À quelques jours du référendum d’indépendance en Écosse, les sondages donnent le non et le oui dans un mouchoir de poche, introduisant un suspense nouveau. Rien ne semble joué : à une enquête YouGov donnant pour la première fois le oui gagnant dimanche a répondu mercredi un nouveau sondage de Survation plaçant le non en tête, de six points.
Seule chose certaine, l’écart entre les deux camps, très important depuis le début de l’année, s’est nettement rétréci en l’espace de trois semaines tandis que les indécis sont de moins en moins nombreux. Pour les éditorialistes, ce retournement date du dernier débat télévisé opposant le chef des indépendantistes et Premier ministre écossais Alex Salmond au leader de la campagne unioniste Alistair Darling, ancien ministre britannique des Finances, le 25 août.
M. Salmond s’y est montré bien plus pugnace que M. Darling, englué dans des arguments jugés plus sombres qu’enthousiasmants, comme la menace de priver une Écosse indépendante de l’usage de la livre sterling. Autre facteur probable, l’insistance des tenants du oui sur la défense des services publics et du NHS, le système de sécurité sociale britannique, en particulier, "a tendu à convaincre les électeurs de gauche", estime Mark Diffley, directeur de l’institut Ipsos Mori. "La question clé est maintenant de savoir si cette tendance va se poursuivre (...) ou si l’on va reprendre la direction inverse", déclare-t-il à l’AFP, alors que certains s’attendent à un phénomène à la québécoise où le oui était en tête avant de perdre sur le fil, lors du référendum sur l’indépendance en 1995.
Premier enseignement des sondages récents, le oui à l’indépendance est devenu majoritaire chez les plus jeunes, en particulier les 16-24 ans, tandis que les plus de 60 ans plébiscitent le maintien dans l’union. Mais autant le vote des plus âgés semble stable, autant celui des jeunes est versatile. "C’est le groupe qui change le plus d’opinion", constate M. Diffley.
Très forte participation attendue
Les sondages montrent également que les femmes restent moins tentées que les hommes par l’indépendance mais que l’écart se resserre. "Au cours des semaines récentes, la majorité du mouvement vers le oui a été le fait des femmes", souligne M. Diffley, incapable toutefois d’en tirer une conclusion évidente si ce n’est une certaine propension à peser plus longuement les risques. Par ailleurs, le camp des indécis a fondu : de plus de 20% il est passé autour de 10% ces derniers jours. C’est sur ces indécis et les jeunes que les deux camps ont déjà commencé à concentrer leurs efforts sur le terrain.
Le Parti national écossais (SNP) de M. Salmond devrait aussi poursuivre l’offensive en direction des électeurs travaillistes, appelés à voter non par leur leader Ed Miliband. Les conservateurs et libéraux-démocrates sont majoritairement acquis aux unionistes. À l’approche du jour J, les enquêtes d’opinion devraient se succéder à un rythme plus serré. Et braquer les regards sur des instituts de sondage qui avaient échoué à prédire le raz-de-marée électoral du SNP au Parlement écossais en 2011 -il avait raflé 69 des 129 sièges, soit la majorité absolue.
Comme ses confrères, M. Diffley met en garde : un sondage recèle toujours une marge d’erreur et "n’est pas une prévision de ce qui va se passer mais la mesure de l’opinion publique à un instant". En revanche, le risque d’erreur semble faible sur le niveau de participation attendu. Avec 80% des personnes déclarant qu’elles iront voter, il devrait être "extraordinaire" même si certaines d’entre elles changent d’avis au dernier moment.