Ces quelques affaires – parmi des dizaines d’autres – montrent que la majorité de ce Parlement maintient dans tous les cas l’immunité des députés poursuivis pour délits d’expression politique et même -pourvu qu’ils appartiennent aux courants dominants- des députés poursuivis pour des faits de droit commun :
dilapidation de fonds publics : M. Valenzi
complicité de terrorisme : D. Cohn Bendit
enlèvement et séquestration : V. Öger
fraude fiscale : E. Brok
etc.
M. Marco Pannela (CDI, NI, ARE, ALDE, 1979-2009)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : M. Pannella, en sa qualité de directeur d’un organe de presse, est accusé de la publication d’articles, antérieurement à son élection au Parlement, appelant à la désobéissance à la loi, au refus du service militaire, et injuriant les forces armées et le gouvernement.
Décision du Parlement européen du 16 juin 1982 : non levée de l’immunité.
Motifs : « [l’immunité] ne saurait être levée pour des raisons relevant de l’activité politique » ; « l’immunité ne saurait être mise en cause du fait que les articles litigieux sont antérieurs au début du mandat parlementaire de M. Pannella ».
M. Marco Pannela (CDI, NI, ARE, ALDE, 1979-2009)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : outrage envers la Cour constitutionnelle italienne qualifiée de « Cour de régime » assurant le respect de « lois fascistes », responsable du « coup d’Etat ».
Décision du Parlement européen du 10 octobre 1983 : non levée de l’immunité.
Motifs : « Eu égard à la finalité de l’immunité, qui est de garantir l’institution parlementaire et l’indépendance de ses membres vis-à-vis des autres pouvoirs, l’immunité n’est pas levée dès lors que le caractère politique est reconnu ».
M. Erik Bernhard Blumenfeld (démocrate-chrétien, PPE, 1973-1989)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : M. Blumenfeld était directeur d’une société de 1974 à 1978. A la suite de paiements reçus pour des études fictives ou sans valeur (paiement qui était en réalité des dons à l’association du Land de Hamburg de l’Union chrétienne démocrate (CDU)), il est soupçonné de complicité dans un délit de fraude fiscale.
Décision du Parlement européen du 9 avril 1984 : non levée de l’immunité.
Motifs : « M. Blumenfeld fait l’objet de poursuite en tant qu’homme politique et non pas en tant qu’individu ; c’est en sa qualité d’homme politique qu’il était responsable de [la société], et c’est à l’association du Land de Hambourg du parti CDU que, selon les chefs d’inculpation, les profits revenaient ». De plus, « le caractère tardif de la demande de levée d’immunité par rapport aux faits objets de la demande » évoque le « fumus persecutionis ».
M. Marco Pannela (CDI, NI, ARE, ALDE, 1979-2009)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : M. Pannella est accusé d’avoir contribué à pratiquer des IVG en envoyant des femmes auprès de différents médecins en Italie et à l’étranger. A l’époque, l’IVG était illégale en Italie.
Décision du Parlement européen du 10 juin 1985 : non levée de l’immunité.
Motifs : « Le fait d’avoir contribué à organiser des interruptions de grossesse rentrait dans le cadre de la lutte politique menée par le Parti radical pour obtenir la modification de la législation italienne ». Et l’immunité ne peut être levée en raison de ce caractère politique.
M. Marco Pannella (CDI, NI, ARE, ALDE, 1979-2009)
Rapporteur : M. Georges Donnez.
Faits : Lors du déroulement d’un procès, M. Marco Pannella aurait commis les délits suivants : outrages répétés à un magistrat, résistance à un fonctionnaire d’Etat, et refus de décliner sa propre identité. Il avait notamment provoqué un incident dans la salle d’audience, avait refusé d’obtempérer à la demande des carabiniers de quitter la salle ; puis il avait avancé sa qualité de député européen pour être relâché après son arrestation, était retourné au 3
tribunal et avait insulté les carabiniers l’empêchant d’accéder à la salle d’audience de « lâches, félons, traitres ».
Décision du Parlement européen du 9 décembre 1985 : ne pas autoriser la poursuite pour les délits indiqués ci-dessus.
Motifs : « les circonstances dans lesquelles sont perpétrées de tels actes sont parfois de nature à laisser subsister des doutes quant aux vraies origines de l’action pénale et à justifier ainsi des présomptions d’existence d’une intention de nuire à l’activité politique du député » (plusieurs années entre les faits et e début des poursuites notamment).
M. Gerardo Gaibisso (PPE, 1984-1994)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : M. Gaibisso est accusé de s’être approprié ou d’avoir détourné la somme de 12.000 dollars en tant que président du Syndicat d’Initiative de Gvitavecchia.
Décision du Parlement européen du 6 octobre 1986 : non levée de l’immunité.
Motifs : la Commission juridique et des droits des citoyens proposait de lever l’immunité parlementaire, mais une minorité de député (qui a été suivie lors du vote du rapport) soutenait que « pour des accusations qui ne sont pas d’une gravité particulière, l’intérêt public exige que la nécessité de maintenir intègre l’organe parlementaire », et que « le caractère tardif des poursuites par rapport aux faits incriminés évoque le « fumus persecutionis » [pourtant le
rapporteur souligne que ce caractère tardif n’est dû qu’à la découverte tardive des faits].
M. Maurizio Valenzi (Groupe communiste et apparentés, 1984-1989)
Rapporteur : M. Georges Donnez.
Faits : M. Valenzi est accusé d’avoir attesté faussement des faits et des situations comptables afin d’obtenir un équilibre fictif du budget lorsqu’il était maire de Naples. De plus, il est aussi accusé du délit de dilapidation de fonds publics.
Décision du Parlement européen du 16 février 1987 : non levée de l’immunité.
Motifs : les faits reprochés à M. Valenzi ont eu lieu dans une situation très difficile (grave tremblement de terre de novembre 1980, nouvelles législations mal définies,…). « Les irrégularités administratives [...] doivent […] être considérées comme s’inscrivant dans l’exercice d’une compétence discrétionnaire de nature technico-administrative rattachée à une activité politique fondée sur une conscience aiguë de l’état d’urgence auquel il a été fait
face ».
M. Roberto Cicciomessere (NI, CDI, 1984-1989)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : organisation d’une réunion non autorisée en un lieu public.
Décision du Parlement européen du 11 mai 1987 : non levée de l’immunité.
Motifs : « l’accusation portée contre M. Cicciomessere apparaît étroitement liée à l’exercice d’une activité politique indissociable de la position critique adoptée par le Parti radical italien à l’égard de la politique d’information de la Société de radiotélévision italienne » devant laquelle ils ont organisé la réunion.
Mme Anne-Marie Lizin (Groupe socialiste, 1979-1988)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : il est reproché à Mme Lizin d’avoir usé d’un faux état civil fortifié par la présence d’un pseudo-mari pour se rendre en Algérie en vue de ramener clandestinement en Belgique trois enfants mineurs, de père algérien et de mère belge, confiés à la garde de celle-ci mais illégalement reconduits en Algérie par leur père.
Décision du Parlement européen du 8 février 1988 : non levée de l’immunité.4
Motifs : « Mme Lizin a cherché exclusivement à mettre fin à une situation illégale en ce qui concerne les enfants et leur mère », et ses actes « sont à mettre en relation avec son activité politique et son engagement social particulier qui en découle ».
Mme Emma Bonimo (CDI, NI, ALDE, 1979-2006)
Rapporteur : M. Georges Donnez
Faits : Mme Bonino a accompagné plusieurs groupes de femmes dans une clinique pour qu’il soit procédé à des IVG, alors que celui-ci était toujours interdit en Italie. Contexte : bataille politique avant référendum à la suite duquel est entrée en vigueur une loi réglementant l’IVG.
Décision du Parlement européen du 7 mars 1988 : non levée de l’immunité.
Motifs : idem que pour l’affaire Pannella. NB : la Chambre des députés italienne refusait de lever l’immunité parlementaire.
Mme Hiltrud Breyer (Verts/ALE, 1989-2009)
Rapporteur : M. Jean Defraigne
Faits : participation à un blocus de la base aérienne américaine de Bitburg, ce qui constitue un délit d’usage de moyens de contrainte illicites. Mme Breyer a été condamnée en première instance mais a interjeté appel. La procédure d’appel ne peut suivre son cours qu’après la levée de l’immunité parlementaire (Mme Brayer étant élu entre temps).
Décision du Parlement européen du 18 février 1991 : non levée de l’immunité.
Motifs : les actions de Mme Breyer « relèvent à l’évidence de l’expression d’une idée politique qui est propre à cette parlementaire » ; « il s’agit d’une action non violente qui […] ne constitue pas un motif de levée de l’immunité parlementaire » ; « les faits incriminés ne revêtent pas un caractère particulièrement grave ».
M. Francesco Iacono
Rapporteur : M. Jean Defraigne
Faits : M. Iacono est accusé, en tant qu’assesseur régional aux transports, d’avoir indûment procuré un avantage patrimonial à une entreprise sous forme d’une subvention.
Décision du Parlement européen du 14 décembre 1992 : non levée de l’immunité.
Motifs : M. Iacono « est victime d’une volonté de poursuite manquant d’objectivité à son égard (fumus persecutionis).
M. José Maria Ruiz-Mateos (NI, RDE, 1989-1994)
Rapporteur : M. Jean Defraigne
Faits : alors qu’il était conduit devant le juge d’instruction de la prison où il était incarcéré, il s’échappa avant d’être retrouvé et arrêté quelques jours plus tard.
Décision du Parlement européen du 21 juin 1993 : non levée de l’immunité.
Motifs : quatre ans entre les faits et leurs poursuites, pas de procès équitable selon la CEDH.
M. Andreas Brie (GUE/NGL, 1999-2009)
Rapporteur : Donald Neil MacCormick
Faits : M. Brie est accusé d’avoir organisé une manifestation sans autorisation en 1998 où il a déployé une banderole sur la porte de Brandebourg.
Décision du Parlement européen du 13 juin 2000 : non levée de l’immunité. 5
‘Motifs’ : « Il appartient aux membres de la commission de décider si les agissements dont est accusé M. Brie s’intègrent ou non dans son activité politique (NB : il n’était pas membre du Parlement européen au moment des faits) ».
Citation : « En ce qui concerne les délits d’opinion, l’immunité n’a, le plus souvent, pas été levée (y compris dans des affaires concernant M. Le Pen), sauf dans les cas où l’opinion exprimée était considérée comme constituant une violation de la législation sur la négation de l’holocauste ou un délit ou un acte délictueux à relents antisémites ».
M. Johannes Voggenhuber (Verts/ALE, 1995-2009)
Rapporteur : François Zimeray
Faits : M. Voggenhuber est accusé de calomnie et de diffamation. En Autriche, il a qualifié M. Jörg Haider (gouverneur de Carinthie, ex-président du FPÖ, adversaire politique) de « fasciste » et le FPÖ de « néo-fasciste », car « il tous les ingrédients essentiels du fascisme : le style autoritaire, le mythe de l’homme fort, la campagne contre les minorités, le racisme, la désignation des étrangers comme des parasites […] ».
Décision du Parlement européen du 3 mai 2001 : non levée de l’immunité.
Motifs : propos tenus par un parlementaire dans l’exercice de son mandat. « Paroles dures » mais justifiées par l’évolution des mœurs : « les hommes politiques formulent leurs propos de manière plus acérée, plus directe, plus offensante qu’auparavant ».
M. Daniel Cohn-Bendit (Verts/ALE, depuis 1994)
Faits : entre 1977 et 1998, M. Cohn-Bendit aurait permis à Joachim Klein d’échapper aux enquêteurs, empêchant ainsi l’ouverture de poursuites pénales pour cause d’assassinats commis en groupe et de prise d’otages (entrave mise à l’action de la justice dans le but d’aider un malfaiteur).
Décision du Parlement européen du 1 juillet 2003 : non levée de l’immunité.
Motifs : circonstances particulières de l’affaire : « actions du député en partie conformes aux garanties constitutionnelles allemandes, contexte des faits, non‑poursuite d’autres personnes qui y ont participé, proximité de l’élection européenne de 2004 ».
M. Efstratios Korakas (GUE/NGL, 1999-2004).
Rapporteur : Klaus-Heiner Lehne
Faits : M. Korakas est accusé de complicité à une menace, de fausse dénonciation et de diffamation calomnieuse. M. Korakas aurait aidé la femme de M. Houshang Erfany-Far à ternir la réputation de ce dernier et aurait utilisé les moyens mis à sa disposition en tant que député grec et député européen pour « anéantir » et « chasser » le plaignant de Grèce.
Décision du Parlement européen du 2 juillet 2002 : non levée de l’immunité.
Motifs : « les faits reprochés à M. Korakas ne peuvent en aucune manière être considérés comme présentant un rapport avec son activité politique », mais la plainte fait allusion au statut de député européen de M. Korakas qui lui aurait permis d’user de l’influence conférée par cette charge. Cependant, la Cour d’appel d’Athènes, qui a accepté le recours du plaignant,
n’explique pas pourquoi elle fait référence au statut de député européen de M. Korakas. Donc « la procédure du Procureur auprès de la Cour d’appel d’Athènes pourrait avoir eu pour objet de nuire à l’activité politique du député Korakas (fumus persecutionis) ».
M. Mogens N.J. Camre (Groupe Union pour l’Europe des nations, 2004-2009)
Rapporteur : Neil MacCormick
Faits : M. Camre a prononcé un discours devant le congrès national du Parti populaire danois en 2001 « qui tournent en dérision et qui sont humiliantes pour un groupe de personnes, à savoir les Musulmans ».
Déclaration : "Tous les pays occidentaux sont infiltrés par les Musulmans – et certains d’entre eux nous parlent aimablement, en attendant d’être assez nombreux pour nous faire disparaître comme au Soudan, en Indonésie, au Nigeria ou dans les Balkans." "Il y a un fil conducteur entre le violeur abject, l’homme qui excise sa fille et oblige sa femme à porter le foulard et celui qui, par fanatisme religieux, précipite un avion de ligne sur le World Trade Center. Ces personnes ont en commun la haine de l’autre – une haine ancrée
dans une idéologie malade."
Décision du Parlement européen du 1er juillet 2003 : non levée de l’immunité.
Motifs : application de l’art 10. « Le Parlement a constamment retenu comme principe fondamental, dans tous les cas dans lesquels les actes pour lesquels des députés sont l’objet d’accusations font partie de leur activité politique ou y sont directement liés, que l’immunité n’est pas levée ».
Or, les déclarations de M. Camre ont été faite « dans l’exercice de sa liberté de parole et en tant que partie de ses activités de membre du Parlement. Il ne fait pas de doute que ces déclarations concernaient une question qui préoccupe et intéresse le public et que les poursuites peuvent affecter l’indépendance et la capacité de s’exprimer du député. En ce qui concerne le contenu des déclarations, votre rapporteur note qu’il est souvent indiqué dans les rapports que l’expression d’opinions ne peut constituer une incitation à la haine, une
diffamation ou une violation des droits fondamentaux de la personne ou une attaque contre l’honneur ou la réputation de groupes ou d’individus ».
M. Efstratios Korakas (GUE/NGL, 1999-2004)
Rapporteur : Sir Neil MacCormick
Faits : M. Houshang Erfany-Far a déposé une plainte contre M. Korakas pour faux témoignage dans le cadre de la déposition faite devant le Tribunal de première instance d’Athènes dans l’affaire relative à une demande de l’épouse du plaignant (dont l’amant est M. Korakas) de versement d’une pension alimentaire pour ses enfants mineurs.
Décision du Parlement européen du 4 décembre 2003 : non-levée de l’immunité.
Motifs : la procédure pénale engagée par le procureur auprès de la Cour d’appel d’Athènes pourrait avoir eu pour objet de nuire à l’activité politique de M. Korakas (fumus persecutionis).
M. Umberto Bossi (ELDR, NI, TDI, UEN, 1994-2008).
Rapporteur : Diana Wallis
Faits : poursuite engagée par M. Fabrizio Comencini contre M. Bossi du fait de termes employés par ce dernier contre lui (« Crachez-lui au visage", "Bande de traîtres, d’avortons, de parasites, de fainéants. Après avoir fait exploser le MSI, il provoque un schisme au sein de la Ligue : la rupture est dans ses gènes", "Piétinez-le".).
Décision du Parlement européen du 5 juillet 2005 : défense de l’immunité parlementaire.
Motifs : « le Parlement européen n’a cessé de mettre en avant le principe, fondamental, selon lequel la levée de l’immunité ne peut en aucun cas avoir lieu lorsque les faits ou les propos reprochés au député ont eu lieu dans le cadre de son activité politique ou en liaison directe avec celle-ci.
En application desdits principes, votre rapporteur constate que les propos de l’ancien membre Umberto Bossi constituent une expression d’opinion légitime dans le cadre d’un débat politique ».
M. Giovanni Claudio Fava (PSE, 1999-2009)
Rapporteur : Klaus-Heiner Lehne
Faits : procédure pour diffamation envers un élu de la région de Sicile. M. Fava a critiqué le fait qu’il s’occupe du budget régional alors qu’il aurait été vu recevant une enveloppe contenant 25.000€ d’un conseiller fiscal mis en examen pour blanchiment d’argent.
Décision du Parlement européen du 1 décembre 2005 : défense de l’immunité et des privilèges.
Motifs : M. Fava commente des faits connus de tous, donc « il exerçait ses fonctions de membre du Parlement en exprimant son avis sur un sujet d’intérêt public pour ses électeurs ».
Citation : « Essayer de museler des membres du Parlement en les empêchant d’exprimer leur avis sur des sujets d’intérêt public bien compris en leur intentant des procès, n’est pas acceptable dans une société démocratique ».
M. Vural Öger (PSE, 2004-2009)
Rapporteur : Francesco Enrico Speroni
Faits : M. Öger doit être entendu dans le cadre d’une affaire d’enlèvement et de
séquestration ayant eu lieu en septembre 2005 d’un homme d’affaire turc en Belgique.
Décision du Parlement européen du 24 avril 2007 : non levée de l’immunité.
Motifs : imprécision de la demande (M. Öger doit être entendu en tant que témoin ou en tant qu’accusé ? Quels délits lui sont reprochés ?). Exemption de toute mesure de détention et de toute poursuite judicaire sur le territoire de tout autre État membre que celui dont il est ressortissant pendant la durée des sessions du Parlement européen (art 10-b).
Citation : « L’immunité parlementaire est destinée à protéger la liberté d’expression et la liberté de débat politique des députés. Dès lors, la commission compétente du Parlement européen a toujours retenu comme principe fondamental que, dans tous les cas où les actes
reprochés à un député s’intègrent dans son activité politique ou sont directement liés à celleci, l’immunité ne peut être levée ».
M. Renato Brunetta (PPE, 1999-2008)
Rapporteur : Aloyzas Sakalas
Faits : accusation de calomnie et d’atteinte à la réputation de M. De Michelis Di Slonghello pour avoir coédité un livre en 2006 où ce dernier est décrit comme un ancien espion du KBG.
Décision du Parlement européen du 29 novembre 2007 : défense de l’immunité et des privilèges.
Motifs : M. Brunetta a accompli son « devoir de membre du Parlement » en coéditant un livre sur « une question très importante pour la vie politique italienne et européenne ». Art 9.
Citation : « chercher à empêcher les députés d’exprimer leur point de vue sur des questions qui relèvent légitimement de l’intérêt général en engageant une action en justice est inacceptable dans une société démocratique ».
M. Claudio Fava (PSE, 1999-2009)
Rapporteur : Klaus-Heiner Lehne8
Faits : diffamation, injures et accusations calomnieuses à l’encontre de M. Costa suite à des propos tenu en 2006 dans une émission de télévision (propos insinuant notamment des collusions entre M. Costa et la mafia, ainsi que des manipulations électorales).
Décision du Parlement européen du 19 février 2008 : défense de l’immunité
Motifs : « En décrivant et en critiquant ce qui constitue à ses yeux des déviances survenues lors de la campagne électorale sicilienne, M. Fava était bel et bien dans son rôle de député au Parlement, exprimant, devant ses concitoyens, une opinion sur un thème d’intérêt général ».
M. Antonio Di Pietro (ALDE, 1999-2006)
Rapporteur : Aloyzas Sakalas
Faits : M. Di Pietro est accusé de diffamation à l’encontre du juge Verde. Il affirmait que M. Verde était accusé de corruption dans le procès concernant l’affaire Lodo Mondadori, alors que celui-ci n’a jamais été impliqué dans ce procès.
Décision du Parlement européen du 22 avril 2009 : non levée de l’immunité.
Motifs : M. Di Pietro « commente essentiellement des faits qui concernent le domaine public.
En expliquant et en critiquant l’une des affaires judiciaires les plus importantes de l’histoire politique italienne récente, il exerçait ses fonctions de député au Parlement qui supposent que celui-ci exprime à ses concitoyens son opinion sur des sujets d’intérêt général. En bref, M. Di Pietro n’a fait en la matière qu’accomplir son devoir de député au Parlement ».
M. Umberto Bossi (ELDR, TDI, IND/DEM, NI, UEN, 1994-2008)
Rapporteur : Klaus-Heiner Lehne
Faits : lors d’une réunion électorale en 2006, M. Bossi a fait référence au ministre de l’intérieur, Giuliano Amato, dans les termes suivants : « vous verrez que, si les élections se passent comme ça, les gens pourraient bien prendre leur fusil et poursuivre ces porcs, […] pour descendre cette racaille qui essaye d’empêcher les élections […], c’est tous des salauds, la gauche, ce n’est rien que de la racaille et des criminels, […] nous vous aurons quand nous le voudrons »
Décision du Parlement européen du 5 mai 2009 : défense de l’immunité et des privilèges.
Motifs : « M. Bossi s’est borné à émettre des commentaires sur des faits relevant du domaine public et revêtant une dimension politique italienne et européenne […]. Ce faisant, M. Bossi s’est acquitté de son devoir en tant que député au Parlement européen en exprimant son opinion sur une question d’intérêt public auprès de ses électeurs.
Par ailleurs, chercher à empêcher les parlementaires d’exprimer leur opinion sur des questions qui intéressent et préoccupent légitimement l’opinion publique en engageant une action en justice est inacceptable dans une société démocratique et constitue une violation flagrante de l’article 9 du Protocole, qui vise à protéger la liberté d’expression des députés dans l’exercice de leurs fonctions, dans l’intérêt du Parlement en tant qu’institution ».
M. Aldo Patriciello (PPE, depuis 2006)
Rapporteur : Aloyzas Sakalas
Faits : M. Patriciello a accusé un agent de la police municipal du délit de faux dans un acte public alors qu’il la savait innocente.
Décision du Parlement européen du 22 avril 2009 : non levée de l’immunité.
Motifs : « en fait, dans ses déclarations, M. Patriciello s’était borné à émettre des commentaires sur des faits relevant du domaine public, […]. M. Aldo Patriciello n’a pas agi dans son propre intérêt, il n’a pas cherché à insulter la fonctionnaire mais il est intervenu dans l’intérêt général de ses électeurs, dans le cadre de ses activités politiques. Ce faisant, il s’est acquitté de son devoir en tant que député au Parlement européen en exprimant son opinion sur une question d’intérêt public auprès de ses électeurs ».
M. Hannes Swoboda (S&D depuis 1996)
Rapporteur : Klaus-Heiner Lehne
Faits : dans un communiqué de presse, M. Swoboda critique le Président tchèque, M. Vaclav Klaus, pour avoir rencontré M. Declan Ganley. Il accuse se dernier d’être un menteur et affirme que le financement de ses activités est « extrêmement opaque et douteux ». M. Ganley demande sa condamnation pour diffamation.
Décision du Parlement européen du 22 avril 2009 : non levée de l’immunité.
Motifs : « en exprimant à ses électeurs son point de vue sur des questions aussi
fondamentales de l’Union européenne, M. Swoboda exerçait son mandat du député au Parlement européen ».
Citations : « l’immunité ne peut en aucun cas être levée lorsque les actes ou propos reprochés à un député font partie de son activité politique et/ou sont en rapport direct avec celle-ci. En font partie, par exemple, les manifestations d’opinion dont on peut estimer qu’elles relèvent de l’activité politique d’un député, comme les déclarations émises lors de manifestations, dans des réunions publiques, dans des publications politiques, par voie de
presse, dans un livre, à la télévision, par la signature d’un essai politique ou encore les déclarations faites devant un tribunal ».
M. Marek Siwiec (S&D, depuis 2004)
Rapporteur : Diana Wallis
Faits : en 1997, à la sortie de son hélicoptère, M. Siwiec, accompagné du président Kwaśniewski, a parodié les gestes du pape Jean-Paul II en faisant le signe de la croix puis en embrassant le sol. En 2000, des particuliers ont porté plainte contre M. Siwiec pour insulte à un chef d’Etat étranger et pour avoir heurté leur sentiment religieux.
Décision du Parlement européen du 20 octobre 2009 : non levée de l’immunité.
Motifs : Au vu du moment choisi pour engager les poursuites à l’encontre du député (pendant une campagne électorale et 3 ans après les faits reprochés), et des objectifs manifestement politiques du particulier qui les a engagées, il apparaît que la procédure publique en question constitue un « fumus persecutionis » (intention de nuire à l’activité politique dudit député).
M. Tamás Deutsch (PPE)
Rapporteur : Francesco Enrico Speroni
Faits : M. Deutsch est accusé de propos diffamatoires sur le passé de son interlocuteur lors d’une émission. Ce dernier a engagé des poursuites pénales.
Décision du Parlement européen du 3 février 2011 : non levée de l’immunité.
Motifs : ”existence d’un lien entre l’activité politique de M. Deutsch et les déclarations faites durant l’émission de radio ». « Ces déclarations portaient sur la vie politique hongroise et […] concernaient également les affaires européennes, dès lors que le demandeur était candidat à
un poste important au sein des institutions ». Ainsi, les déclarations de M. Deutsch ont été faites dans le cadre de ses fonctions de députés européens donnant « son avis sur un sujet d’intérêt public ».
M. Elmar Brok (PPE)
Rapporteur : Francesco Enrico Speroni
Faits : M. Brok n’a pas fait état dans sa déclaration d’impôts sur le revenu pour l’exercice 2005 des honoraires se chiffrant à 5 000 euros pour un discours prononcé le 28 octobre 2005 à Munich lors de l’Europa Forum, sur lesquels un impôt de 2 900 euros était dû.
Décision du Parlement européen du 8 mars 2011 : non levée de l’immunité.
Motifs : les actions du procureur (non information de M. Brok des charges pesant contre lui, pas de montant précis, pas d’intention réelle de fraude fiscale, et large publicité donnée à l’affaire par le procureur) démontrent un cas de fumus persecutionis et « les poursuites ont été engagées dans le seul but de porter atteinte à la réputation du député concerné ».
Mme Małgorzata Handzlik (PPE)
Rapporteur : Dimitar Stoyanov
Faits : Mme Handzlik est accusée d’avoir demandé au Parlement européen de rembourser les frais de participation à un cours de langue sur la base des dispositions en vigueur, bien qu’elle n’ait pas participé à ce cours.
Décision du Parlement européen du 11 juin 2013 : non levée de l’immunité.
Motifs : sérieux doutes sur la procédure (incertitudes quant au statut et à la provenance des preuves, faible montant en question). « Il apparaîtrait dès lors qu’il s’agit d’une affaire où l’on peut supposer l’existence d’un cas de cas de fumus persecutionis ».