Plus de 100 000 personnes ont défilé, lundi à Rio de Janeiro, et 65 000 à Sao Paulo, ville d’où est partie la contestation, pour dénoncer les erreurs de priorité commises par les dirigeants brésiliens, et ce à un an de la Coupe du monde de football.
Quelque 200 000 personnes ont manifesté, lundi, dans les rues des principales villes du Brésil alors que le pays fait face à une vague croissante de mécontentement concernant la qualité des services publics, les violences policières et la corruption gouvernementale.
Les manifestations, organisées via les réseaux sociaux, ont perturbé le fonctionnement de plus d’une demi-douzaine d’agglomérations parmi lesquelles Rio de Janeiro, Sao Paulo, Brasilia ou encore Belo Horizonte.
Dans la capitale, des manifestants sont montés sur le toit du Congrès avant de pénétrer dans les locaux.
L’état des services publics mis en cause
Les manifestations, qui coïncident avec la Coupe des Confédérations de football, répétition générale de la Coupe du monde que le Brésil accueillera l’année prochaine, se multiplient depuis deux semaines en raison d’un ralentissement de l’économie et d’une forte inflation.
Si les défilés se sont globalement déroulés dans une ambiance plutôt festive, à Rio, des manifestants ont lancé des pierres sur les forces de l’ordre, incendié une voiture et vandalisé le bâtiment de l’assemblée locale.
La mobilisation est sans précédent depuis les manifestations contre l’ancien président Fernando Collor de Mello, accusé de corruption et destitué en 1992.
À l’origine, il s’agissait de protester contre une légère augmentation locale du prix des billets de bus et des tickets de métro. Le mouvement a pris de l’ampleur et a débordé à Sao Paulo, agrégeant les récriminations d’une partie de la population brésilienne choquée par le budget consacré à la construction des infrastructures qui accueilleront la Coupe du monde.
“Des milliards pour les stades et rien pour l’éducation”
Les autorités brésiliennes espèrent que le Mondial 2014 puis les Jeux olympiques de 2016 à Rio seront l’occasion d’illustrer la place grandissante du pays, puissance émergente, sur la scène internationale. Mais pour les manifestants, l’écart entre les milliards de dollars d’argent public investis pour l’événement et l’état des services publics est criant.
Dans un rapport récent, la cour fédérale des comptes estimait que les dépenses engagées pour la Coupe du monde excédaient déjà de 15% au moins le budget initial fixé à plus de 8 milliards d’euros.
De nouvelles manifestations sont prévues ces prochains jours, accentuant la pression sur les pouvoirs publics qui s’apprêtent aussi à recevoir plus de deux millions de visiteurs, le mois prochain, pour les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ). Ce grand rassemblement de la jeunesse catholique sera l’occasion pour le pape François, premier pape latino-américain de l’histoire, d’effectuer son premier déplacement à l’étranger.
Pour la présidente Dilma Rousseff, ce mouvement de contestation intervient à un moment délicat puisqu’elle tentera de briguer un deuxième mandat l’an prochain dans un contexte économique moins favorable. La croissance, qui était encore de 7,5% en 2010, s’est enrayée. L’an dernier, le PIB brésilien n’a crû que de 0,9%. L’inflation, elle, frôle les 6,5%.
Pour l’instant, Rousseff demeure très populaire, en particulier parmi les pauvres et la classe ouvrière, mais sa cote de popularité a commencé à décliner pour la première fois depuis sa prise de fonction en 2011. Samedi, elle a été huée lors de la cérémonie d’ouverture de la Coupe des Confédérations.
Mais la réaction policière violente lors des manifestations de la semaine passée - une centaine de personnes dont quinze journalistes ont été blessés jeudi dernier à Sao Paulo, où les forces de l’ordre ont fait usage de balles en caoutchouc - a ranimé de mauvais souvenirs dans une population qui a connu deux décennies de dictature militaire entre 1964 et 1985.