Contexte : le déclin de l’Occident
L’urbanisation du vingtième siècle trouve ses causes dans le phénomène de tertiarisation de l’activité productive. On constate aujourd’hui deux choses : cette tertiarisation s’accentue drastiquement avec l’apparition de la réalité virtuelle, et les populations humaines s’agglutinent encore et encore dans des espaces bétonnés pour créer finalement un phénomène de sur-concentration sociale qui frise l’insupportable.
La naturopathie est une tentative de sortir de l’impasse civilisationnelle dans laquelle l’Occident est tombé. Si elle se réfère à toutes sortes de théories, plus ou moins discutées et discutables, telles que la théosophie et la biodynamie de Steiner, l’astrologie, les philosophies orientales, etc., une chose est certaine : elle tente d’alerter les Occidentaux sur le déclin imminent de leur civilisation.
Un des phénomènes majeurs de ce déclin est l’état de notre santé, en rapport avec notre alimentation.
Les molécules ont une histoire
Nous allons voir quels sont les enjeux qui se trament dans cette relation entre la médecine et la nutrition, mais pour cela, nous devons changer d’échelle, et nous pencher sur les molécules, et en particulier sur un aspect de ces molécules, qui n’est pas encore véritablement scientifique, dans la mesure où il n’a pas encore engendré de recherche fondamentale : l’histoire des molécules.
Toute molécule est plus ou moins stable dans le temps, ce qui signifie qu’elle s’inscrit dans un enchaînement de synthèses (combinaison de plusieurs molécules différentes), de polymérisations (concaténation de molécules identiques), d’hydrolyses (dislocation de chaînes carbonées qui forment de l’eau, phénomène chimique le plus courant autour de nous), de cassures, etc.
Par ailleurs, notre corps a besoin d’aliments pour agir et pour se régénérer. Ces aliments sont des complexes de molécules, soit macro-, soit micromoléculaires. Les macromolécules donnent de l’énergie au corps et le font fonctionner ; elles se mesurent en joules, ou kilocalories, et nos besoins sont proportionnels à notre activité physique et cérébrale. Par ailleurs, les micromolécules remplissent des centaines de fonctions pour fabriquer, nettoyer, consolider, bref régénérer les cellules de notre corps. Mais contrairement aux premières, qui sont facilement mesurables pour prescrire un régime alimentaire adapté à nos besoins, les micromolécules sont présentes en quantités infimes dans les aliments, et ne peuvent remplir toutes les fonctions qu’elles sont susceptibles de remplir, qu’à la condition d’être combinées à des chaînes carbonées différentes, c’est-à-dire provenant d’aliments différents.
Prenons l’exemple du magnésium : il est présent dans le chocolat, où son action est combinée avec un acide aminé, la phényléthylamine, pour stimuler la sécrétion de dopamine, un neurotransmetteur qui produit, en mangeant, la sensation de plaisir.
Le corps est donc capable de digérer une molécule complexe, de dissocier des molécules ou des atomes dont il va se servir pour assurer certaines fonctions vitales. Il est capable de gérer la complexité, mais peut-on en conclure, conformément à l’adage « qui peut le plus, peut le moins », qu’il est capable d’utiliser sans risques des molécules pures ? Rien n’est moins sûr, et il y a fort à parier que la plupart des maladies apparues depuis environ un siècle, proviennent de notre alimentation, et de son origine industrielle, « chimique », transformée par de multiples opérations de « purification ».
L’hypothèse de la naturopathie est de dire que des molécules provenant de la chimie seront capables de passer la barrière épithéliale, d’arriver jusqu’aux cellules et même d’assurer leurs fonctions métaboliques, mais qu’elles ne le feront pas de la même façon que ces mêmes molécules provenant d’un aliment non transformé. Elles engendreront des troubles et des dysfonctionnements dans les chaînes de réactions chimiques de notre métabolisme, et aboutiront à des maladies ou, pour parler comme Thierry Casasnovas, à des « symptômes défensifs », qui nécessiteront une intervention médicale ou médicamenteuse, ou une réponse thérapeutique sévère, sinon à la mort.
En ce sens, on peut dire que les molécules ont une histoire.
Mais dans notre société contemporaine, la science et la recherche sont subventionnées pour trouver des solutions de masse, et sont accompagnées par les structures éducative et médiatique pour masquer le fait que toute solution de masse industrielle est une impasse pour la vie humaine, et qu’il faut au contraire promouvoir des solutions collectives à petite échelle.
Médecine allopathique contre naturopathie :
approche quantitative contre approche qualitative
La première fait une approche quantitative des aliments, qui a engendré au XXe siècle le régime du docteur Liebig « protéines-lipides-glucides », qui est comme par hasard le père fondateur de l’agriculture industrielle et de l’industrie agroalimentaire. Il a accédé au succès qu’on lui connaît en commercialisant de l’extrait de viande bovine argentine et uruguayenne, mais il a surtout permis d’assujettir l’alimentation à la chimie industrielle, par la production massive et monolithique de ces trois types de biomolécules respectivement dans les viandes, les graisses et les sucres. Dans les faits, ce dogme alimentaire artificiel est toujours en vigueur, car du côté de la demande, la précarité grandissante force les populations à consommer les produits alimentaires les moins chers (même si elles ont conscience de la dangerosité de cette alimentation) ; et du côté de l’offre, le complexe agroalimentaire et sa sœur siamoise phytosanitaire et pharmaceutique font des profits totalement inégalables, qui les forcent à persister coûte que coûte dans ce schéma délirant. De la sorte, l’aveuglement des masses hypnotisées par la propagande, mêlé au renoncement aux modes de vie pourtant salvateurs (retour à la campagne et autosuffisance) garantissent à ces entreprises parfois plus riches que les États, une « double indemnité », où comme dans le film de Billy Wilder, on gagne sur les deux tableaux : la vie… et la mort.
Mais il existe une autre grille de lecture, un autre système de référence, qui permet de concevoir une vie meilleure, grâce à une alimentation saine, qui part d’une approche qualitative de la nutrition, et non plus quantitative.
Le premier contre-argument qui est apparu pour s’opposer à la vision conventionnelle quantitative, consiste à montrer que l’on ne peut pas faire reposer la santé sur la dépense énergétique (et donc sur la partie macromoléculaire de notre alimentation), mais sur le niveau d’homéostasie de notre métabolisme, c’est-à-dire sur la satisfaction de toutes les fonctions métaboliques, et sur la durée de cet état. Autrement dit, la santé repose sur le fait que nous sommes capables d’empêcher notre corps de se trouver en état de carence.
Prenons l’exemple de la vitamine C : elle ralentit le vieillissement des cellules, renforce les tissus conjonctifs, bref, elle agit un peu comme un ciment dans notre corps. À l’état normal, notre corps a besoin d’environ 1 gramme par jour de vitamine C biodisponible à 80 %. Mais, lorsque nous rencontrons une situation de stress, notre taux de vitamine C chute drastiquement, et met ainsi notre corps en état de carence. Les besoins peuvent alors monter jusqu’à 3 grammes.
On voit que la réponse n’est pas dans l’alimentation, puisqu’on compte en milligrammes ou tout au plus en grammes, mais dans le choix d’un remède, permettant de retrouver un seuil de satisfaction optimal.
Le marché des compléments alimentaires :
une entreprise pas forcément naturelle
Les oligo-éléments, les antioxydants, les vitamines, les minéraux et les fibres. Vous l’aurez compris, cette théorie nouvelle a engendré son propre marché, celui des compléments alimentaires. C’est un marché qui prend de l’importance, dont l’aspect positif est sa capacité à nous faire sortir du dogme quantitatif et mortifère de l’industrie agroalimentaire. Mais qui possède également un aspect négatif, en ce qu’il ne remet pas radicalement en cause les procédés chimiques industriels.
En effet, la question essentielle est de savoir d’où proviennent les micromolécules, que notre métabolisme pourra décomposer et distribuer pour satisfaire les fonctions biologiques qui leur correspondent ? Autrement dit, quelles sont les molécules qui se comportent conformément à nos capacités métaboliques ? La réponse est évidemment les molécules naturelles, celles qui sont présentes dans les fruits non transformés, issus d’une agriculture non interventionniste, non orientée vers la productivité à outrance (celle qui vise des rendements nécessitant de nombreux intrants et engrais, et qui poussent la plante à produire plus que ce que son environnement et son propre métabolisme lui permettent « naturellement »). Il y a donc une différence importante entre des types de molécules, en fonction de leur degré de transformation. C’est-à-dire que l’industrie joue toujours un rôle fondamental dans la production des molécules, car elle les isole et les produit en masse.
Que nous ayons une industrie qui s’occupe de mécanique, afin de faciliter nos déplacements, améliorer notre habitat, assurer des dépenses énergétiques maîtrisées, etc., cela est une chose. Mais n’est-ce pas aberrant qu’il existe une industrie qui transforme des molécules pour nous les faire manger, alors que nous ne connaissons rien ou pratiquement rien de leur action sur notre corps ?
En soi, il est parfaitement inutile, sauf pour les besoins du sacro-saint commerce, de produire des molécules pures. Notre corps est en effet conçu (d’aucuns diront programmé), pour digérer des multimolécules, c’est-à-dire des complexes de molécules, qui ne sont jamais isolées à l’état naturel. Il en est ainsi dans les fruits : l’acérola par exemple contient de la vitamine C, combinée avec de la bétaïne, de l’acide malique, et chacune de ces molécules va être isolée des autres par notre système digestif, pour permettre à notre métabolisme de les utiliser, et ainsi de remplir les centaines de fonctions qui permettent à notre corps de rester en bonne santé. Ou comme dans l’exemple du magnésium ci-dessus, la combinaison des éléments entre eux est en soi un facteur métabolique essentiel.
Il faut comprendre que toute la pharmacopée actuelle est basée sur le monomoléculaire, qui n’existe pas dans la nature ; et que la recherche n’en est qu’à ses balbutiements concernant les chaînes de causalité allant de la molécule à la fonction métabolique. Raison pour laquelle il faudrait se demander s’il ne serait pas plus prudent de renouer intelligemment avec les remèdes de grand-mère plutôt que de suivre exclusivement et aveuglément la pharmacie actuelle.
En effet, même pour les micronutriments, souvent appelés compléments alimentaires, l’offre mise sur le marché est trop souvent passée sous les fourches caudines de la synthèse chimique, de l’addition de solvants, d’agents de texture, etc., qui non seulement appauvrissent encore davantage les aliments en micronutriments, mais encore les rendent faiblement bio-disponibles, de telle sorte qu’une partie non négligeable d’entre eux finit... dans les toilettes... après vous avoir vidé votre porte-monnaie !
Et c’est sans compter l’impact probablement très négatif que peuvent avoir des molécules non naturelles, une fois qu’elles ont passé la barrière de nos intestins pour remplir les fonctions qui leur correspondent dans notre corps. Si les études existent, elles ne passent pas sur les médias de masse.
Pourtant, il suffirait de comparer un aliment très riche en divers oligo-éléments (par exemple la spiruline), avec un cocktail de médicaments qui contiendrait toutes les molécules du complexe précédent produites séparément, et de voir l’effet sur plusieurs années.
Par conséquent, pour être en bonne santé, la logique veut que nous trouvions les bons aliments, et non des compléments alimentaires obtenus avec des procédés chimiques. Trouver des super aliments, qui sont très concentrés en micronutriments (vitamines, anti-oxydants, etc.) et non des molécules de synthèse. Il y a par exemple les fruits secs (amandes, noisettes, noix, etc.), mais ceux-ci contiennent essentiellement des oligo-éléments (métaux sous forme organique : zinc, magnésium, etc.). Mais il faut aussi chercher du côté des fruits à pulpe, cueillis verts, avant maturité, pour obtenir la plus grande variété de micronutriments. Malheureusement, on ne les trouve pas dans nos contrées, parce qu’elles ont été domestiquées à l’excès (appauvrissement biologique des espèces naturelles, appauvrissement des biotopes, de la biodiversité). Et il faut aller les chercher dans des zones comme l’Amazonie, où il existe encore des souches de plantes suffisamment complexes pour produire seules une grande variété de micronutriments.
Ces plantes et fruits d’Amérique du Sud ne sont pas transformés chimiquement. Ils sont simplement chauffés à une température ne dépassant pas 40°C, afin d’être déshydratés, puis sont écrasés mécaniquement pour être compactés sous forme de comprimés ou de gélules. Si ces comprimés sont produits dans des laboratoires contraints de suivre un protocole d’hygiène assez dur, qui les fait ressembler à des laboratoires de chimie de synthèse, on comprend tout de même qu’il n’y a aucune intervention sur les molécules naturelles, à l’aide d’agents liants, aucune séparation de molécule à l’aide de bains chimiques, ni aucune action synthétique. C’est le gage de leur qualité dite « naturelle ».
Conclusion : notre santé passe par la connaissance en matière d’alimentation
Il faudra encore beaucoup de temps pour que le système nous réoriente vers ce qu’il y a de primitif et de primordial. Ce retour à la terre, qui est la condition pour retrouver notre liberté, autour des trois catégories fondamentales de l’existence : alimentation, logement et habillement ; l’existence humaine étant ce subtil mélange de liberté individuelle et d’entraide sociale, il faut retrouver ce que le système s’évertue à nous faire oublier à chaque minute : le respect de la vie.
Cela commence par la recherche d’une alimentation naturelle.
***
Prenez soin de votre santé avec Au Bon Sens !