« Un homme qui n’aime pas les chiens ou ne désire pas en avoir un n’est pas digne d’entrer à la Maison-Blanche » (Calvin Coolidge, président de 1923 à 1929)
Le chien est un animal utile, même au plus haut niveau. Le chien du président est censé donner de son maître une image de pondération, de fidélité, de force aussi. On n’a jamais vu un président avec un rat, ou un chat. Le chat, cet animal diabolique, représente plutôt les qualités de paresse (aucun chat n’a jamais bossé), de lâcheté (il se barre tout le temps), de dissimulation (il aime être invisible), de ruse (il prend les chiens pour des cons), et de sournoiserie (il se fout de la gueule de ses maîtres). Toute ressemblance avec…
Sémiologie du rapport politique chien/chat
La dualité et les différences chien/chat sont formidablement démontrées dans le film Volt, star malgré lui. Si le chien n’a pas de malice, il dispose de la force. Le chat, très manipulateur, doit donc faire très attention à ses manipulations, qui peuvent lui revenir dans le museau. Derrière le chien et le chat se profilent les caractéristiques du peuple et de son élite. Le peuple, soit le nombre et la force, face à l’élite, protégée par la crainte et le respect qu’elle inspire (la peur du châtiment divin fonctionne encore), et bien sûr son art de la manipulation.
Le duo chien/chat de Volt est la métaphore du duo peuple/élite, unis pour le meilleur et le pire dans l’Histoire. Parfois, le chien rejette et mord le chat, mais le plus souvent, le chat dirige le chien. En s’exhibant avec des chiens mais jamais avec des chats (sauf Jimmy Carter, qui devra faire cohabiter son chat et le chien de service), nos présidents veulent nous faire croire qu’ils sont de notre côté, celui des chiens… tout en nous dominant. Malheureusement, l’Histoire prouve le contraire : la plupart des hommes d’État travaillent pour la classe dominante symbolisée par la triple alliance du Marché, de la Banque et des Réseaux. Parfois ouvertement – on appelle ça fascisme –, mais généralement avec hypocrisie, et là ça s’appelle démocratie. Les chiens préférant la démocratie, c’est moins déprimant. Heureusement pour le clan des chats, le troupeau de chiens croit encore dans le Chat. Pour combien de temps encore ? C’est une autre histoire… Tout dépend du nombre de chiens qui ouvrent les yeux, ou qui pâtissent du pouvoir des chats.
- Vladimir pose dans la neige avec Yumme et Buffy
Yume est une femelle de race Akita-inu, un cadeau du maire de la ville japonaise d’Akita, qui a 2 ans depuis le 24 avril. Buffy, de son côté, est un adorable berger Karakachan (race réputée pour son calme et sa gentillesse), offert en 2010 à Vladimir Poutine lors de sa visite en Bulgarie par le Premier ministre de l’époque, Boiko Borisov. Après un appel lancé par le gouvernement, c’est Dima Solokov, un petit garçon russe de cinq ans, qui a trouvé le nom de Buffy.
Le akita inu est un chien japonais qui ressemble au croisement d’un renard avec un loup sibérien. Ligne noble, puissance musculaire (issu de l’immense Tosa), cet animal a longtemps été un chien de combat et de chasse au gros : ours, cerf et sanglier. Pas vraiment le roquet qui course le rat dans son terrier.
De son côté, le berger Karakachan est une vieille race européenne (pour les chiens, on a encore le droit de parler de races). Ce berger bulgare résiste à tous les temps, à toutes les maladies, et sait défendre des troupeaux contre les loups. Malgré ses 55 kg maximum, il développe une grande force.
On sent qu’à travers ses deux amis, Vlad (diminutif affectueux de Vladimir) cherche à faire passer le message suivant : bonne race traditionnelle, rompue à toutes les attaques de loups, ne craignant ni le froid (et la guerre du même nom) ni les maladies modernes (ultralibéralisme, atlanto-sionisme).
« Le Camarade Loup mange et n’écoute personne et n’a aucune intention d’écouter qui que ce soit. Où disparaît tout le pathos sur la défense des droits de l’homme, la démocratie, lorsqu’il s’agit de défendre ses propres intérêts ? »
En face, de l’autre côté de l’océan, dans la maison du loup, ou de l’Oncle Sam, le chien doit montrer des qualités de coolitude, de sympathie, pour inspirer la confiance et la connivence. Le peuple américain aime à croire que ses élus sont les maîtres du monde, certes, mais du côté du Bien.
« Si vous voulez un ami à Washington, prenez un chien » (Harry Truman, président de 1945 à 1953)
Dans ce sketch du Late Show, une caméra subjective a été placée sur Bo, le chien de Barack Obama :
Un président américain ne se montrera donc jamais avec une paire de tueurs canidés sibériens, comme son homologue russe, mais avec des petits formats empathiques, qui plaisent aux enfants (le public est un grand enfant) et qui ne font pas peur. Car s’il fallait incarner le lobby militaro-industriel impitoyable qui gouverne l’Amérique en sous-main depuis l’assassinat de Kennedy, il faudrait croiser un T-Rex avec un Rottweiler sous amphétamine. Donc exit version réalité et bonjour version Hollywood. C’est pourquoi nous retrouvons les Bush, de père en fils, qui s’affichent avec des scottish terriers. Sortes de balais-brosses moustachus courts sur pattes, qui ont l’avantage de dépoussiérer les sols lustrés de la Maison-Blanche.
On peut en tirer une loi, dans certaines limites : plus le pouvoir est élevé, plus le chien est petit et sympathique. Mais ça ne vaut que pour les Américains, qui font tout pour éviter de renvoyer une image totalitaire. Car en remontant un peu dans le temps, on tombe, par exemple, sur les totalitarismes du XXe siècle. En Allemagne, tout le monde connaît la relation entre le chancelier Hitler et sa chienne Blondi. Blondi, dont il pleurera la disparition. D’aucuns se révolteront contre cet homme qui verse un torrent de larmes pour un chien et pas la moindre goutte pour ses millions de victimes, mais c’est comme ça. On ne refera pas l’Histoire. et nous connaissons tous des humains qui préfèrent les bêtes aux hommes. Ces déçus de l’humanité trouvent réconfort auprès des mammifères qui ne comptent pas leur affection. Quand on oublie son chien dehors, ou dans une pièce, il ne nous en veut pas, il est au contraire tout content de nous retrouver. Ce qui n’est pas forcément le cas de l’épouse, par exemple.
Les animaux n’ont donc pas la cruauté des humains. Même si un chat peut jouer avec une souris à coups de griffe (une seule, c’est pire que trois) avant de l’achever (et parfois il la laisse crever doucement), on doute que ce soit du sadisme. Les animaux ne torturent pas leurs proies, ils les tuent à leur manière : la lionne étouffe le buffle, les hyènes ou les lycaons dévorent le gnou vivant mais ça va tellement vite que le pauvre herbivore n’a pas le temps de comprendre, sans compter les autoshoots d’adrénaline qui effacent la douleur. On peut ainsi se faire déchiqueter vivant et assister à sa propre « opération », les yeux ouverts… Dans le même ordre d’idées, un des survivants blessé du Bataclan a raconté que lorsqu’il a voulu se lever et courir, entre deux recharges de kalachnikov, pour échapper aux rafales des tueurs, il s’est rendu compte qu’il lui manquait un… pied. Il n’avait rien senti.
Mais revenons à nos chiens, et à nos présidents.
Blondi donnera malgré elle une bien mauvaise image des chiens-loups, ou des bergers allemands. Associée aux gardiens des camps de concentration, l’espèce ne sera plus « commercialisée » après les années 70, quand commencera la propagande shoatiste dans les médias. Hasard ou coïncidence, on vous laisse juges.
- Hoover et Johnson
On a quand même retrouvé non pas un président américain, mais un élément incontournable du pouvoir profond américain pendant 40 ans – Edgar Hoover – qui lui, pose avec un berger allemand, ou pas loin. Hoover, c’est le monsieur Renseignement de l’Oncle Sam pendant tout l’après-guerre jusqu’à celle du Viêt Nam incluse. Lui osera s’afficher avec un chien pas cool, mais à sa décharge, l’image ne comptait pas autant à l’époque qu’aujourd’hui, où un staff de « com » lui aurait intimé de changer rapidement de « meilleur ami de l’homme ».
Lyndon Johnson, justement, le président à l’origine de l’assassinat de Kennedy, jettera son dévolu sur une paire de Beagles. Un bon petit chasseur de lapins, le beagle, issu de croisements britanniques, ces rois des expériences avec les races.
Johnson, le jouet très limité du lobby militaro-industriel, qui prolongera la guerre du Viêt Nam pour le résultat que l’on sait : gigantesques bénéfices pour le lobby, 58 000 morts côté peuple, 150 000 vétérans suicidés dans les décennies suivantes, sans compter les troubles mentaux et autres stress post-traumatiques, deux millions de morts écrasés sous les bombes des B52 côté vietnamien, un pays exsangue, les ravages de l’agent Orange et enfin, histoire de souligner la dinguerie des dirigeants à la botte du pouvoir profond, l’option atomique envisagée...
Cet Hitler du sud-est asiatique, jamais jugé, sera opportunément effacé des livres d’Histoire américains.
Juste après cette ordure de Johnson, Nixon prend le relais avec un chien qu’on ne voit plus aujourd’hui, très à la mode – et pour cause – dans les seventies, l’épagneul breton. Ou approchant. On n’a pas été non plus tout vérifier, au mot ou à la race près. Sur le cliché, le grand admirateur du Général de Gaulle pose avec son toutou aux grandes oreilles et là, la transition est toute trouvée avec l’affaire du Watergate. Grandes oreilles et écoutes, micros dans les locaux du Parti démocrate, l’affaire est connue, et aura la peau de Richie. Pour une fois qu’Américains et Français étaient sur la même longueur d’onde… En effet, les rapports entre Kennedy et de Gaulle étaient exécrables. Seconde transition, ce coup-ci vers les chiens de nos dirigeants tricolores.
En matière canine, les présidents de la République française ne brillent pas par leur originalité. Ça se saurait, si ces élus avaient de l’imagination et du courage politique. Depuis de Gaulle, ça s’est un peu perdu… Bref, le chien obligatoire à l’Élysée, c’est le labrador. Pompidou, Giscard, Mitterrand et Hollande s’afficheront avec : Baltique pour Mitterrand, Maskou pour Chirac, Clara (et pas Carla) pour Sarkozy, et Philae pour Hollande. Même Sarkozy, qui préférait les petits formats – en chiens comme en femmes – aura son labrador de service.
Essayons de savoir pourquoi chez nous le couple labrador/président est obligatoire.
D’abord, le labrador est un excellent chien de compagnie, qui ne vous importunera pas pendant que vous travaillez, sauf les petits qui sont assez foufous (ils rongent tout ce qui traîne, comme les poignées de tiroirs à leur hauteur), mais on suppose que les présidents les reçoivent déjà dressés, et calmés. On n’imagine pas Sarkozy recevant son homologue libyen – par exemple – pendant que Clara lui mange une pantoufle, ou une babouche, et que Rachida sort nue des appartements privés. Le labrador est intelligent, calme, fidèle, c’est pourquoi il a été choisi comme chien d’aveugle. N’y voyez aucun rapport avec nos dirigeants, ce serait trop facile. Mais c’est vrai que depuis de Gaulle, nous n’avons pas tiré le gros lot en matière de visionnaires…
Surtout, le labrador est là pour donner l’image d’un peuple français intelligent et fier, mais quand même soumis. On flatte sa vanité de la main gauche, et on lui fait faire ce qu’on veut de la main droite. Ça a toujours été comme ça en France, et c’est pas près de changer.
La relation président/chien rappelle que le peuple n’est pas encore affranchi de son besoin d’autorité. Il aime à être représenté par ce qui lui ressemble – ou qui joue à lui ressembler – et ça le flatte.
On n’a toujours pas vu dans le monde de peuple complètement affranchi de son ou de ses maîtres, la démocratie ayant fait passer l’unicité du maître en pluralité démocratique, mais le principe reste inchangé : que ce soit un roi ou un gouvernement, la domination est là. Attention, on ne dit pas que la domination est inutile ou néfaste, bien au contraire, mais elle existera tant qu’il y aura un désir, naturel ou pas, de soumission dans le peuple. Ou une peur de la liberté. Ce désir est plus probablement basé sur une ignorance, celle de sa propre force, ou de ses propres qualités. Mais le pouvoir est intelligent : régulièrement, il pioche dans le peuple ce qui va raviver son sang, et ajouter de la valeur ajoutée à celle qu’il a déjà, et qui lui permet de poursuivre sa domination. Grâce à une avance intellectuelle, à la base de son avance technologique et médiatique.
Pour dire les choses plus simplement, l’élite c’est la qualité, le peuple la quantité. Ceux qui se lamentent, que ce soit en Inde ou en France, de voir les « cerveaux » quitter le sol national pour aller aux États-Unis, devraient comprendre que la même migration cérébrale se produit en interne : les éléments les plus brillants, ou disons potentia-compatibles du peuple, sont repérés et utilisés par le pouvoir pour conserver son avance. La promotion républicaine a donc deux objectifs : l’un aisément visible, donner plus à ceux qui donneront plus à la Nation, mais derrière cela, retirer les meneurs potentiels pour en faire des dirigeants… contre le peuple. Ou en tout cas pas « pour » le peuple. C’est ainsi que le pouvoir récompense les révoltés, qui finissent souvent du côté du manche. Comment résister à la Belle vie ? Combien de dirigeants syndicaux pincés les mains dans le banquet, entre chauffeur et agapes, passant de leaders ouvriers en obligés du MEDEF et du riche patronat des métallos !
La danse des révolutionnaires avec le pouvoir doit nous rendre vigilants : jusqu’à présent, ils ne sont pas beaucoup à avoir pris le pouvoir pour le rendre au peuple. En général, on prend le pouvoir, et puis on oublie de le rendre.
Conclusion : méfions-nous des dirigeants qui n’aiment pas les chiens mais qui en ont. Pourtant on en a en stock qui aiment vraiment les chiens ! Ces deux-là ne sont pas des figurants achetés en dernière minute pour la photo :
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— N. Dupont-Aignan (@dupontaignan) 26 août 2017
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— Jean-Marie Le Pen (@lepenjm) 26 août 2017