Les medias US, qui filtrent tout selon les intérêts US, ont écrit une version de l’histoire selon laquelle l’expulsion d’Ali Abdullah Saleh au Yémen causerait des problèmes de sécurité nationale.
C’est possible, mais les possibilités qui sont décrites sont déjà exposées à travers le monde arabe. La Libye, que nous avons attaquée, pourrait plonger dans le chaos et devenir un refuge pour les terroristes dans l’après-Kadhafi. Nous ne savons pratiquement rien des rebelles que nous soutenons. Et Bahreïn est déjà devenu le théâtre d’une proxy-war entre les Saoudiens et les Iraniens, il n’y a aucun espoir d’éviter cela. Quant à l’idée qu’une guerre civile pourrait éclater si Saleh venait à tomber, eh bien, à nouveau, nous regardons ailleurs. Mais étant donné le manque de crédibilité du président yéménite, le nombre de généraux qui ont changé de camp dans le pays, et les activités du mouvement séparatiste dans le sud qui officiait déjà avant la révolte, je dirais que nous sommes déjà dans une situation de guerre civile. Zut ! Je me souviens des cartes du « Yémen du Nord » et du « Yémen du Sud » : les deux pays ont seulement fusionné en 1994.
Mais tout cela ne sera qu’un point de détail si l’Arabie Saoudite abandonne le Yémen et force une solution rapide.
L’Arabie Saoudite voudrait voir une transition de pouvoir rapide et sans problème au Yémen, où M. Saleh s’est cramponné au pouvoir malgré des semaines de protestations et le dramatique rétrécissement de sa base, disent les analystes proches du gouvernement de Ryad. Et le royaume s’inquiète maintenant que la situation évolue vers un scénario libyen dans lequel M. Saleh utilise sa garde présidentielle contre le peuple et l’armée, transformant une révolte contre le régime en guerre civile.
« Pour l’Arabie Saoudite, les résultats de n’importe quelle médiation devront garantir la stabilité et une transition de pouvoir sans heurts, remarque Jamal Khashoggi, un analyste saoudien. Nous avons eu de très mauvaises expériences avec Saleh. La survie politique de ce président nous importe peu. »
Si les Saoudiens avaient un intérêt à protéger le régime de Saleh, ils auraient probablement fait la même chose qu’au Bahreïn en venant à son aide. J’ai entendu des discussions craignant que la révolte yéménite soit initiée depuis l’Iran, les mêmes discussions déjà entendues à propos du Bahreïn. Mais si c’était le cas, les Saoudiens n’auraient pas aussi rapidement abandonné Saleh.
Ryad a appuyé Saleh dans le passé, même après qu’il ait soutenu l’invasion du Koweït par Saddam Hussein. Mais les Saoudiens ont aussi gardé des contacts proches avec l’armée yéménite. J’imagine que leur issue préférée serait un coup d’Etat militaire.
Si Saleh a perdu son principal allié, son éviction n’est plus que l’affaire de quelques jours. Le nouveau gouvernement a pourtant approuvé l’état d’urgence. Saleh tiendra donc peut-être un peu plus longtemps. Mais le fait est qu’aucune des garanties de transition démocratique ont trouvé un écho favorable auprès du peuple descendu dans les rues.