"Travailler plus pour gagner plus, dans le BTP, c’est du foutage de gueule ! On travaille plus et on gagne moins !
” Le syndicaliste Olivier Patinier, qui m’avait calmement raconté comment la crise touchait tardivement son secteur, s’est emporté en évoquant un article “dont personne n’a parlé” de la loi TEPA du 20 août 2008, qui supprime l’obligation de repos compensateur des heures sup accomplies à l’intérieur du contingent annuel, dans toutes les entreprises de plus de 20 salariés, “alors qu’avant, on avait droit à 30 minutes de repos pour chaque heure travaillée au-delà de 41 heures hebdomadaires”. Avec la disparition de ce frein, “les heures supp ont explosé”, m’a expliqué le secrétaire général de la CGT-Construction à Rouen. Ce qui a freiné l’embauche, sans que le pouvoir d’achat des salariés en place n’augmente.
Il m’a décrit un secteur de la construction dont les ouvriers, dispersés sur différents chantiers, sont peu syndiqués, et où les principaux employeurs ont négocié avec des syndicats “maison” des accords de modulation qui leurs sont favorables : les 36e et 37e heures de travail hebdomadaires sont payées 25 % de plus et défiscalisées, mais les heures supp suivantes sont placées sur un compte de modulation, pour n’être payées qu’en fin d’année. “Mais c’est très rarement le cas, parce que le salarié doit puiser dans ce compte d’heures quand il est en arrêt maladie, et quand l’employeur lui demande de ne pas venir, ce qui arrive de plus en plus avec la baisse d’activité actuelle”, selon Olivier Patinier. Il connaît donc de nombreux salariés dont le compte de modulation est négatif : “leurs heures supp du premier semestre ne leur seront donc pas payées, et ils devront des heures à leur entreprise !”