Mon avant dernière tribune intitulée : "polémiques vestimentaires" (NDLR : publiée notamment sur le site E&R : http://www.egaliteetreconciliation....) a entraîné une avalanche de mails ainsi que de commentaires sur ma page Facebook. Visiblement le sujet est pris très au sérieux par nombre de commentateurs. Posté le 26 janvier sur mon mur, l’article à entrainé quelques 98 commentaires en moins d’une semaine, de Russes et de Français, avec une grande majorité de jeunes filles des deux côtés.
Tout a été abordé : la femme russe, la femme française, une comparaison entre les deux, l’avis des hommes, la religion, et le rapport entre les sexes en Russie et en France ! Ouf, un sociologue aurait sans doute pu écrire le début d’une thèse avec les arguments étayés par les uns et les autres. Beaucoup de commentaires sont une réflexion sur le sujet du féminisme.
L’article, rappelons-le, traitait de l’appel d’un évêque orthodoxe pour que les jeunes femmes russes s’habillent plus décemment, comprenez : cessent de porter des minijupes trop courtes. L’affaire a été traitée par la presse internationale comme russe et l’évêque a reçu le soutien des principaux responsables religieux de Russie. Le Courrier international (publié en France) nous apprenait même le 27 janvier dernier qu’en Tchétchénie, dans les rues de Grozny, on tirait désormais au pistolet à peinture (paint-ball) sur les filles qui ne s’habillent pas "décemment".
Pour Irina par exemple, qui commentait mon article, la femme français serait "victime du féminisme, ce qui justifie son habillement unisexe, puisque la carrière est devenue prioritaire pour elle sur la famille". La femme française voudrait donc pour être l’égal de l’homme, avant tout lui ressembler, et surtout ne plus présenter une apparence qui rappelle au regard de l’homme qu’elle est une femme. En France, résume parfaitement Irina, féminisme signifie souvent absence de féminité.
Cet abandon d’une apparence attirante pour le regard a certes été motivé par des raisons pragmatiques, comme l’insécurité dans les rues ou le confort, mais pas seulement. Irina a sans doute raison : cette évolution a été encadrée par une idéologie qui a finalement fait beaucoup de mal aux relations hommes / femmes : le féminisme.
Je n’ai pour ma part jamais bien compris ce que souhaitaient les féministes en France, et surtout leur représentantes, au sein par exemple de la très célèbre association « chiennes de gardes ». Si on peut imaginer une représentation égalitaire des femmes dans la politique par exemple, je reste persuadé que l’important est avant tout d’avoir de bons dirigeants politiques, peu importe leur sexe. L’égalité dans les salaires hommes-femmes en France est une bonne idée mais la chasse aux machos ou la discrimination basée sur un système de quotas sont probablement de mauvaises idées. Il est certain qu’en France, la lutte pour l’égalité entre hommes et femmes a rencontré beaucoup de difficultés pendant tout le 20ème siècle.
Je remarque cela dit que les "chiennes de garde" ne demandent jamais l’égalité sans dévaloriser les hommes en général. Le mouvement par son influence politique dans quelques cénacles et par une réelle représentation médiatique à considérablement influencé les mentalités en France mais généralement dans le mauvais sens. Les différences complémentaires entre les sexes ne sont en rien réductrices, ni synonymes d’une hiérarchie inter-sexes défavorisant les femmes. Malheureusement pour elles, la diffusion du féminisme en France s’est accompagnée d’une déféminisation inutile, sur le plan vestimentaire.
Contraste : depuis que je suis en Russie, je ne crois pas avoir entendu le terme de féminisme une seule fois alors que pourtant je vis entouré de femmes russes. Ce petit miracle est à mon sens beaucoup plus qu’un détail, mais bien la preuve que les femmes russes n’ont sans doute plus rien à prouver, et c’est dû notamment à l’histoire de la Russie. Au début du 20ème siècle, les bolcheviques ont proclamé en Russie l’égalité des sexes, égalité de fait et de droit. Les femmes ont dès 1918 obtenu le droit de vote en Russie, alors que les Françaises ont dû elles attendre jusqu’en 1944.
Les femmes russes ont ensuite participé activement à la Grande guerre patriotique, et pas seulement en travaillant dans les usines. Il y a eu plus de 800.000 femmes russes dans les troupes combattantes, elles ont été médecins, infirmières, pilotes d’avion de bombardement et snipers au front. Elles ont participé aux batailles les plus terribles et beaucoup d’entre elles ont été faites héroïnes de l’Union Soviétique. En Russie, personne ne l’a oublié. Après la guerre, le manque d’hommes dans la société a fait que les femmes se sont débrouillées par elles-mêmes et ont appris à vivre sans le soutien masculin.
Ces difficultés n’ont pourtant pas enlevé leur féminité aux femmes russes, bien au contraire. Elles n’ont pas oublié quelques équations essentielles des relations inter-sexes, à savoir qu’une femme qui plait à un homme à tous les pouvoirs sur lui. Pour cette raison, il n’est pas question pour une femme russe, qu’elle réussisse professionnellement ou qu’elle occupe un travail physique ingrat, de pouvoir oublier de rester séduisante, bien au contraire.
Je me souviens de la grande surprise qui était la mienne lorsque je suis arrivé en Russie et que j’observais les hommes qui portaient les sacs à mains des femmes, et les femmes qui ne poussaient pas les caddies pour ne pas s’abimer les ongles. J’observais l’homme qui était là pour veiller au grain, pour protéger la sainte manucure et acheter des fleurs. On parle souvent du "panier de la ménagère" pour estimer les niveaux de vie des pays, mais si on estime la quantité de fleurs achetées pour les femmes pour établir un "panier des fleurs offertes", il devient évident que la femme russe n’a aucune concurrente en Europe.
C’est peut-être pour ces raisons que les mouvements féministes de type occidental n’ont jamais eu de grand succès en Russie. Plutôt que d’essayer de satisfaire des revendications féministes qui n’existent pas, les femmes russes continuent à soigner leur look, et l’Etat russe se concentre sur les revendications qui concernent la famille. La femme russe bénéficie d’un des plus longs congés maternités du monde (jusqu’à 3 ans avec emploi protégé) mais également depuis quelques années de très solides allocations (plusieurs milliers d’euros) dès le second enfant adopté ou procréé. Ce rôle clef de la femme en tant que mère est jugé tout à fait normal en Russie puisqu’elle est la clef de voûte de la société. Pour ma part, en tant qu’homme je trouve cela parfaitement normal.