur ce sujet, voir aussi : « Des Belges ont-ils décapité un homme en Syrie ? »

Sur l’instrumentalisation de l’islamisme, chez Kontre Kulture :

 






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