« “Cette ville [Paris], c’est la cour de récréation du Mossad”, se plaint un ancien du service “H” de la DGSI, chargé de surveiller ses agissements en France »
Dans une série de l’été sur les espions, Le Monde nous gratifie d’un article sur le Mossad. Va-t-on apprendre que les services français sont infectés ? Que le service secret israélien a participé de près ou de loin à des attentats sur notre sol ? Heureusement non. Il s’agit de revenir sur l’opération d’élimination du responsable de l’achat d’armes pour le Hamas, un assassinat qui a eu lieu en 2010 dans un hôtel de Dubaï et qui a été dévoilé aux yeux du monde par le moyen des caméras de sécurité. La capitale française, où était implantée une cellule active du Mossad, a joué un rôle central dans la partie opérationnelle.
Dans cet article, Paris est taxée de « ville ouverte aux espions ». On peut en dire autant de la hiérarchie du renseignement français, qui n’ignorait pas les préparatifs de leurs « cousins » israéliens... L’article du Monde étant payant, nous avons pris soin d’en détacher quelques morceaux, histoire de ne pas subir les foudres du journal de la Banque et des Marchés, qui n’a jamais caché son tropisme sioniste. Mais là, il frôle la révélation critique !
« Il est bientôt 17 h 30, ce 19 janvier 2010, et la nuit est déjà là. Mais les personnes présentes dans cette chambre transformée en “QG” opérationnel, avec écrans d’ordinateur et téléphones cryptés, ne sont pas d’humeur à contempler la ville : leur attention est tout entière concentrée sur un autre hôtel, à 7 000 kilomètres de là, l’Al Bustan Rotana de Dubaï, où se joue un scénario digne d’un film d’espionnage.
Là-bas, dans la chambre 237, leurs collègues du Mossad, le service secret israélien, se tiennent prêts à passer à l’action. Deux équipes de deux tueurs sont mobilisées, soutenues par trois autres agents, dont une femme, chargés de la sécurisation des lieux et de la logistique. Dans la chambre 230, située juste en face, leur cible vient de rentrer de son shopping. Enregistré à son arrivée à Dubaï sous le nom de Mahmoud Abdul Raouf, il s’agit en réalité de Mahmoud Al-Mabhouh, responsable de l’achat des armes pour le Hamas, mouvement islamiste palestinien. Les tueurs attendent le feu vert pour franchir le couloir, pénétrer dans sa chambre et lui injecter un produit mortel. »
Le monde entier connaît la suite, qui a été révélée par toutes les télés. Un foirage médiatique malgré l’élimination de la cible ou une opération « découverte » à dessein, afin de montrer que le Mossad pouvait frapper qui il voulait, où il voulait ? Il y a débat. Mais l’affaire ne s’arrête pas là, et le journal va plus loin :
« Aucun agent israélien n’est arrêté – ils ont tous eu le temps de quitter Dubaï –, mais les enquêteurs établissent qu’ils ont appelé à plusieurs reprises un même standard en Autriche. En réalité, selon une information inédite révélée ici par Le Monde, l’essentiel des appels avait pour destination finale Paris, et la fameuse chambre d’hôtel du quartier du pont de Bercy. C’est de ce centre opérationnel qu’a été coordonnée l’exécution. D’après le contre-espionnage français, des agents identifiés à Dubaï étaient venus dans la capitale préparer l’opération. »
Question : les services français étaient-ils au courant ? Si non, ils sont incompétents ; si oui, ils sont complices. Dans ce cas, quelles en sont les conséquences politiques ?
« En découvrant le dispositif mis en place à leur insu par le Mossad, les autorités françaises mesurent les risques encourus : aux yeux du Hamas et d’autres groupes radicaux, elles peuvent apparaître comme complices de l’État hébreu. Pour ne rien arranger, il apparaît que le Mossad a subtilisé des identités de citoyens français afin de fabriquer quatre passeports pour ses agents. La justice française se saisit de cette fraude aux documents d’identité, comme d’ailleurs ses homologues britannique, autrichienne et irlandaise, concernées par vingt-deux autres passeports falsifiés, mais sans grand espoir de remonter aux auteurs. “Au moins, c’était un moyen de faire passer un message, se souvient un chef de la police judiciaire parisienne de l’époque. En judiciarisant l’affaire, nous disions qu’il s’agissait d’une atteinte inacceptable à notre souveraineté”. »
Maintenant, on veut nous faire croire que la France a utilisé sa passivité pour un intérêt bien compris. Pourquoi pas ? Le monde du renseignement fourmille de ce genre de marché...
« Contrairement aux autres pays, la France ne fait aucun commentaire public condamnant la manœuvre des autorités israéliennes. Paris préfère dépêcher sur place deux cadres du renseignement, des hommes solides et peu causants : Patrick Calvar, alors directeur du renseignement à la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), et Frédéric Veaux, numéro deux de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, devenue depuis la DGSI). À charge pour eux de se plaindre au patron du Mossad, Meir Dagan, en lui disant en substance, selon une personne familière du dossier : “Même si nous savons tout, nous ne ferons pas comme les Irlandais ou les Britanniques. Nous resterons amis, mais ce ne sera pas gratuit.” Il est impossible de savoir ce que le Mossad a offert, ce jour-là, en échange du silence de la France, mais la seule monnaie qui compte, dans le monde de l’espionnage, est celle du “renseignement”, autrement dit des informations. »
Bien, on en a assez, mais surtout, diffuser d’autres paragraphes pourrait nous valoir les foudres de la Pravda franco-sioniste.
La collusion interservices est évidente, mais elle peut être mise sur le dos de deux alliés « occidentaux » en lutte contre le « terrorisme ». On a mis des guillemets parce que les deux termes sont sujets à caution, ou à discussion.
En ce qui concerne une éventuelle alliance occidentale, les intérêts d’Israël ne sont pas forcément ceux de la France, même si une partie de notre intelligentsia politico-médiatique le clame, et ce depuis janvier 2015, date à laquelle notre pays a subi une vague d’attentats sans précédent (hormis la période de la guerre d’Algérie). Des esprits retors vont jusqu’à imaginer que cette séquence meurtrière a provoqué un rapprochement des deux pays du point de vue politique, voire que cette séquence meurtrière a été provoquée pour rapprocher les deux pays. Avec notre élite qui a depuis longtemps fait les preuves de sa corruption, rien n’est impossible. Mais n’allons pas si loin.
En ce qui concerne le terrorisme, on sait tous que la résistance à la colonisation violente de la Palestine par Israël est taxée par la partie israélienne de « terrorisme ». Il faut donc bien faire attention : toutes les manipulations, toutes les ingénieries sont possibles.
Dans la suite de l’article, l’auteur évoque la collaboration entre Mossad et DGSE pour piéger le responsable syrien du programme secret portant sur les armes chimiques d’Assad... Opération conjointe au cours de laquelle la DCRI a soupçonné le service israélien de doubler le service français afin de « tenter une manœuvre d’infiltration en nouant des liens jugés suspects avec des agents français ». La source du Monde rappelle que « les Chinois et les Russes sont nos ennemis », ce qui n’était pas forcément officiel jusque-là. Cependant, « il ne faut pas oublier que les Israéliens et les Américains demeurent offensifs ». Visiblement, ces derniers en profiteraient de manière exagérée... Mieux, la source déclare, à propos des plaintes de la DGSE – à l’encontre des sales coups du Mossad – qui remontent en haut lieu, et là on ne peut pas faire autrement que de la citer in extenso :
« Notre capacité de réaction est limitée, car ils jouent vite la carte politique en se plaignant à l’Élysée ou à Matignon. De plus, on dépend d’eux sur des sujets sensibles. Enfin, notre marge est restreinte pour empêcher certains membres de la communauté juive de leur apporter une aide logistique. »
On vous laisse en tirer une conclusion logique sur l’indépendance de l’Élysée et Matignon vis-à-vis des intérêts israéliens...
L’article se termine sur une espèce de paix fragile entre les services, les Israéliens ayant promis de ne plus effectuer d’opération létale à Paris. En réalité, le Mossad déléguerait le sale boulot à des officines privées qui elles, ont pignon sur rue dans la capitale française. Et qui embauchent d’« anciens » agents israéliens... On hésite entre l’ironie et l’écœurement.
Il ressort de cet article édifiant que les services français, qu’ils soient d’espionnage ou de contre-espionnage, sont limités dans leur action et donc dans la défense de notre pays par le politique qui lui, semble fermement lié aux intérêts d’Israël. Ce n’est pas nous qui le disons, c’est bien l’article. La collusion d’en haut paralyse les contre-mesures d’en bas.
Dès lors, tout est possible. C’est-à-dire que tous les coups sont possibles.