Tout le monde dit que les banques européennes n’ont pas tiré les leçons de la crise financière de 2008. Un rapport du Parlement européen révèle l’étendue des risques qui couvent et qui finiront tôt ou tard (il ne faut pas sous-estimer la capacité d’aveuglement du système financier) par se rappeler à nous.
Le château de cartes européen
Il faut lire (ou au moins survoler, car il est long), le rapport Liikanen du Parlement européen sur le secteur bancaire. Il est difficile de ne pas avoir des sueurs froides en y lisant que les actifs du secteur bancaire européen représentent 42 900 milliards d’euros, 3,5 fois le PIB européen, alors qu’aux États-Unis, il pèse 5 fois moins, 8 600 milliards d’euros, seulement 78 % du PIB. Certes, le rapport évoque les différences de normes comptables qui expliquent une partie de la différence, mais on se demande bien ce qui pourrait justifier que le secteur bancaire européen soit aussi gros.
Reprenant également le rapport Liikanen, Georges Ugeux souligne que « les banques européennes rechignent obstinément à réduire leurs actifs » et rappelle que rien n’a changé depuis la crise. Il avait rappelé il y a un mois que la Deutsche Bank, à elle seule, devrait diminuer son bilan de 250 milliards d’euros, après une réduction de 255 milliards les 18 derniers mois. Pire, le système bancaire européen est menacé par la détérioration continue de la situation en Espagne, avec le nouveau record dans le taux de créances douteuses, qui a atteint 11,6 % en juin (176 milliards).
Pourquoi l’explosion tarde-t-elle ?
Dès lors, il semble étonnant que la situation perdure ; mais ce serait oublier le cas japonais, où des banques zombies ont pu continuer à exister pendant des années sans être restructurées. En effet, tant que les marchés sont liquides (ce que l’action des banques centrales garantit pour l’instant), que les normes comptables permettent aux banques une grande liberté d’appréciation (les dernières évolutions sur les normes Bâle 3 vont malheureusement dans ce sens), il est possible de garder la poussière sous le tapis. Les milliards qui sont brassés camouflent les énormes risques.
The Economist vient de rappeler que les simples échanges sur le marché monétaire atteignent la bagatelle de 5 000 milliards de dollars par jour, 100 fois plus que ce qui est échangé ! On se demande bien quel est l’intérêt d’avoir autant d’échanges ? Pour l’économie réelle et productive, il n’y en a aucun directement. En revanche, ces sommes colossales sont autant d’argent sur lequel les banques peuvent spéculer et toucher des commissions. Le tout tient tant que les marchés sont à la hausse (ce qui est le cas des bourses et de l’immobilier) mais n’est qu’un château de cartes en cas de crise).
Il est d’ores et déjà acquis qu’une nouvelle crise financière aura lieu, puisque rien n’a été fait pour réformer un système financier qui tient grâce aux actions des banques centrales qui soutiennent le prix des actifs. Mais, tôt ou tard, les bulles finissent par exploser. Espérons que cette fois-ci, nous en tirerons les leçons.