Hier soir, François Bayrou et Jean-Louis Borloo ont scellé leur alliance sur le plateau du journal de TF1. L’UDI et le Modem ont signé un contrat de mariage mais pas de fusion, comme au temps de l’UDF, qui rassemblait divers partis. Une union totalement dans le débat public actuel.
L’UDF 2.0, petit filet d’eau tiède
Bien sûr, il y a une opportunité tactique, du fait du profond désamour des Français, tant pour la majorité actuelle que pour l’UMP, qui ne s’est pas remise de la tragi-comédie de l’élection de son président. Mais c’est une chose de surfer sur un mécontentement, cela en est une autre de rassembler des suffrages aux élections. Car quelle politique cette « Alternative » va bien pouvoir porter ? Quelle serait la différence en matière d’Europe, de mondialisation, d’immigration, de sécurité, d’éducation entre les centristes et les politiques menées sous Nicolas Sarkozy et François Hollande ? Ce n’est pas l’indigent filet d’eau tiède qui leur sert de charte qui va nous éclairer sur la question.
Les centristes ont voté tous les traités européens, accepté la camisole budgétaire, soutiennent le traité transatlantique, l’indépendance des banques centrales et la privatisation de la création de la monnaie, le libre-échange dérégulée, la course à la compétitivité. Pire, en 2012, alors que le candidat PS voulait équilibrer le budget en 2017, que le président sortant annonçait 2016, François Bayrou annonçait 2015. Aurait-il alors pratiqué une politique d’austérité sauvage pour y arriver, coupant plus encore les dépenses et augmentant plus encore les impôts qu’aujourd’hui ?
Quel espace politique ?
Alors, bien sûr, la droitisation de l’UMP créé un certain espace politique. Le virage anti-Etat et anti-impôts de plus en plus assumé de la formation dirigée par Jean-François Copé créé un espace politique. Ce dernier a ainsi proposé de réduire la dépense publique de pas moins de 130 milliards d’euros, sans naturellement s’appesantir sur les détails. Les jeunes actifs de l’UMP ont carrément proposé de supprimer l’impôt sur le revenu, faisant passer Reagan et Thatcher pour de dangereux progressistes adeptes de la redistribution des revenus. Naturellement, le financement n’est pas précisé.
Néanmoins, il ne faut pas surestimer l’espace politique de l’UDF 2.0 car sur l’Europe ou la mondialisation, on peinera à distinguer les différences avec l’aile la plus libérale du PS (Moscovici & Co) et l’aile plus modérée de l’UMP. On ne voit pas bien en quoi ils pourraient proposer des solutions différentes pour lutter contre le chômage. Ils proposent ce même cocktail indigeste qui étouffe le pays, à savoir plus d’Europe et de compétitivité, en l’habillant d’humanisme et d’écologie. Mais il sera difficile de voir la différence avec le PS. D’ailleurs, les deux propositions faites hier soir (une meilleure représentation des partis et une baisse de charges) sentaient le réchauffé et qui ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Du coup, le choix des européennes comme première élection nationale pour la nouvelle alliance apparaît très hasardeux. En quoi les électeurs pourraient être motivés pour soutenir cette liste qui soutient comme tant d’autres cette mauvaise Europe qui les torture. Le succès est, heureusement, tout sauf certain.