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Charnier à Tripoli ? ’’On nous ment’’

Le Conseil national de transition avait annoncé dimanche la découverte de restes de victimes de la prison d’Abou Salim, à Tripoli. Mais sur place, certains proches n’ont trouvé lundi que des os de mammifères.

C’est à la mi-février, à Benghazi, à l’appel des familles de disparus de la prison Abou Salim, à Tripoli, et qui protestaient contre l’arrestation de leur avocat, que la révolution avait commencé. L’écho des disparus d’Abou Salim dans l’opinion est toujours vif, à tel point que lundi le défilé des familles qui avaient perdu un proche était incessant sur les lieux supposés « du massacre de masse ».

Othmen Abdeljelil, responsable de la commission des disparus, avait convié, dimanche, « les correspondants étrangers » à juger « par eux-mêmes de la véracité des crimes commis » par le régime. « Ensuite, les restes des corps ont été balancés sur le terrain à côté de la prison », avait-il affirmé.

Mais derrière l’enceinte de l’établissement, rien ne laisse supposer la présence d’ossements. Pourtant, ils étaient encore une trentaine, hier à la mi-journée, à gratter d’un bout de bois le sol sablonneux de ce terrain vague. Mais pas d’équipe médicale sur les lieux, qui aurait pu certifier aux familles totalement perdues que ce fémur ne pouvait appartenir qu’à un mammifère de 500 kilos. Pas de pelle mécanique pour excaver le sable.

« Os de dromadaire... »

Ne parlons même pas d’une présence officielle du Conseil national de transition (CNT) sur place, simplement pour justifier cette incroyable annonce qui a secoué l’opinion dimanche, alors que la même commission des disparus avait officiellement appelé le président Moustapha Abeljalil « à épauler les recherches » en déployant « tous les moyens ».

« On cherche la trace de nos fils. On nous a dit à la radio que les gens du CNT avaient trouvé des restes humains. Mais il n’y a que des os de bêtes et des boîtes de conserve. Il n’y a même pas de gardes pour sécuriser le champ... Ce sont les mêmes méthodes que les autres. On nous ment », se lamente une dame.

Selon les ONG, et des témoignages concordants, 1270 prisonniers ont été exécutés en juin 1996 puis, en 2000, leurs restes auraient été jetés par-dessus le mur de la prison dans ce terrain vague où traînait, hier, une bêche. « Ce sont les preuves des crimes de masse commis par les soldats de Kadhafi. Nous avons besoin de l’aide internationale.

Des spécialistes de la médecine légale pour dater les corps », avait alors solennellement expliqué le médecin Salem Ferjari, membre de la commission spécialement créée par le CNT pour rechercher les disparus d’Abou Salim.

Un homme, les paumes levées vers le ciel, pleure devant les caméras. Un type dit en se masquant la bouche : « C’est un os de dromadaire... » Mais il est trop tard pour freiner l’emballement. Un jeune s’agenouille devant l’os gros comme un pied de table et crie : « Dieu est grand ! » Une corde en chanvre, qui devait servir à entraver une bête, devient un lien derrière les mains. Un autre soulève une mâchoire d’herbivore et la présente comme une preuve irréfutable des crimes commis.

Une petite dame baisse les yeux. Elle a compris qu’elle ne retrouverait rien ici des restes de son fils enfermé depuis 1988 : « Il a été pris un matin chez nous par les soldats. Je suis venu jusqu’en 1998 lui apporter des vêtements. Puis j’ai reçu une lettre la même année me disant qu’il était mort et qu’ils l’avaient enterré. Je suis revenue leur demander où ils l’avaient enterré. Ils m’ont traité de chienne. » Elle s’en va. Il ne reste que des os de chameau et la peine de cette petite dame qui cherche son fils depuis treize ans.

 






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