Au fond, c’est son épouse qui a le mieux résumé la dérive de l’ex-commissaire Michel Neyret, qui comparaît devant le tribunal correctionnel de Paris, à compter du lundi 2 mai.
« Depuis que tu lui donnes du fric, c’est plus le même. Parce que Monsieur il sort, Monsieur il va dépenser (...). Il passe tout dans le champagne, dans ses soirées (...). Ne lui donne plus de monnaie, sinon il va au casino. Il va boire des canons et en paye aux nénettes. Tu me l’as pourri, Michel. (...) Maintenant, il est plus voyou que les autres. Mais arrêtez, arrêtez, il est obnubilé par le fric, le fric, le fric », lâche-t-elle dans une conversation téléphonique avec l’un des vénéneux amis de son mari, Gilles Benichou.
L’échange, intercepté pendant l’enquête, figure au dossier d’instruction qui vaut à l’ex-numéro deux de la police judiciaire lyonnaise – il a été suspendu de ses fonctions en octobre 2011 – d’être jugé pour « corruption et trafic d’influence passifs par personne dépositaire de l’autorité publique, association de malfaiteurs, violation de secret professionnel, recel, trafic de stupéfiants, détournement de scellés et blanchiment ».
À ses côtés, sept prévenus, dont son épouse Nicole, un avocat, David Metaxas, trois fonctionnaires de police, Jean-Paul Marty, Christophe Gavat et Gilles Guillotin, et deux hommes au casier judiciaire déjà chargé pour diverses escroqueries, Gilles Benichou et Cyril Astruc. Un huitième prévenu, Stéphane Alzraa, est introuvable depuis son évasion en décembre 2015 de la prison de Corbas (Rhône).
Un « grand flic », unanimement célébré
Au commencement est une enquête de routine sur un trafic de stupéfiants au printemps 2011. Plusieurs suspects sont placés sur écoutes, dont un ami de Gilles Benichou, auquel ce dernier livre très régulièrement de précieuses et confidentielles informations en se prévalant de ses bonnes relations au sein de la police judiciaire lyonnaise.
Les conversations téléphoniques de Gilles Benichou ne tardent pas à livrer un nom, celui de Michel Neyret. Un « grand flic », unanimement célébré pour son efficacité, considéré comme le meilleur connaisseur du grand banditisme entre Lyon et Grenoble, décoré quelques années plus tôt de la Légion d’honneur par le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy, et qui, en ces mêmes mois de 2011, inspire et conseille le réalisateur Olivier Marchal pour son film consacré au gang des Lyonnais.
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Régulièrement, Gilles Benichou sollicite son ami pour connaître l’avancée des procédures judiciaires ou des renseignements issus des fichiers nationaux ou d’Interpol visant des membres de son entourage ou de sa famille, parmi lesquels son frère Albert Benichou et son cousin Stéphane Alzraa, escroc de haut vol dans la taxe carbone, qu’il présente à Michel Neyret.