Cela fait trois ans que l’information fuite et circule : les pays occidentaux n’ignorent pas que l’Arabie s’est lancée dans un vaste programme de nucléaire civil, mais ils ont de sérieux doutes sur son utilisation pacifique. De toute façon, les Saoudiens, qui ont financé la Bombe pakistanaise, avec l’autorisation des États-Unis, en disposeraient de fait au Pakistan. La géopolitique de la région s’en trouverait bouleversée, selon Giulietto Chiesa, de Pantora TV. Pour étayer les dires, nous avons exhumé un article de Marianne datant de juillet 2015.
Alors que tous les regards sont tournés vers l’Iran, l’Arabie saoudite s’est lancée dans un vaste projet de nucléarisation civile visant à compenser une consommation de pétrole gargantuesque. La France ne cache d’ailleurs pas ses ambitions commerciales. Mais faut-il craindre un détournement de ce programme à des fins militaires ?
Dans le domaine nucléaire, l’Arabie saoudite s’est ainsi lancée dans un chantier pharaonique : construire 17 centrales sur son territoire pour 2032. Le projet doit à terme permettre de générer 17 gigawatts, soit l’équivalent du quart environ de la production nucléaire française. C’est que la nucléarisation de sa consommation électrique apparaît comme une nécessité pour le pays. L’Arabie saoudite flambe, en effet, chaque jour le quart de sa production quotidienne de pétrole pour ses transports, sa désalinisation d’eau de mer et sa consommation électrique. Si pareil rythme est conservé, le pays passerait du statut de premier exportateur d’or noir à celui de simple importateur d’ici une génération. Le nucléaire représenterait donc, dans l’esprit de Ryad, un investissement indispensable à la préservation de son indépendance énergétique et potentiellement, pour Paris, un marché extrêmement lucratif.
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Se pose tout de même la question d’un possible détournement du programme à des fins militaires. « Cette éventualité vient du fait que l’Iran a développé un programme nucléaire depuis l’époque du Shah, précise le chercheur, lequel programme s’est trouvé prolongé sous la République islamique. L’Arabie saoudite souhaite sans doute ne pas accuser de retard technologique pour ne pas décrocher, stratégiquement parlant ».
« Les Saoudiens n’attendront pas un mois. Ils ont déjà payé pour la bombe, ils iront au Pakistan et ils prendront ce dont ils ont besoin »
- Le Pakistan possèderait 110 têtes nucléaires, ce qui en ferait la 6ème puissance mondiale
Un souhait que le quai d’Orsay, nouveau partenaire clé de l’Arabie saoudite au Moyen-Orient, n’ignore pas. Cela, alors même qu’il entend exporter le savoir-faire nucléaire français chez son allié wahhabite. En mai dernier, le Sunday Times révélait, par le biais d’un responsable américain, que l’Arabie saoudite avait demandé au Pakistan, dont elle finance depuis trente ans le programme nucléaire, un retour sur investissement sous la forme de bombes atomiques disponibles à volonté, mais dont le « produit fini » resterait stationné au Pakistan. Deux ans plus tôt, une première enquête de la BBC avait déjà révélé une entente nucléaire entre le Pakistan et l’Arabie saoudite. Hypothèse toujours envisagée dans le royaume pour ne pas se laisser distancer d’un point de vue technologique par l’Iran. À l’époque, Amos Yadlin, chef du renseignement militaire d’Israël avait commenté que si l’Iran avait la bombe, « les Saoudiens n’attendront pas un mois. Ils ont déjà payé pour la bombe, ils iront au Pakistan et ils prendront ce dont ils ont besoin ».