Tabaré Vazquez, 74 ans (photo ci-contre), le candidat de la gauche, a remporté environ 46% des voix au premier tour dimanche 26 octobre. Il affrontera au deuxième tour Luis Lacalle Pou, un candidat du Parti National.
Les Uruguayens ont placé dimanche 26 octobre le candidat de la gauche Tabaré Vazquez en tête du premier tour de l’élection présidentielle, et l’incertitude demeurait sur le résultat des législatives, qui pourraient contre toute attente voir la gauche conserver sa majorité au Parlement.
Selon les sondages effectués à la sortie des bureaux de vote, Tabaré Vazquez, 74 ans, cancérologue respecté qui fut le premier président de gauche de l’Uruguay entre 2005 et 2010, a recueilli environ 46% des voix au premier tour de la présidentielle.
Il affrontera au second tour le 30 novembre le candidat du Parti National (centre-droit) Luis Lacalle Pou, 41 ans, un député dynamique et peu friand des joutes idéologiques. Issu d’une grande famille politique et fils d’un ancien président, Luis Lacalle Pou a obtenu environ 31% des suffrages au premier tour, selon les sondages.
Tabaré Vazquez, candidat de la coalition de gauche Frente Amplio, souhaite succéder à l’atypique président José Musica, 79 ans, qui a porté le Frente Amplio ces dernières années mais que la loi n’autorisait pas à briguer un second mandat consécutif.
Un adversaire du Parti National
Pour sa part, Luis Lacalle Pou a fait souffler un vent nouveau sur le paysage politique traditionnel et a soigneusement évité de s’opposer frontalement à ses adversaires. Une stratégie qui lui sera probablement utile pour le second tour, où il aura besoin des voix de l’autre candidat de droite, Pedro Bordaberry (Parti Colorado), qui a récolté dimanche environ 13% des suffrages, selon les sondages.
« L’espoir est intact (...) Nous allons parler avec tout le monde », a confirmé Luis Lacalle Pou dans la soirée au siège du Parti National, peu avant de recevoir le soutien du Parti Colorado au nom du « changement ».
Révision de la loi sur le cannabis
Ces scrutins présidentiel et législatifs pourraient sonner le glas de la plus ambitieuse loi votée sous la présidence de « Pépé » Mujica fin 2013 : la légalisation de la production et de la vente du cannabis sous contrôle de l’État. Luis Lacalle Pou a déjà promis s’il est élu de faire modifier la loi pour supprimer notamment son aspect le plus controversé : la vente publique en pharmacie, sur laquelle M. Tabaré Vazquez est également réservé.
Si un second tour était attendu pour la présidentielle, la surprise provient des résultats des élections législatives, qui pourraient accorder la majorité absolue au Frente Amplio, ce que les observateurs jugeaient peu probable avant le scrutin. « Nous sommes très proches d’obtenir la majorité parlementaire », s’est réjoui Tabaré Vazquez devant ses partisans.
Réactions des partisans
Après l’annonce des premiers résultats, des milliers de partisans du Frente Amplio (FA) ont déferlé dans l’Avenue du 18 Juillet, principale artère du centre de Montevideo, klaxonnant et agitant leurs drapeaux.
« J’avais très peur de perdre », mais finalement « je suis très contente, car nous avons travaillé des mois pour que le Frente Amplio gagne », a déclaré Irina Goldman, 21 ans, le visage peint aux couleurs rouge, bleu et blanc du FA. Le parti « a fait beaucoup ces 10 dernières années, surtout pour les plus démunis, et maintenant il faut continuer ».
Dans le camp d’en face, la déception se faisait sentir. « Il y a pas mal de désillusion. Nous n’attendions pas mieux du Parti National mais des Colorados. Maintenant, ça va être très difficile », concédait Carolina, 24 ans.
Bilan du gouvernement sortant
Actuellement, l’Uruguay se porte bien, avec une croissance du PIB de 4,4% en 2013 - 11e année consécutive de hausse -, un chômage autour de 6% et une pauvreté divisée par trois entre 2006 et 2013. Et le Frente Amplio a récemment fait approuver le mariage homosexuel et le droit à l’avortement.
Le bilan du gouvernement de Jose Mujica, qui cèdera son bureau au 1er mars 2015, pêche toutefois sur la sécurité, l’éducation ou l’inflation (environ 10% par an), thèmes auxquels sont sensibles les classes moyennes, largement majoritaires en Uruguay.
« J’imaginais que les résultats seraient plus ou moins ceux-là », a déclaré le président Mujica à la télévision uruguayenne dans la soirée. Votant dans son quartier populaire du Cerro, dans l’ouest de Montevideo, le président avait souligné que l’élection « n’est pas une guerre ». « C’est une étape importante, mais le pays va continuer à aller de l’avant », avait-il dit.
Ancien guérillero
Célèbre pour son style de vie modeste et son refus du protocole, « Pépé » Mujica était arrivé au bureau de vote avec son épouse et son chauffeur dans sa vieille Coccinelle Volkswagen, sous l’objectif notamment d’une équipe du réalisateur Emir Kusturica qui tourne un documentaire sur cet ancien guérillero devenu président.
Un total de 2,6 millions d’électeurs de ce pays de 3,3 millions d’habitants étaient appelés à choisir, outre leur président, les 30 sénateurs et 99 députés. Les électeurs ont par ailleurs répondu « non » à un référendum sur l’abaissement à 16 ans de l’âge de la responsabilité pénale en matière criminelle.