L’église de la ville d’Abbeville n’est plus. À sa place nous voyons des gravats, ceux d’une église qui a été construite de 1868 à 1878. Ils attendent le camion benne et la décharge. Le diocèse d’Amiens est sous le choc tout comme de nombreux habitants, d’Abbeville, de France en passant par l’Allemagne [1] et la Russie [2].
Les Européens, les Français et le monde chrétien se demandent ce qui se passe avec la France. Est-ce que bientôt d’autres églises vont suivre le même sort que celui de l’église de Saint-Jacques ?
Pendant que la Russie a reconstruit ses églises en sortant de l’URSS, l’Europe détruit maintenant les siennes, qui sont le patrimoine culturel des lieux de culte et la mémoire de la civilisation européenne. D’autres églises qui pourraient être détruites sont pourtant consolidées et rénovées comme à l’image de l’église néo-gothique de Plounerin [3], qui a été construite en Bretagne entre 1875 et 1878. Les Bretons de la petite commune de sept cents habitants avec leur maire communiste ont fait un référendum en 2010 et ont décidé de restaurer leur église [4], qui pourtant était, elle aussi, dans un mauvais état et qui menaçait elle aussi de s’écrouler.
Position de la mairie
Le chef de cabinet du maire d’Abbeville, Nicolas Dumont, PS, explique :
« Hormis l’émotion de cette déconstruction les habitants d’Abbeville comprennent la décision qui a été prise. C’est une question de sécurité publique. L’église menaçait de s’effondrer à tout moment. On est conscients que certaines personnes auraient souhaité qu’on fasse des travaux mais ce n’était pas possible notamment vu l’état technique. Mais après les gens sont quand même raisonnables et comprennent la nécessité de déconstruire. Même le maire d’Abbeville ne souhaitait pas déconstruire cette église. Le maire n’a pas été élu pour déconstruire du patrimoine. C’est simplement au regard du rapport [5] de l’expert mandaté par le tribunal administratif que le maire a été obligé de prendre cette décision. »
Une structure instable bien résistante
Pour les auteurs du blog Saint-Jacques oubliée [6], des questions se posent. Stéphane Decayeux écrit :
« Je tenais à exprimer notre profonde tristesse de voir la manière avec laquelle notre église Saint-Jacques qui, je le rappelle, n’aura pas même été désacralisée, se voit infliger une destruction si violente et totale. Et sans égard aucun vis à vis de certaines pièces du mobilier religieux (confessionnal détruit, statue endommagée toujours visible mais inaccessible aujourd’hui ce lundi au milieu des ruines ! »
Stéphane Cailleux se pose aussi une question importante, car la structure jugée instable et menaçant de tomber rapidement n’a pas pliée aussi facilement aux coups de la pelleteuse :
« Bon nombre de nos concitoyens abbevillois nous interpellent, croyants ou non, choqués de si peu de respect pour ce monument, fut-il dans un état de péril imminent ! État qui reste à démontrer à voir les moyens qu’il aura fallu et qu’il faudra encore déployer pour détruire un clocher qui risquait de chuter à tout moment ! »
Diocèse
L’économe du diocèse d’Amiens, Stéphane Duté, qui ne décolère pas, nous apprend que durant dix ans la mairie n’a rien fait pour rénover et entretenir l’église, et raconte :
« L’église a été détruite. Et il y a un souci car légalement ce n’est pas possible. Il faut l’autorisation du préfet et de l’évêque. Pour qu’une église soit détruite, elle doit d’abord être désacralisée et seul l’évêque en relation avec le préfet peut l’accepter. De fait le maire d’Abbeville a considéré qu’il était au-dessus des lois car il n’a pas demandé l’avis de l’évêque. Il y a deux choses. Il y a une église qui est détruite et il y a un maire qui décide d’être au-dessus des lois. C’est à dire que la loi en France n’est pas nécessairement respectée à condition toutefois d’être dans le bon camp. Les lois s’appliquent à tout le monde sauf à ceux qui les font. Cela arrive en France depuis une quinzaine d’année. Nous n’allons pas en rester là. On va voir avec les évêques de France. On ne casse pas une église comme ça. C’est scandaleux car on ne respecte plus rien, même pas la loi. Le maire a fait quelque chose d’illégal et nous on aura un problème car on aura une église en moins. »
L’abbé Jean-Louis Brunel et la communauté catholique sont sous le choc car la destruction a commencé sans que la communauté chrétienne ait été avertie [7].