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Comprendre le Grand Israël – Eschatologie matérialiste et domination impériale

Un article de Youssef Hindi (exclusivité E&R)

Comprendre le Grand Israël
Eschatologie matérialiste et domination impériale

Un article de Youssef Hindi en exclusivité pour le site E&R !

 

Sommaire

 

- Le matérialisme vétérotestamentaire

- Origines du matérialisme biblique

- Aux origines du Grand Israël

*

 

Ce cinquième article d’une série de Comprendre est destiné à tous ceux qui ont lu mon livre Comprendre le conflit israélo-palestinien et qui désirent approfondir leurs connaissances et leur compréhension de ce vaste sujet.

 

Depuis le début de l’épuration ethnique à Gaza, plusieurs tabous ont volé en éclat, et la réalité de la politique et du projet israéliens est brusquement passé du statut de « théorie du complot » à celui de « fait connu de tous ». Le projet d’établissement d’un Grand Israël, du Nil à l’Euphrate est désormais évoqué dans certains grands médias [1], de même que la dimension messianique du sionisme [2].

Le Grand Israël est un sujet important qui doit être traité sérieusement. Les sionistes, religieux et athées, prétendent que le royaume d’Israël antique, à l’époque de Salomon, s’étendait du Nil à l’Euphrate. Le projet sioniste vise à restaurer ce royaume dans « ses » frontières [3] ; mais nous allons démontrer ici qu’elles sont mythiques et qu’elles résultent de l’appropriation de l’histoire d’un empire qui n’avait rien de juif.

 

Le matérialisme vétérotestamentaire

Depuis l’Antiquité, depuis le retour d’exil à Babylone, les juifs espèrent – et certains parmi eux travaillent à – l’avènement d’un empire mondial. Citons par exemple le philosophe juif Philon d’Alexandrie (20 av. J.-C. ; + 45) qui, s’adressant à ses coreligionnaires, leur recommandait de ne point irriter les Sophistes (lesquels étaient très critiques des juifs) et d’attendre patiemment leur châtiment, qui arrivera le jour où l’empire juif sera établi sur le monde [4].

Effectivement, la promesse biblique faite aux fils d’Israël doit s’accomplir dans ce bas monde ; l’au-delà n’est mentionné nulle part dans la Torah et les récompenses annoncées aux juifs sont exclusivement matérielles.

Bernard Lazare avait souligné [5] que le judaïsme était dépourvu de spiritualité et de métaphysique [6]. L’important pour les juifs, écrit B. Lazare, « était la vie ; ils cherchaient à l’embellir de tous les bonheurs, et ces forcenés idéalistes furent, par un saisissant et explicable contraste, les plus intraitables des sensualistes. Yahvé leur avait assigné sur la terre un certain nombre d’années ; il leur demandait, pendant cette existence, trop courte au gré de l’Hébreu, un culte fidèle et scrupuleux ; en retour, l’Hébreu réclamait de son Seigneur des avantages positifs. C’est l’idée de contrat qui domina toute la théologie d’Israël. Quand l’Israélite remplissait ses engagements vis-à-vis de Yahvé, il exigeait la réciprocité. S’il se croyait lésé, s’il jugeait que ses droits n’étaient pas respectés, il n’avait aucune bonne raison de temporiser, car la minute de bonheur qu’il perdait était une minute qu’on lui volait, et que jamais on ne pourrait lui rendre… » [7]

Par conséquent, la mort est, pour un juif, un malheur en soi, au contraire du chrétien et du musulman, pour qui la véritable vie commence après la mort.

Raison pour laquelle le Coran fait ce reproche aux juifs :

« Et vraiment tu trouves les juifs, plus que personne, cramponnés à la vie, plus que les associateurs (polythéistes). Tel d’entre eux souhaite prolonger sa vie mille ans ; mais la longévité ne l’éloignerait pas du tourment. » (Sourate 2, 96)

Cette perception négative de la mort dans le judaïsme s’explique par le matérialisme biblique, dont nous allons retracer ici les origines.

 

Origines du matérialisme biblique

Commençons par le commencement de la Torah. La création, telle qu’elle y est décrite. D’après le premier livre du Pentateuque, la Genèse, le Paradis et le jardin d’Éden se situaient sur terre, plus précisément en Orient, en Mésopotamie, près de l’Euphrate (Genèse 2, 14) :

« Yahvé planta un jardin en Éden, vers l’Orient, et y plaça l’homme qu’il avait façonné. » (Genèse 2, 8)

Selon le christianisme et l’islam, le Paradis se trouve dans l’au-delà. Si dans l’Évangile, contrairement au Coran, il n’y a pas de version de la Création corrigeant celle de la Torah, il y est toutefois très souvent fait mention du Royaume des cieux, qui n’est pas de ce monde et où la récompense ultime attend les croyants :

« Alors Jésus leva les yeux vers ses disciples et leur dit : "Heureux, vous qui êtes pauvres, car le royaume des cieux est à vous !
… Réjouissez-vous en ce jour-là, et tressaillez de joie, car voici que votre récompense est grande dans le ciel… » (Luc 6, 20-23)

De même que l’Enfer attend, dans l’au-delà, ceux qui subiront le châtiment :

« Ne craignez pas ceux qui tuent le corps, et qui après ne peuvent rien faire de plus.
 Je vais vous apprendre qui vous devez craindre : craignez Celui qui, après vous avoir tué, a le pouvoir de jeter dans la géhenne ; oui, je vous le dis, craignez Celui-là. » (Luc 12, 4-5)

De même, le Coran fait la promesse d’une rétribution et d’une punition dans l’au-delà. Et, au contraire de la Bible hébraïque, le Coran dévalorise ce monde matériel éphémère, en comparaison de la vie éternelle dans l’au-delà :

« Sachez que la vie d’ici-bas n’est que jeu, frivolité, parure, rivalité d’orgueil entre vous, joutes sur la quantité de biens ou le nombre d’enfants. À la semblance d’une ondée : la végétation qu’elle fait naître charme les dénégateurs, puis elle s’affole et tu la vois jaunir, et puis elle tombera en détritus. Il y aura dans la vie dernière châtiment terrible, indulgence de Dieu et Son contentement. Quant à la vie d’ici-bas, elle n’est que jouissance d’illusion.
Faites assaut (de mérites) en vue d’une indulgence venue de votre Seigneur, vers un Jardin dont l’immensité égale celle du ciel et de la terre : il est tout prêt pour ceux qui croient en Dieu et à Son Envoyé : c’est là la grâce de Dieu, Il en gratifie qui Il veut. » (Sourate 57, 20-21)

L’eschatologie juive est quant à elle tout autre. La résurrection n’a pas lieu dans l’au-delà, mais sur terre :

« Alors il [Yahvé] me dit : "Fils de l’homme, ces ossements, c’est toute la maison d’Israël." Ceux-ci disent : "Nos os sont desséchés, notre espoir est perdu, c’est fait de nous !"
Eh bien ! Prophétise et dis-leur : Ainsi parle Yahvé : Voici que je rouvre vos tombeaux, et je vous ferai remonter de vos tombeaux, ô mon peuple ! Et je vous ramènerai au pays d’Israël. » (Ézéchiel 37, 11-12)

Les juifs seraient alors ressuscités et ramenés sur terre, au pays d’Israël, pour l’éternité, dans la paix. Une paix terrestre décrite ainsi dans le livre d’Ésaïe (la partie tardive rédigée non pas par le prophète Ésaïe, mais par des prêtres scribes à l’époque de la domination perse) :

« Le loup et l’agneau paîtront côte à côte, le lion comme le bœuf mangera de la paille et le serpent se nourrira de poussière ; plus de méfaits, plus de violence sur toute ma sainte montagne (le Mont Sion) : c’est Yahvé qui a parlé. » (Ésaïe 65, 25)

Dans ces deux passages, du livre d’Ézéchiel et d’Ésaïe, la promesse de résurrection et de paix ne concerne que le peuple et la terre d’Israël.

Même dans le Livre d’Énoch – qui n’a pas été intégré au corpus biblique mais qui a alimenté la tradition mystique juive (Kabbale) – l’eschatologie est matérialiste. Les justes habiteront la terre et non un paradis dans l’au-delà :

« En ces jours, la terre rendra son dépôt, et le schéol rendra ce qu’il a reçu, et les enfers rendront ce qu’ils doivent. Il (l’Élu) choisira parmi eux les justes et les saints, car il est proche le jour où ils seront sauvés. L’Élu, en ces jours, siègera sur mon trône, et tous les secrets de la sagesse sortiront des sentences de sa bouche… Leur visage (celui des justes) brillera de joie, parce que, en ces jours, l’Élu se lèvera ; et la terre se réjouira, et les justes l’habiteront, et les élus marcheront et se promèneront sur elle. » (Livre d’Énoch 51, 1-5)

Ce matérialisme biblique, et la perception négative qu’ont les juifs de la mort, tirent vraisemblablement leurs racines de la religion mésopotamienne.

Il ne faut pas s’en étonner, car la Bible hébraïque contient des traces de mémoires remontant au début du IIe millénaire av. J.-C. ; époque où sont recensés des groupes sémites nomadisant de la Mésopotamie au sud de la Palestine, et qui, comme le déduit Jean Bottéro, sont sans aucun doute les ancêtres d’Israël [8]. D’ailleurs, on trouve des traces, dans la Torah, de la vision cosmologique des anciens Hébreux, qu’ils avaient empruntées aux Mésopotamiens. Par exemple, il est fait mention dans un passage de l’Exode des « Eaux souterraines » (Exode 20, 3) ; conception mésopotamienne qui imaginait l’univers comme une immense sphère creuse, complètement immergée dans les « Eaux supérieures » du « grand Abîme », séparées des « Eaux inférieures » par la « Voûte » du Ciel (description que l’on retrouve également en Genèse 1, 6-8, laquelle est contredite par le Coran dans la Sourate 23, 18). À l’horizon de la Terre, croyaient les Mésopotamiens, de hautes montagnes formaient autant de colonnes pour supporter la Voûte du Ciel [9]. D’ailleurs, ces colonnes soutenant la terre sont mentionnées dans la Bible (1Samuel 2, 8 ; Ésaïe 24, 18 ; Job 38, 4-6). Le Coran réfute l’existence de ces colonnes soutenant la terre et le ciel : « C’est Dieu qui a élevé les cieux sans piliers que vous puissiez voir. » (Sourate 13, 2) ; « Il a créé les cieux sans support que vous puissiez voir. » (Sourate 31, 10).

Comme pour les anciens Hébreux et leurs descendants juifs, l’espoir le plus cher des Sumériens était, semble-t-il, d’atteindre un âge avancé. Un texte sumérien témoigne de la résignation face à la mort et du désespoir qu’elle suscitait :

« Seuls les dieux vivent à jamais sous le soleil. Quant à l’homme, ses jours sont comptés ; Quoi qu’il fasse, ce n’est que du vent ! » [10]

La mort était pour les Sumériens une perspective effrayante. Le séjour des morts, le « Pays sans retour », le « Grand En-bas », l’arallu, était un immense espace souterrain qu’on situait vers l’Occident et qui contenait une vaste cité entourée de sept murailles. Un monde – les limbes – où le mort devait vivre éternellement une vie morne et misérable. Un monde de silence et d’ombre :

« Où la poussière nourrit leur faim et leur pain est l’argile.
Où ils ne voient pas la lumière, ils restent dans les ténèbres, Ils sont vêtus, tels les oiseaux, d’un vêtement de plumes. Sur la porte et le verrou s’étale la poussière… »

Seuls, peut-être, les rois, entourés de nombreux trésors, pouvaient acheter aux dieux des Enfers une vie d’outre-tombe un peu moins lugubre [11].

On retrouve ce séjour des morts sumérien dans la Bible hébraïque, comme dans le passage du Livre d’Énoch cité au-dessus, sous le nom de « schéol ». C’est le même monde sinistre, dans les profondeurs de la terre, que décrivent les textes sumériens. Ce monde des morts est mentionné dans plusieurs passages bibliques :

« Au bruit de sa chute, j’ai fait tressaillir les peuples, quand je l’ai fait descendre dans le schéol avec ceux qui descendent dans la fosse, et ils se sont consolés dans les régions souterraines, tous les arbres de l’Éden, les plus beaux, les meilleurs du Liban, tous les buveurs d’eau.
Eux aussi sont descendus avec lui dans le schéol auprès des victimes de l’épée… » (Ézéchiel 31, 16-17)

« C’est pour cela que le schéol élargira son sein et ouvrira une bouche sans mesure, que s’y engouffreront tout cet éclat, cette richesse et cette foule bruyante et joyeuse. » (Ésaïe 5, 14)

« Déjà m’enveloppaient les liens du schéol, surpris dans les filets de la mort… » (Psaumes 18, 5)

« Car grande est ta bonté pour moi : tu as sauvé mon âme du schéol. » (Psaumes 86, 13)

Toutefois, il demeure une différence majeure entre la religion mésopotamienne et la Bible hébraïque ; dans cette dernière, les morts doivent être ressuscités et vivre à nouveau sur terre :

« Il me dit : "Fils de l’homme, ces ossements peuvent-ils revivre ?"
Je répondis : "Seigneur Dieu, tu le sais."
Et il me dit : "Prophétise sur ces ossements et dis-leur : Ossements desséchés, écoutez la parole de Yahvé !"

Ainsi parle le Seigneur Dieu à ces ossements : Voici que je vais faire passer en vous un souffle, et vous revivrez. Je mettrai sur vous des nerfs, je ferai croître autour de vous de la chair, je vous envelopperai d’une peau ; puis je mettrai en vous l’esprit, et vous vivrez ; et vous reconnaîtrez que je suis Yahvé. » (Ézéchiel 37, 3-6)

« Puissent donc tes morts revenir à la vie et les cadavres des miens ressusciter ! Réveillez-vous et entonnez des cantiques, vous qui dormez dans la poussière ! Oui, pareille à la rosée du matin est ta rosée : grâce à elle, la terre laisse échapper ses ombres. » (Ésaïe 26, 19)

« Beaucoup de ceux qui dorment dans la poussière du sol se réveilleront, les uns pour une vie éternelle, les autres pour être un objet d’ignominie et d’horreur éternelle. » (Daniel 12, 2)

Aux origines du Grand Israël

Selon l’eschatologie juive, aux temps messianiques, les promesses de domination universelle s’accompliront et les morts issus du peuple élu ressusciteront pour vivre en Israël et régner sur le reste du monde, ainsi qu’il est annoncé dans ce passage du livre d’Ésaïe :

« Lève-toi, resplendis, car ta lumière est venue, et la gloire de Yahvé rayonne sur toi (Israël). Oui, tandis que les ténèbres couvrent la terre et une sombre brume les nations, sur toi Yahvé rayonne, sur toi sa gloire apparaît. Et les peuples marcheront à ta lumière, les rois à l’éclat de ton aurore. Lève tes yeux à l’entour et regarde ! Les voilà qui s’assemblent tous et viennent à toi : tes fils arrivent de loin, avec tes filles qu’on porte sur les bras.
À cette vue, tu seras radieuse, ton cœur battra d’émotion et se dilatera, car les richesses de l’océan se dirigeront vers toi, et l’opulence des peuples te sera ramenée…
Et les fils de l’étranger bâtiront tes murailles, et leurs rois te serviront… Car le peuple, la dynastie qui refusera de te servir, périra ; ce peuple-là sera voué à la ruine…
Et tu suceras le lait des peuples et tu boiras à la mamelle des souverains. » (Ésaïe 60, 1-17)

« Des gens du dehors seront là pour paître vos troupeaux ; des fils d’étrangers seront vos laboureurs et vos vignerons. Et vous, vous serez appelés prêtres de Yahvé, on vous nommera ministres de notre Dieu. Vous jouirez de la richesse des nations et vous tirerez gloire de leur splendeur. » (Ésaïe 61, 5-6)

Le royaume d’Israël, centre géographique de cet empire global, a des dimensions et des frontières définies assez précisément dans la Bible hébraïque :

« Ce jour-là, le Seigneur conclut une alliance avec Abram en ces termes : "À ta descendance je donne le pays que voici, depuis le Torrent d’Égypte [12] jusqu’au Grand Fleuve, l’Euphrate, soit le pays des Qénites, des Qenizzites, des Qadmonites, des Hittites, des Perizzites, des Refaïtes, des Amorites, des Cananéens, des Guirgashites et des Jébuséens." » (Genèse 15, 18)

En somme, le Grand Israël, que les dirigeants sionistes tentent de bâtir depuis près d’un siècle, doit s’étendre du Nil à l’Euphrate. La question à laquelle nous allons tenter de répondre maintenant est : quelles sont les origines du projet et des frontières du Grand Israël ?

Contrairement à ce que nous dit la tradition juive, le royaume de Salomon n’a jamais atteint de telles proportions, et les fils d’Israël n’ont jamais été à la tête d’un quelconque empire. À l’évidence, les rédacteurs bibliques ont calqué sur leur empire fantasmé les frontières d’un des empires réels qui les a dominés.

Deux empires, connus par Juda et Israël, ont contrôlé la zone s’étalant du Nil à l’Euphrate :

- L’empire Assyrien, au milieu du VIIe siècle sous le règne d’Assurbanipal (668-627 av. J.-C.).

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Le cœur historique de l’Assyrie (en rouge), 
et l’empire assyrien lors de son extension maximale au milieu du VIIe siècle av. J.-C. (en orange)

 

- L’empire perse sous Cambyse et Darius (522-486 av. J.-C.).

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L’empire perse

 

L’empire babylonien, quant à lui, n’atteignait pas le Nil, même si sa frontière ouest n’en était pas éloignée (Gaza) [13].

Les datations des textes par les études bibliques et l’archéologie nous conduisent à conclure que c’est l’Empire assyrien qui servit de modèle à la fabrication biblique du Grand Israël. En effet, si l’on se fonde sur les travaux de Richard E. Friedman, le passage de la Genèse (15, 18) cité au-dessus, promettant à la descendance d’Abram (nommé ensuite Abraham) le territoire se situant entre le Torrent (le Nil) d’Égypte et l’Euphrate, serait du rédacteur J [14], c’est- à-dire un des rédacteurs les plus anciens, ayant vécu durant la période assyrienne.

De son côté, Thomas Römer, s’appuyant notamment sur les travaux archéologiques de Finkelstein et de Silberman, conclut que :

« Maintenant il est très clair que l’idée d’un "Empire salomonien" est une pure fiction et que les chapitres 3 à 11 du premier livre des Rois projettent des réalités de l’Empire néo-assyrien sur "Israël" pour le doter d’un passé glorieux…
Bien que le débat sur la "chronologie basse" ne soit pas encore définitivement tranché, on ne peut nier le fait que le récit biblique reflète davantage le contexte de l’époque assyrienne que celui du Xe siècle. Au Xe siècle, la taille de Jérusalem n’est pas celle d’une capitale d’empire… » [15]

Dans le judaïsme les projections sur le passé sont également des espérances et un projet messianique que les élites juives travaillent à accomplir depuis des siècles [16].

Si le Grand Israël ne recouvre aucune réalité passée, il est aujourd’hui un projet bien réel en cours de réalisation par les messianistes sionistes… et au-delà, puisqu’il vise effrontément la gouvernance mondiale. Ainsi, Jacques Attali, banquier et conseiller des présidents de la République française depuis le début des années 1980, déclare en 2010 que Jérusalem a pour vocation de devenir :

« La capitale de la planète qui sera un jour unifiée autour d’un gouvernement mondial. » [17]

Cette phrase résume le double projet messianique biblique : l’établissement du Grand Israël, empire territorial au centre de l’imperium universel des fils d’Israël (tel que prophétisé dans le Deutéronome et le livre d’Ésaïe).

Le projet biblique de domination mondiale, les outils pour y accéder (l’argent et l’usure), l’idée impériale et les frontières du Grand Israël ; tout cela a été emprunté à des cultures, des civilisations et des empires étrangers pour en faire un projet eschatologique d’une dangerosité extrême.

Youssef Hindi

Notes

[1] https://www.humanite.fr/monde/guerr...https://www.humanite.fr/monde/colon...
https://www.courrierinternational.c...

[2] Dominique de Villepin, « Vers le Grand Israël… », TV5 Monde Info, 28 septembre 2024. https://www.youtube.com/watch?v=WEN...

[3] Tous les éléments historiques que je vais apporter ici son tiré de cet ouvrage : Youssef Hindi, Occident et Islam Tome 2 : Le paradoxe théologique du judaïsme. Comment Yahvé usurpa la place de Dieu, Sigest, 2018.

[4] Cité par Bernard Lazare, L’antisémitisme, son histoire et ses causes, 1894, rééd. Kontre kulture, 2012, p. 27. https://kontrekulture.com/produit/l...

[5] B. Lazare, op. cit. p. 174.

[6] La métaphysique apparaît tardivement et progressivement dans le judaïsme, avec la kabbale. Cf. Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome I, Sigest, 2015, chapitre I.

[7] B. Lazare, op. cit. p. 174.

[8] Jean Bottéro, La naissance de Dieu, la Bible et l’historien, Gallimard, 2017, pp. 47-48.

[9] Cf. J. Bottéro, op. cit. p. 62.

[10] Gilgamesh, version babylonienne ancienne, III, IV, 6-8 : ANET3, p. 79 ; R. Labat, Religions, p. 164. Dans Georges Roux, La Mésopotamie, Seuil, 1985, 1995, p. 125.

[11] S. N. Kramer, « The death of Ur-Nammu and his descent to the Nether-world », JCS, 21, 1967, pp. 104-122. Dans G. Roux, op. cit. p. 126.

[12] Que les sionistes, religieux ou non, identifient au Nil.

[13] En -601, Nabuchodonosor ne réussit pas sa campagne d’Égypte, toutefois, selon le deuxième livre des Rois, « le roi d’Égypte ne sortit plus de son pays, car le roi de Babylone avait pris tout ce qui avait appartenu au roi d’Égypte, depuis le torrent d’Égypte jusqu’au fleuve Euphrate » (2 R 24, 7).

[14] R. E. Friedman, Qui a écrit la Bible ?, 1987, Exergue, 2012, p. 272.

[15] Thomas Römer, L’Invention de Dieu, Seuil, 2014, p. 128.

[16] Cf. Youssef Hindi, Occident et Islam Tome 1 : Sources et genèse messianiques du sionisme, Sigest, 2015 ;
Pierre-Antoine Plaquevent et Youssef Hindi, Israël et la guerre mondiale des religions, Culture & Racines/Stragegika, 2024.

[17] Jacques Attali, Public Sénat, 14/09/2010.

Comprendre le conflit israélo-palestinien
disponible chez Kontre Kulture

 

Retrouvez Youssef Hindi en conférence à Toulouse
le samedi 30 novembre 2024

 

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  • #3458059

    Un peu en marge du sujet. Bernard Lazare est cité au début du texte. On entend souvent dire que l´antisémitisme n´est pas une opinion, c´est un délit. L´ antisémitisme est donc un délit au regard du code pénal (si toutefois cet antisémitisme est exprimé publiquement).

    Voilà ce que dit Bernard Lazare dans la préface de son livre "L´antisémitisme, son histoire...." :

    "Il m’a semblé qu’une OPINION aussi universelle que l’antisémitisme, ayant fleuri dans tous les lieus et dans tous les temps, avant l’ère chrétienne et après, à Alexandrie, à Rome et à Antioche, en Arabie et en Perse, dans l’Europe du moyen âge et dans l’Europe moderne, en un mot,dans toutes les parties du monde où il y a eu et où il y a des juifs, il m’a semblé qu’une telle OPINION ne pouvait être le résultat d’une fantaisie et d’un caprice perpétuel, et qu’il devait y avoir à son éclosion et à sa permanence des raisons profondes et sérieuses."

    Les majuscules sont à moi.

     

    Répondre à ce message

  • Est-ce que les états arabes voisins ont conscience de ces plans americano-usraeliens ?

     

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    • Les états arabes voisins en savent autant sinon plus que nous tous réunis.
      Kadafi le disait" Aujourd’hui c’est l’Irak, demain, chacun d’entre nous"
      Les présidents et familles régnantes n’y peuvent rien. La puissance de feu appartient à l’occident, et elle est mise à disposition des sionistes.
      Les sionistes ont donc la puissance de feu et le soutien sans faille de l’occident (les gouvernants).
      Le mieux que les pays arabes puissent faire, est de soutenir la resistance, sans tambour ni trompette.

       
  • Bravo à vous Monsieur Hindi, pour votre travail.

    Je comprends qu’il est difficile de s’exprimer sur le Maroc comme citoyen Marocain mais comme je m’inquiète sincèrement pour ce pays dont j’aime beaucoup les citoyens, il serait temps de s’y intéresser.
    La sionisation du Maroc au dépend des Marocains est très inquiétante, c’est maintenant qu’il faut en parler pas quand il sera trop tard comme pour la Palestine.

    Le Maroc est appelé l’Odessa d el’Afrique, réveillez vous maintenant, Hachachi aussi,

     

    Répondre à ce message

    • Karim
      Tu t’inquiètes pour le Maroc, ton intention touchera beaucoup de marocains, c’est un pays dominés par les ricains, donc par les sionistes.
      Et si on parlait du peuple algérien, 70 % de ses hydrocarbures appartiennent à une société israélienne, autant dire que l’unique et principal socle de l’économie algérienne est sionisée. Les généraux auto proclamés n’ont parlent jamais, c’est un sujet tabou.
      Et toi, tu vas continuer à jouer du violon quand on interpelle sur l’Algérie ?

       
    • Karim
      C’est trop risible, tu donnes des leçons à M. Hachichi à qui tu n’arriverais même pas à la semelle de ses babouches. Au fait, tu es algérien, comment se fait t’il que tu n’interpelles pas celui qui pollue YouTube avec sa propagande pour les généraux auto proclamés d’Alger, je veux parler de Salim Laibi, lui est bien, Hindi et Hachichi pas bien car marocains...c’est ça, pourtant ils sont toujours pertinents dans leurs analyses, ils apportent quelque chose à notre besoin de savoir de comment tourne cette planète...
      Essaye de trouver une vidéo de M. Soral et de M.Hachichi en conversation tous les deux, ça date.. A cette époque tu devais être encore accro au mainstreaim.

       
    • #3458549
      Le 27 novembre à 21:44 par сельачка буна
      Comprendre le Grand Israël – Eschatologie matérialiste et domination (...)

      Merci pour l’information Surnom. Je suis aller jeter un coup d’œil et, sauf erreur de ma part, tes dires sont partiellement exacts. Ce n’est que le gisement d’Adrar à hauteur de 65% par le groupe américain Carlyle dirigé par l’americano-Israélien M. Rubenstein, accessoirement ami du génocidaire Bibi. Mais au final, ça fait quand même beaucoup pour un pays qui se dit officiellement hostile.

       
    • сельачка буна
      le gisement d’Adrar représente une part très importante dans la production d’Hydrocarbures en Algérie. Hélas, le peuple n’en voit pas les retombées, contrairement aux pays du golf ou les peuples bon gré malgré, une certaine distribution existe pour les citoyens.
      Je vais régulièrement en Algérie, j’y ai des attaches très fortes, famille, maison, amis etc...Honnêtement quand je vois la richesse de ce pays et le niveau de vie des gens, les infrastructures, la corruption je ne peux pas m’empêcher de maudire les généraux auto proclamés d’Alger, les rois de la fauche et du blanchiment de cache..
      Je le sais parfaitement, je suis français, en tant que tel je n’ai aucun droit de porter une critique envers un état souverain, qu’ils se débrouillent avec leurs problèmes, comme je vous l’ai dit, j’ai des attaches dans ce pays dont j’adore les gens.

       
  • Comme toujours Youssef Hindi nous comble par son érudition. Nonobstant le fait que dans cet article, il ne précise pas qui est Yahvé ! Un YHW caché avec soin depuis 1945.

    C’est Lucifer* ! Cela éclaire un peu plus et pour être plus complet sur la volonté de conquête de la planète par les juifs s’appuyant aussi sur le Talmud qui les autorise à mentir et à massacrer les goyim comme à Gaza. Oded Yinon n’est qu’une étape du sionisme !

    La destruction de la France s’accélère avec les 3 derniers présidents de la république, tous juifs. Hasard, coïncidence ?

    *La plupart des juifs n’aiment pas l’admettre mais notre dieu est Lucifer et nous sommes son peuple élu. Harold Wallace Rosenthal

     

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  • La mort était pour les Sumériens une perspective effrayante. Le séjour des morts, le « Pays sans retour », le « Grand En-bas », l’arallu, était un immense espace souterrain qu’on situait vers l’Occident et qui contenait une vaste cité entourée de sept murailles. Un monde – les limbes – où le mort devait vivre éternellement une vie morne et misérable. Un monde de silence et d’ombre :




    ce n’est pas exact, cette conception vient de textes tardifs akkadiens (l’époque des premiers nomades sémites, il est plus intéressant de lire des textes reéllement sumériens et là c’est différent : la vie après la mort est une vie pleine et entière, parfait miroir de la vie terrestre avec une évolution et des cycles généalogiques (mais, c’est exact : par de réincarnation dans le monde d’ici comme l’inventeront plus tard les sémites proto hébreux).
    d’ailleurs que serait une religion qui ne laisserait aucun espoir après la mort ? c’est illogique.
    pour étayer mes dires
    https://www.persee.fr/doc/syria_003...

     

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  • Youssef Hindi est un auteur brillant, mais son écriture n’est pas totalement neutre. Dans l’article ci-dessus, il affranchit le Coran de la conception cosmologique mésopotamienne qui imprègne l’Ancien testament mais à laquelle le Coran serait imperméable, lui qui y a pratiquement emprunté de très longs passages y compris des fragments non négligeable de la Genèse (Je suis arabe et je sais de quoi je parle). Une multitude d’occurrences coraniques renvoient spécialement à des cosmologies hétérodoxes et on en a comme preuve le passage suivant tiré de de la sourate 65 verset 12 : "Allah a crée sept couches de cieux et autant de terres". Par Ailleurs, pour conformer cette architecture à la notion ptoléméenne, le Coran nous explique que pour maintenir en équilibre ces parties, Allah prit soin d’élever des colonnes. Hindi a toujours défendu la théorie, fausse, de la conformité du narratif coranique aux thèses scientifiques les plus performantes. Et il est curieux qu’un historien aussi doué que Hindi, exclut le texte coranique de l’examen historique pour lui donner le statut non scientifique de l’intemporalité.

     

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    • Naim
      27 novembre 16:46, par Naim

      « youssef Hindi est un auteur brillant, mais son écriture n’est pas totalement neutre. »

      S’il n’est pas neutre, c’est envers qui ou quoi il serait parti prenant ?
      Quelle idéologie ou politique il défendrait ?
      A part qu’il met les sionistes dans leur caca, je ne vois pas vraiment ou tu veux en venir...
      Pour ma part, il est un des meilleurs avec d’autres dans ce domaine, ils ne sont pas nombreux. Son âge est un atout pour toucher les jeunes générations et les instruire comme jamais. Cette histoire juive que ma génération ne pouvait ni savoir, comprendre ou même se douter de l’existence de tout ce merdier. On devait savoir qu’il y a eu un génocide, ça ne s’appelait pas encore la shoah, point barre.
      Si tu peux mieux, ça sera un plaisir de te lire ou de t’écouter.
      Je remercie M. HINDI de tout ce qu’il apporte à notre connaissance.

       
    • Absolument.
      Cette tentative d’adapter le Coran aux thèses et hypothèses scientifiques, alors que celles-ci pourraient bien être fausses, n’est pas vraiment la ligne à adopter.
      Les Musulmans croient que le Coran est parole de Dieu Lui-même, donc du Créateur des cieux et de la terre, du visible et de l’invisible. Donc de Celui qui connaît mieux que quiconque comment est et fonctionne Sa création.
      Si Dieu dit qu’il a créé les cieux sans pillier que l’on puisse voir, cela ne nie pas forcément l’existence de ces pilliers (il existe deux intérprétations à ceci, celle d’Ibn Abbas et celle d’Iyas).
      Par ailleurs, la mention de sept cieux au-dessus de nous, construction solide de Dieu, est inexistante dans cette science d’aujourd’hui, qui considère l’espace comme un vide.
      Beaucoup de ce que rapporte le Coran est en contradiction avec cette science qui se veut, bien souvent, pur fruit d’une imagination débridée.

       
    • Anonyme
      La science considère aussi le virus comme naturel...
      D’un point de vue scientifique et historique, Ils sont allés plusieurs fois sur la lune....
      Kennedy a été assassiné par un communiste simplet...
      Et pourtant, tout ça n’est pas prévu par le Coran, étonnant !

       
  • #3458816

    Brillant article de Youssef Hindi. Merci pour son travail. Il permet de donner un aperçu de la réalité.

     

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  • #3460920

    Bravo continuez

     

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  • Il peut y avoir un Empire sacré. Le Khalifat islamique en est un. Le Saint Empire chrétien en est un. Pour un monarchiste français, nul doute que les Rois de France sont les héritiers du Roi David. Et Jésus était lui-même Fils de David.

    La Terre Sainte - pour lequel se bat aussi l’Islam - est l’image visible de la « Jérusalem Céleste » invisible. Les deux ne sont pas forcément contradictoires. Dante représente aussi le Jardin d’Eden comme un lieu terrestre, quoique caché.

    Enfin, le Coran revendique bien la lignée prophétique juive (Moïse, David, Salomon). Pourquoi donc renier aux Juifs d’avoir été un grand royaume ? Le problème, c’est que le Messie est venu - prophétie d’Isaïe - et que le Temple a été détruit.

    Alors Israël est devenu autre chose, dans une tribulation qui ne semble pas cesser. Il y a toujours des juifs orthodoxes fidèles à la Loi, même aujourd’hui. Mais il y a aussi, surtout depuis le « faux Messie » Sabbataï Zevi (1666), une déviation clairement antechristique.

    René Guénon avait fait remarquer que les agents les plus corrupteurs de la modernité n’étaient pas des juifs pieux, mais des juifs laïcs - ceci expliquant peut être cela. Israël a été fondé par des juifs laïcs d’origine européenne. C’est un nationalisme moderne qui n’a d’Israel que le nom ; le Talmud interdit d’ailleurs le retour des juifs en terre sainte avant l’avènement du Messie (Trois Serments).

    Et c’est en cela, peut être, l’abomination dans le lieu saint - on verra bien s’ils vont jusqu’à commettre l’erreur de construire le Troisième Temple !

     

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