C’est tout l’échec (attendu) du féminisme, comme il en a été du racisme en d’autres temps avec la discrimination positive : désormais plus aucune femme n’a de légitimité tant sa présence dans un concours ou dans une quelconque compétition reste toujours suspecte de favoritisme. Pire, même sa simple exposition (dans un film, sur un plateau de télévision, ou par extension dans n’importe quel événement de la vie) est entachée d’une méfiance sur le bien-fondé de sa présence.
Ainsi donc de Naïs Pirollet, pourtant sortie major de promotion de l’Institut Paul Bocuse – un titre dont on peut penser que seule la compétence y est pour quelque chose. Mais voilà, première femme à représenter l’équipe de France aux Bocuse d’Or, la défiance est de mise, pour le plus grand préjudice de la candidate et de ses qualités réelles. Car présenter une femme en 2023, jeune de surcroît, est tellement attendu que cela résonne presque comme une commande. Le féminisme a voulu mettre les femmes à l’honneur, elle les a toutes rendues sujettes à caution.
En 1989, le concours n’en était alors qu’à sa deuxième édition, et ce fut une femme qui le remporta, la chef Léa Linster. À une époque pas encore encombrée du féminisme radical et stupide de nos jours, la jeune impétrante avait pu jouir de toute la légitimité de son prix sans qu’aucun vieux réactionnaire de notre genre n’y trouve à redire. Quelle belle époque pour les femmes !
Échec dans l’échec, Naïs Pirollet ne terminera que cinquième de la compétition, même si elle remportera une nouvelle épreuve, stupide mais so-2023 : Feed the kids, un plat destiné aux enfants que quelques spécimens Benetton goûteront et jugeront. Dans un pays gouverné par un gamin, quoi de si étonnant que des gones (puisque la compétition se déroule à Lyon) viennent nous donner leur incompétent avis sur un plat qui aura demandé des mois de préparation et 5h35 de sueur à des experts en technique culinaire ?
La féminisation d’un domaine étant généralement signe d’une perte de vitesse dudit domaine, on se rassurera en constatant que les 24 membres du jury restent des mâles blancs (voire jaunes, on connait l’excellence des cuisines asiatiques) de plus ou moins 50 ans et probablement hétérosexuels. D’ailleurs l’exception qui confirmera cette règle est la présence d’une seule chef française (mais officiant aux États-Unis – on ne sera pas étonnés)... fiancée à une actrice américaine. Sic transit gloria mundi.
Remise des différents prix