Alors que l’ONU a appelé à alléger les sanctions économiques dans le contexte de la pandémie, l’Union européenne a annoncé soutenir un plan de Washington qui conditionne cet allègement... à une transition politique au Venezuela, sans Nicolas Maduro.
Les tentatives d’ingérence occidentales se poursuivent au Venezuela malgré la crise du coronavirus, qui n’épargne aucun pays. L’Union européenne a jugé le 3 avril le plan américain pour un « gouvernement de transition » au Venezuela sans le président Nicolas Maduro et l’opposant Juan Guaido « conforme » au principe de règlement pacifique prôné par ses États membres. Ce plan américain serait la condition sine qua non pour que Washington accepte d’alléger les sanctions économiques internationales qui pèsent lourdement sur l’économie vénézuélienne.
Premier pas pour lâcher Guaido ?
Les États-Unis ont ainsi appelé le 31 mars leur allié Juan Guaido à renoncer, au moins provisoirement, au titre de président du Venezuela (qu’il s’était arrogé devant ses partisans en janvier 2019) dans l’attente de nouvelles élections. Un changement de tactique de la part de Washington qui sonne comme un aveu d’échec de sa stratégie visant à évincer Nicolas Maduro du pouvoir.
Selon ce nouveau projet étasunien, Nicolas Maduro et Juan Guaido devraient « tous les deux » renoncer dans l’immédiat au pouvoir exécutif, confié pendant « une période de transition » à un « Conseil d’État » mis en place par « des élus de l’Assemblée nationale issus des deux camps ». En échange d’un accord sur leur plan, les Américains promettent de lever progressivement leurs sanctions draconiennes à mesure que cette transition sera mise en place.
L’UE « accueille positivement le cadre pour une transition démocratique au Venezuela proposé par les États-Unis », a déclaré le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, dans une déclaration au nom des 27 le 3 avril. « La proposition américaine est conforme à la demande de l’UE de parvenir à une solution pacifique à la crise par la négociation pour instaurer un gouvernement démocratique, qui est plus que jamais nécessaire aujourd’hui », a-t-il poursuivi dans cette déclaration, diffusée à l’issue d’une réunion par visioconférence des ministres européens des Affaires étrangères. Il a par ailleurs assuré que l’UE s’inquiétait de « l’impact dévastateur sur le plan humain » que pourrait avoir la pandémie de coronavirus « dans un pays déjà confronté à une grave situation économique, sociale et humanitaire ».
Ce plan américain, formulé en pleine crise du coronavirus, intervient alors que les protestations anti-Maduro, qui alternaient un temps avec les rassemblements de soutien au président vénézuéliens, se sont essoufflées ces derniers mois. Si l’opposition est forte dans le pays, elle est récemment apparue extrêmement divisée et Juan Guaido, dont l’allégeance à Washington n’est plus à démontrer, est loin de faire l’unanimité. Ainsi, son successeur à la tête de l’Assemblée nationale, l’opposant Luis Parra, a même rencontré le 31 mars Nicolas Maduro dans le but de conjuguer les efforts dans la lutte contre la pandémie.
L’alignement sur Washington prime sur les recommandations de l’ONU
Le gouvernement de Nicolas Maduro a rejeté dans un communiqué l’appel des Européens, estimant que l’UE montrait « son soutien au projet de Washington de lever les sanctions illégales contre le Venezuela si, et seulement si, son vœu est exaucé et son projet ancien de coup d’Etat se réalise ». Le Venezuela, ajoute le texte, « appelle les États membres de l’UE au respect de la souveraineté du peuple vénézuélien et leur rappelle qu’en tant que signataires de la Charte des Nations unies, le moins qu’ils puissent faire est de respecter ses objectifs et ses principes ».
En effet, dans le contexte délicat de lutte contre la pandémie et compte tenu des difficultés économiques qui en résultent, la Haut-Commissaire de l’Organisation des Nations unies (ONU) aux droits de l’Homme Michelle Bachelet a demandé, dans un communiqué publié le 24 mars, que les sanctions internationales frappant l’Iran et d’autres pays comme le Venezuela, Cuba, la Corée du Nord ou le Zimbabwe soient « assouplies ou suspendues » en cette « période cruciale » de pandémie de Covid-19.
Un appel que ne semble pas avoir entendu l’UE, qui préfère s’aligner sur l’agenda politique de Washington dans la région, malgré l’urgence de la crise sanitaire au Venezuela, comme dans de nombreux pays du monde.