Le renouvellement de l’état d’urgence sanitaire lié au Covid-19 a été adopté par le Parlement après le vote en dernière lecture des députés, loin du consensus politique du printemps dernier.
Le 7 novembre 2020, l’Assemblée nationale a définitivement adopté avec 154 voix pour et 38 contre le texte prolongeant l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 16 février 2021, une « période de transition » étant établie jusqu’au 1er avril 2021. Ce régime d’exception permet au gouvernement d’avoir recours aux ordonnances, de limiter drastiquement les déplacements, de confiner la population ou encore d’obliger certains commerces à fermer leurs portes.
Ce texte a attisé jusqu’au bout les tensions et divisions entre majorité et oppositions, sur fond de situation sanitaire « très préoccupante ». « La deuxième vague est là et elle est très violente », a assuré le ministre de la Santé, Olivier Véran, qui a salué sur Twitter un « vote responsable des députés ».
Je salue le vote responsable des députés de la loi portant sur l’Etat d’urgence sanitaire l’@AssembleeNat.
Cette responsabilité exceptionnelle confiée par la représentation nationale nous oblige à œuvrer sans relâche contre la #COVID19.
— Olivier Véran (@olivierveran) November 7, 2020
Cependant, loin du relatif consensus politique qui avait prévalu au printemps dernier lors du premier vote instaurant l’état d’urgence sanitaire, le parcours parlementaire du nouveau texte a pris cette fois des allures de chemin de croix pour l’exécutif. Les oppositions et le Sénat ont fait feu de tout bois contre le gouvernement et la majorité accusés d’« autoritarisme ».
Cette prorogation aurait dû être votée dès le 3 novembre, mais les députés de la majorité n’étant alors pas assez nombreux au moment du vote, l’opposition avait réussi à avancer la date de fin de l’état d’urgence au 14 décembre et à conditionner un reconfinement potentiel à l’accord du Parlement.
À peine l’Assemblée nationale a-t-elle voté l’adoption définitive du projet de loi que 69 députés issus majoritairement de la gauche (socialistes, communistes, LFI et sept députés Libertés et territoires) ont déposé un recours devant le Conseil constitutionnel. Les signataires arguent que « sans mésestimer d’aucune façon la situation sanitaire […] le régime d’état d’urgence sanitaire est manifestement disproportionné » et « porte une atteinte indéniable aux libertés fondamentales constitutionnellement garanties sans pour autant constituer une réponse adéquate susceptible de mettre fin à l’épidémie ».
Les députés des trois groupes de gauche (PS, LFI, GDR) et des députés du groupe Libertés et territoires ont décidé de saisir le Conseil constitutionnel sur le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire dont ils contestent notamment la durée jusqu'au 16 février. #DirectAN
— LCP (@LCP) November 7, 2020
« Une honte pour notre démocratie »
Comme le 3 novembre, les débats ont rapidement tourné à l’aigre dans l’hémicycle. La motion de rejet préalable portée par le député Les Républicains (LR) Philippe Gosselin a été applaudie avec ironie sur les bancs des « marcheurs », provoquant la colère des oppositions. Une attitude de la part des députés de la majorité qualifiée de « bouffonnerie » par Philippe Gosselin et d’« ironie stupide » par Gérard Leseul (PS).
« Vous êtes toujours dans le déni », a alors fustigé le député de La République en marche (LREM) Pacôme Rupin. « Rien n’est plus important que la vie humaine », a fait valoir sa collègue Laetitia Avia. « Les manœuvres politiciennes ont pris le pas sur l’esprit de responsabilité », a regretté la députée MoDem de la majorité Isabelle Florennes.
Le rapporteur LR de la loi au Sénat, Philippe Bas, a dénoncé sur Twitter un « passage en force du gouvernement », qui « ouvre une période de pouvoirs exceptionnels de six mois sans nouveau vote du Parlement ». « Démocratie méprisée », a-t-il cinglé.
Le passage en force du @gouvernementFR sur l’état d’urgence sanitaire à l’Assemblée Nationale ouvre une période de pouvoirs exceptionnels de six mois sans nouveau vote du #Parlement. Il y en avait eu quatre depuis mars. Démocratie méprisée.
— Philippe Bas (@BasPhilippe) November 7, 2020
Un avis partagé par le président de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan, pour qui ce vote sur l’état d’urgence sanitaire est « une honte pour notre démocratie [car] le Parlement ne pourra plus contrôler le gouvernement pendant plusieurs mois ».
Je suis dans l’hémicycle de l'Assemblée nationale. La majorité vient de voter l’état d’urgence sanitaire qui donne au Gouvernement les pleins pouvoirs jusqu’au 1er avril. Une honte pour notre démocratie !#DirectAN pic.twitter.com/FZU9AFOQjh
— N. Dupont-Aignan (@dupontaignan) November 7, 2020
Florian Philippot, président du mouvement souverainiste Les Patriotes qualifie également cette prolongation de l’état d’urgence de « honte ». Il affirme que « nous n’en sortirons jamais » et qu’il « entrera évidemment dans le droit commun si nous ne réagissons pas énergiquement ».
État d’urgence sanitaire prolongé, quelle honte : nous n’en sortirons jamais !
Il entrera évidemment dans le droit commun si nous ne réagissons pas énergiquement ! https://t.co/nPWzW3psCX— Florian Philippot (@f_philippot) November 7, 2020
Le 7 novembre, la France comptabilisait 1 748 705 cas de Covid-19 confirmés et 40 169 décès dus à ce coronavirus. Sur les sept derniers jours, l’épidémie est à l’origine de 20 009 nouvelles hospitalisations, dont 3 003 en réanimation.