L’assassinat de 11 membres de l’équipe olympique israélienne retenus en otage par un commando palestinien à Munich, en 1972, ainsi que d’autres affaires au retentissement moins médiatique, comme celle du détournement d’un avion de ligne à Orly par Jean Kay, trois ans plus tôt, ont nourri la réflexion sur la nécessité de doter la France d’une unité d’intervention spéciale étant donné que, dans certaines circonstances, les forces de sécurité classiques se sont révélées impuissantes.
La décision de créer une unité de la Gendarmerie nationale dédiée spécialisée dans les interventions difficiles et délicates a été prise en novembre 1973. Cette mission est alors confiée au lieutenant Christian Prouteau, un jeune officier passé par l’École militaire interarmes (EMIA) avant d’opter pour la gendarmerie qui ne manque pas d’idées pour mettre au point des modes d’action n’ayant rien à voir avec ceux utilisés jusqu’alors pour gérer des situations délicates et dangereuses.
Au départ, 50 gendarmes se portent volontaires pour intégrer la nouvelle unité. Seulement 17 seront retenus et affectée à l’Équipe commando régionale d’intervention (ECRI), rattachée à l’escadron 2/2 de Maisons-Alfort, alors commandé par le capitaine Gervais. La « naissance » opérationnelle de cette dernière devient effective le 1er mars 1974. L’acronyme GIGN (Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale) sera définitivement adopté le 1er juin 1976.
La première mission de ces gendarmes d’élite, à l’équipement encore sommaire, a eu lieu le 10 mars 1974, dans la résidence du parc à Ecquevilly (Yvelines). Malheureusement, entreprise trop tard, elle se terminera sur un amer sentiment d’échec, une femme et son fils ayant été tués par le forcené qui les retenait en otages bien avant leur intervention.
Deux ans plus tard, en février 1976, à Djibouti, qui est, à l’époque, encore un territoire français, des indépendantistes du Front de libération de la Côte des Somalis (FLCS) détournent un bus de ramassage scolaire avec, à bord, 32 enfants de militaires français. Le véhicule est ensuite immobilisé dans une sorte de no man’s land entre les territoires français et somalien. Les légionnaires de la 13e demi-brigade de Légion étrangère (DBLE) et du 2e Régiment étranger de parachutistes (REP) sont sur place. Ils sont rejoints par une équipe du GIGN, emmenée par le lieutenant Prouteau, dont l’allure suscite un certain scepticisme chez le général Brasart, commandant supérieur des Forces armées du Territoire français des Afars et des Issas.
Pour sortir les enfants du bus, les gendarmes optent pour la technique de tirs simultanés, très compliquée à mettre en œuvre dans la mesure où il s’agit d’éliminer l’ensemble des cibles en même temps, ce qui demande une cohésion parfaite dans les tirs dès que tous les objectifs à traiter sont tous immobiles. Les tireurs d’élite du lieutenant Prouteau réussissent ainsi à neutraliser 5 terroristes qui avaient été précédemment repérés. Malheureusement, un sixième, qui était resté caché, ouvre le feu sur les otages avant d’être abattu. Deux d’entre eux perdent la vie.
Si, dans son ensemble, cette opération peut être considérée comme un succès, pour Chrisitan Prouteau, elle est un échec, étant donné que le GIGN n’a pas réussi à rendre tous les enfants à leurs familles…
Quoi qu’il en soit, la réputation de ces gendarmes d’élite est faite. Et l’on ne compte plus les opérations souvent délicates qu’ils ont eu à mener en 40 ans, comme celle du détournement de l’Airbus d’Air France, en 1994, par des terroristes islamistes qui, très probablement, avaient l’intention de faire écraser l’appareil sur Paris. Certaines donneront matière à polémiques, comme, en particulier, celle de la grotte d’Ouvéa, en Nouvelle-Calédonie.
En 40 ans, le GIGN a ainsi mené 1 600 opérations, interpellé 1 500 personnes, libéré 625 otages et maîtrisé 260 forcenés. Dans le même temps, il a perdu 19 des siens au cours de ces interventions souvent périlleuses. Mais ses actions ne se limitent à pas missions périlleuses menées uniquement sur le territoire national.
En 2011, le drapeau du GIGN a été décoré de la Croix de la Valeur Militaire (CVM) pour ses actions sur des théâtres d’opérations extérieurs, notamment en Afghanistan où il a mené « des reconnaissances et effectué des coups de main au cœur des zones rebelles, au mépris des risques d’attaques et a ainsi contribué, malgré les périls encourus, à sécuriser les actions menées par les troupes internationales pour étendre l’état de droit aux confins du pays », en Côte-d’Ivoire, où il a joué « un rôle déterminant pour assurer la protection des emprises diplomatiques et des ressortissants français menacés par les luttes politiques intestines, évitant que ceux-ci ne soient la proie de groupes armés violents et incontrôlés », lors de la bataille d’Abidjan, ou encore en Libye, où il a permis « l’installation d’une représentation diplomatique de circonstance destinée à engager des discussions avec le conseil national de transition » alors que la guerre civile faisait rage.
Actuellement, le GIGN compte 380 gendarmes, répartis entre l’état-major, la force intervention, la force sécurité/protection, la force observation/recherche, la force appui opérationnel et la la force formation. Une équipe d’une vingtaine d’hommes est toujours en alerte et se tient prête à quitter la caserne de Satory dans la demi-heure avec ses équipements (matériel d’écoutes, de déminage revolver, pistolet, fusil de précision) pour intervenir n’importe où.