En donnant les clés de la région aux nationalistes, les Corses exigent une voie différente. Le mouvement est prêt à engager un bras de fer avec Paris.
Avec près de 36 % des suffrages exprimés et plus de 10 000 voix d’avance sur l’ancien patron de la région, Paul Giacobbi, la liste conduite par le leader autonomiste Gilles Simeoni a écrasé la concurrence dans cette quadrangulaire du second tour. Il a ainsi imposé le nationalisme comme première force politique de l’île. À travers ce score historique – « après 40 ans de lutte », disent-ils –, les nationalistes ont remporté pour la première fois une élection territoriale et seront donc aux commandes de la région pour deux ans, avant la mise en place de la collectivité unique qui prévoit la suppression des deux conseils départementaux en 2018.
Pour l’ensemble de l’île, le bond spectaculaire enregistré est de près de 20 000 voix entre les deux tours, à Bastia, détenue par Gilles Simeoni depuis les municipales de mars 2014 (il devrait quitter son fauteuil de maire pour prendre la présidence du conseil exécutif de Corse), mais aussi dans les communes rurales de l’intérieur acquises de longue date aux forces politiques traditionnelles – « le clan » pour reprendre l’expression employée par les nationalistes.
La mise en examen de Paul Giacobbi pour « détournement de fonds publics » dans l’affaire dite des « gîtes ruraux » concernant 380 000 euros de subventions du Conseil général de la Haute-Corse, qu’il a présidé jusqu’en 2010, a sans doute beaucoup joué sur l’issue de la campagne. L’ancien patron de l’exécutif a dû aussi faire face au morcellement d’une gauche qu’il avait réunie sous sa coupe il y a cinq ans pour prendre les rênes de la région.