Au bon sens : Pouvez-vous nous décrire en quelques phrases le cahier des charges du bio pour l’apiculteur ?
L’apiculteur : D’abord, le cheptel doit-être constitué par division de colonies déjà en bio ou le cas échéant on passe par une période de conversion. On doit porter attention à l’environnement des ruchers et le miel récolté doit être issu de cultures bio ou de fleurs sauvages. Si l’on doit nourrir des colonies, ce sont des aliments bio (miel ou sucre) qui doivent être utilisés. Les ruches doivent être constituées de matériaux naturels neutres vis-à-vis de l’environnement et des produits de récolte. Concernant la lutte contre les pathologies des abeilles, sont exclus les antibiotiques et les acaricides de synthèse. Pour lutter contre la varroase, on peut utiliser des molécules aromatiques, des huiles essentielles, des acides organiques ainsi que des extraits végétaux et des préparations homéopathiques. Enfin, l’extraction des miels doit s’effectuer à froid, sans micro-filtration. Les produits de nettoyage et de désinfection doivent être relativement respectueux de l’environnement (eau chaude, cellVir, soude, etc.).
Au bon sens : On entend souvent dire qu’on ne peut pas empêcher l’abeille de butiner au-delà de la zone prévue et qu’elle butinerait ainsi des fleurs d’une zone « non-bio » . Qu’en pensez-vous ?
L’apiculteur : On admet que les butineuses couvrent une zone de 2 km de rayon. Dans une région comme les Cévennes on trouve aisément de vastes zones sans cultures. En plaine c’est plus délicat. On veille donc à ne pas poser de ruches en production à proximité de cultures conventionnelles mellifères fleuries. Cela est assez facile car ce système de culture intensive est en général monocultural et les parcelles sont bien identifiables. Les périodes de floraison sont courtes et prévisibles. Mais il ne faut pas se leurrer, le 100% bio n’existe pas si l’on considère par exemple la pollution atmosphérique avec les eaux de pluie qui contiennent jusqu’à plus d’une centaine de résidus de pesticides, la pollution radioactive, les emballages plastiques, etc. Pour nous, l’essentiel dans la démarche bio est d’aller vers une amélioration.
Au bon sens : Le nombre d’apiculteurs suit celui des abeilles : en 6 ans, 40 % des apiculteurs ont cessé leur activité en France. En quoi est-ce aujourd’hui un travail plus difficile ou précaire qu’il y a 50 ans ?
L’apiculteur : L’arrivée du Varroa il y a une trentaine d’années a bouleversé l’apiculture. Cet acarien parasite l’abeille domestique Apis mellifera et affaiblit les colonies jusqu’à leur mort si l’apiculteur n’intervient pas. Ceci est d’autant plus problématique en bio car les traitements alternatifs sont souvent moins efficaces et plus difficiles à mettre en œuvre. La biodiversité est primordiale pour l’abeille mais l’agriculture intensive et l’urbanisation ne cessent de détruire la flore sauvage. L’autre point noir important du système agricole intensif est qu’il repose sur l’utilisation irraisonnée de produits phytosanitaires tels les insecticides néonicotinoïdes tueurs d’abeilles. Maintenant, poser des ruches sur ces cultures revient à jouer à la roulette russe pour l’apiculteur. Enfin depuis une dizaine d’années tous les paysans vous confirmeront que le dérèglement climatique est bien réel et s’accélère. Tous ces bouleversements contraignent l’apiculteur à toujours plus de suivi et d’intervention sur son cheptel sans pour autant le prémunir des risques de mortalité et de perte de récolte. Il n’est pas rare de voir un apiculteur en fin de carrière jeter l’éponge suite à une mortalité affectant 80% de ses colonies en une saison malgré ses trente ans d’expérience ! La situation déjà catastrophique risque d’empirer avec de nouvelles menaces comme l’arrivée du frelon asiatique et surtout les OGM dont les conséquences environnementales seront irréversibles si on ne réagit pas à la mesure du désastre annoncé !
Au bon sens : Miel au sirop de sucre, démantèlement d’un vaste trafic de miels chinois aux États-Unis, miel avec des traces d’OGM. Pensez-vous que le miel français reste une valeur sûre pour les amateurs de miel ?
L’apiculteur : Malheureusement ces pratiques font de l’ombre aux apiculteurs passionnés et sincères. On ne doit pas pour autant se voiler la face et les ignorer. Si en France elles sont sans commune mesure avec d’autres pays (les miels chinois ont même été interdits à l’importation en France pendant une dizaine d’années car ils contenaient des antibiotiques dangereux) il faut quand même rester vigilant et ne pas oublier que la France détient le triste record du plus important consommateur de pesticides ! Le meilleur moyen d’être sûr de la qualité de nos aliments est de préférer les circuits courts, de s’informer sur l’origine précise des produits récoltés et les pratiques des producteurs.
Au bon sens : Pouvez-vous nous décrire les étapes de « transformation » que subit le miel en vente sur Aubonsens de la sortie de la ruche à la mise en pot ?
L’apiculteur : Justement, le miel n’est pas un produit transformé. Il est simplement extrait des rayons de cire par centrifugation ou pressage. On le laisse ensuite reposer pendant quelques semaines en maturateur (cuve) puis on écume les débris de cire remontés à la surface. Il est alors prêt à être stocké en fût ou directement mis en pot. Il se conserve naturellement (sans stérilisation ni pasteurisation) pendant plusieurs années de préférence à l’abri de la chaleur, de l’humidité (pots bien fermés) et de la lumière. La cristallisation du miel est un phénomène naturel mais l’apiculteur peut parfois la diriger, c’est à dire simplement l’ensemencer en très faible quantité (0.5%) avec un autre miel à la cristallisation fine exemplaire pour être sûr de son onctuosité finale. Inversement le miel peut-être défigé, c’est-à-dire passer de l’état cristallisé à l’état liquide par « chauffage » mais attention ! Si l’on veut conserver toutes les qualités du miel il ne faut pas dépasser 35°C (température au cœur de la colonie d’abeilles et de son nid à couvain). Le miel est donc un aliment naturel dont les qualités nutritives sont reconnues depuis des millénaires à condition de le récolter et le conserver avec précaution.
Notes d’Aubonsens :
Le miel, par ses propriétés générales, est un aliment exceptionnel : il combat l’anémie, stimule l’appétit, calme la toux, aide à la digestion en facilitant le travail de l’estomac, combat la fièvre, détruit les microbes et empêche leur développement, cicatrise (plaies infectées, brûlures), calme et supplée aux déficiences.
Une cuillère de miel chaque jour avant le sommeil ou au réveil est un aliment de choix, rassurant et traditionnel dont nous pouvons tous profiter, particulièrement aux changements de saison mais aussi toute l’année chez les enfants, personnes âgées, sportifs, femmes enceintes, en remplacement du sucre raffiné dans les pâtisseries ou simplement pour le plaisir.