Confusion – Je me rappelle mes 14 ans, quand, découvrant dans les livres d’Histoire ce qu’était la France et que nous, Français, nous existions, que nous étions quelque chose, je commençais alors à voir l’autre, celui qui n’était pas nous.
C’est-à-dire que je commençais à regarder l’arabe, le musulman, comme un étranger. Mais à la différence des gentils, l’étranger devait pour moi rentrer chez lui, l’autre était dangereux, potentiellement un ennemi. À 14-15 ans, petit con, je commençais à expliquer autour de moi que l’islam était une religion de guerre et que les millions de musulmans en France finiraient par nous dominer si nous ne prenions pas garde. J’étais adolescent, personne ne m’écoutait, tout le monde objectait mon « manque de tolérance » et s’endormait dans la douce certitude que tout irait éternellement bien.
Confusion 2 – Aujourd’hui, tout le monde me parle de l’islam et des musulmans. Des bobos de Paris aux jeunes de province, j’entends partout ce que je racontais quand j’avais 14 ans. Le problème est que je suis loin de m’en réjouir. Au contraire, voilà que désormais c’est moi qui prends leur défense dès que j’entends des ravis de la crèche devenus subitement islamophobes parce qu’ils sont tombés par hasard sur une vidéo d’égorgement sur YouTube.
Question de caractère : ne pas aimer hurler avec les loups, et se méfier d’instinct des idées et des sentiments qui d’un coup sont partagés par la masse.
Le problème que j’ai, je crois, est précisément celui qui a à voir avec l’islamophobie : la phobie de l’islam, la peur de l’islam... Les gens commencent à rejeter l’Autre parce qu’ils ont peur de lui. Il a fallu que l’étranger se mette à égorger des pauvres gens et à porter des barbes patibulaires pour que les Français s’interrogent. En somme, si, à la place de millions de musulmans, nous avions eu en guise d’immigration des millions de tibétains pacifiques, alors la France serait devenue tranquillement une nation asiatique sans que personne ne s’en émeuve…
J’ai un problème avec la peur. Je déteste les peureux. C’est pourquoi j’ai un sérieux problème avec l’islamophobie.
Sans aucune peur, et donc sans aucune haine, des types comme moi pouvaient déclarer il y a des années qu’effectivement l’islam n’avait rien à voir avec la France, qu’il fallait donc cesser toute l’immigration des pays musulmans vers la France et l’Europe, et qu’il fallait s’engager dans une politique diplomatique de partenariat étroit avec les pays arabes.
Une telle position rejetait l’islam d’Europe (ou du moins ne l’acceptait que dans sa portion congrue), certes, mais c’était une position rationnelle, sans haine, et qui pouvait de plus se marier parfaitement à un vrai respect de la religion musulmane en elle-même.
Au lieu de cela, nous avons désormais des millions d’anciens tolérants, d’anciens gauchistes, d’anciens oblatifs à la Riposte laïque qui hier encore nous traitaient de fachos pour nos positions rationnelles, mais qui aujourd’hui ont pris peur et font dans leur pantalon. Ils flippent, désormais, de l’islamiste qui balade sa barbe et sa djellaba en bas de chez eux. Déçus qu’ils sont de cet Autre qu’ils avaient espéré gentil et bienveillant (le fameux « beur », le « pote » de SOS Racisme), les voilà prêts à une nouvelle croisade.
Les pires islamophobes sont des anciens gauchistes, c’est une certitude. Pour s’en convaincre, il suffit même d’écouter leurs arguments : ainsi entendons-nous parler de « fascislamisme », ce qui trahit bien là leurs esprits contaminés par la gauche morale, c’est-à-dire seulement capables de diviser le monde en deux : d’un côté les gentils, de l’autre les méchants fachos. Rien n’est plus con que cette expression de fascislamisme. Elle vient de BHL de toutes façons, c’est donc signé.
Je n’aime pas la peur, je n’aime pas les idées engendrées par la peur. Je sens bien qu’un processus est déclenché en France et en Europe qui fera que tôt ou tard l’islam finira par se faire jeter hors de nos frontières. Je le sens bien en parlant avec les gens, je le sens bien quand j’analyse un peu les grosses ficelles qui manipulent les relations internationales et les réseaux qu’arrangerait sacrément un « choc des civilisations ».
Sans doute, cela est nécessaire, et, après tout, au diable les moyens pour y parvenir. Si, pour rester l’Europe, celle-ci doit d’abord se mettre à trembler comme une fillette, c’est moche, c’est lâche, c’est faible, mais qu’importe. Peut-être bien. Il n’en reste pas moins que tout cela a un arrière-goût amer.
Moi, je veux bien combattre l’islam dans mon pays, mais comme j’aurais combattu le bouddhisme ou, que sais-je, n’importe quelle religion qui n’aurait rien eu à voir avec nos racines et qui aurait été en passe de devenir majoritaire. Pas par « phobie », pas par « peur » – et donc : pas par « haine ».
En somme, je suis prêt à combattre l’islamisation de mon pays, mais ça m’emmerde au plus haut point de devoir le faire avec les « islamophobes ».