Toute la France (ou presque) attendait ce retour tant attendu des Guignols de l’Info, après les événements de l’été 2015, qui ont vu l’équipe d’auteurs historique débarquée. Aujourd’hui, après une sélections de nouveaux auteurs, venus en partie de l’Internet, la nouvelle mouture est prête.
L’émission, qui dure presque 10 minutes, est un peu longue. Les voix ne sont pas parfaites, mais on imagine qu’il y aura des réglages. Le rythme est lent, les vannes rares, mais la grande nouveauté, c’est l’apparition des Le Pen, et en famille s’il vous plaît.
On y voit Jean-Marie, avec une tête de bouledogue méchant – comme dans les dessins animés américains des années 50 –, Marine, dont la voix est loupée, ainsi que Marion, pour qui la caricature ne fonctionne pas. Grande nouveauté parce que les Guignols des années 1990 avaient refusé de faire entrer Jean-Marie Le Pen dans la grande famille des marionnettes des Guignols, faussant ainsi le « jeu » démocratique. La raison invoquée était de ne pas faire de publicité à l’ogre fasciste, ce qui était, en creux, une façon d’avouer sa popularité et son attractivité. Bruno Gaccio avait refusé de manipuler cette marionnette explosive. Ses descendants n’auront pas de scrupule, et font visiblement de la figure de ce repoussoir national un emblème de la nouvelle émission des Guignols.
« Bien sûr que les chambres à gaz sont un point de détail de l’Histoire de la Seconde Guerre mondiale n’est-ce pas... »
Cependant, afin de ne pas rendre la Bête Immonde sympathique, les auteurs ont malheureusement tenté de rendre la Bête Immonde encore plus immonde, ce qui ne fonctionne pas. Il aurait fallu, plus subtilement, faire du vieux Breton une espèce de papi grognard qui devient gentil, avec le temps, presque socialiste tendance bobo. Avec un sketch sur le Bataclan. Là résidait la vraie subversion. Mais on n’a pas d’imagination, chez les soumis à l’idéologie dominante, et encore moins de courage (on ne dira pas « couilles » car on est entre gens bien élevés). On obéit à ses émotions, son instinct grégaire, sa pulsion de peur, et surtout à celle de la chaîne, qui a dû imposer un cahier des charges bien précis.
« Bien sûr que les prières musulmanes dans les rues sont similaires à l’Occupation allemande... »
À l’arrivée, après un fastidieux visionnage, du néo-Guignols sans surprises, sans révolution, sans prise de risque, avec un message antiraciste, anti-antisémite et antifasciste qu’on croyait trop primaire pour avoir sa place dans une émission de second, voire de troisième degré.
Il n’en est rien, comme vous pouvez le voir, et sans un véritable coup de fouet créatif, il est à craindre que l’ensemble ne crève une seconde fois…
Seul bémol positif dans cet océan de propagande très légèrement écœurant (comme une jolie crème fraîche mais avec une toute petite pointe de rance), la figure de Pierre Ménès, qui ne fait que reprendre celle de Philippe Lucas, qui pense et dit « la vérité ». Une sorte de rattrapage pour les derniers croyants en la liberté d’expression… Ou la vraie place de la vérité dans le saint des saint de la machinerie télévisuelle : grotesque, et résiduelle.
L’émission du 14 décembre 2015 est ici :