Surprise, surprise ! Voilà donc Bob Dylan prix Nobel de littérature.
Pourquoi ? Parce que. Comme dit le site qui vend à prix d’or ses places de concert : « La vie de Bob Dylan est un trajet dont chaque disque est une étape, et ce trajet est aussi celui de toute une génération. » Show-biz, terre de contrastes…
Interdit de rigoler. Le Monde est content : c’est sa génération. Celle qui s’est rendue le week-end dernier au festival Desert Trip en rêvant de sa jeunesse contestataire, des soutiens-gorge aux orties et des grand-messes contre la guerre du Vietnam. Nostalgie, quand tu nous tiens… Par le porte-monnaie, essentiellement, vu le prix « tellement élevé [à partir de 199 dollars pour une journée, de 399 dollars à 1 599 dollars pour les trois jours, soit jusqu’à 1 430 euros] que l’événement attire naturellement les cinquantenaires et plus qui en ont les moyens », écrivait, d’ailleurs, le quotidien du soir. Mais quand on aime, on ne compte pas, c’est connu. Et Le Monde a aimé.
Donc, Dylan a le Nobel. Un Nobel pour « papy-rockers et baby-boomers ». C’est Maxime Le Forestier qui doit regretter San Francisco et sa maison bleue accrochée à la colline… C’est vrai, ça, pourquoi Dylan et pas Le Forestier ? Je ne dis pas Brassens, ou Brel, ou Ferrat. Non, ceux-là, c’était la génération d’avant.
Celle de l’immédiate après-guerre. Pas assez contestataires. Dylan, c’est autre chose.
Alors il faut s’incliner. Pas le droit de critiquer ce choix, sinon on se retrouve du mauvais côté : hier, « la plupart des commentaires négatifs revenaient à la “droitosphère”, ironisant sur le fait que les candidats de télé-réalité ou n’importe quel chanteur de variétés étaient désormais nobélisables », écrit Le Monde, alors qu’il a été « salué de Salman Rushdie à Barack Obama ». Saleté de droitosphère qui ne respecte rien !
Dans Le Point, Michel Schneider argumente :
« Dans la liste des possibles cette année, il y avait jusqu’à hier trois écrivains américains de premier plan : Philip Roth, Don DeLillo et Joyce Carol Oates. Le scandale de certains choix précédents n’était pas que Modiano, Tranströmer ou Aleksievitch soient lauréats, mais que des titans littéraires depuis des décennies ne l’aient pas été, simplement parce qu’Américains. » Alors, pourquoi Dylan ? « Parce qu’on croit qu’il chante contre l’Amérique. » De même, dit-il, le jury des Nobel « a pardonné à Alice Munro d’être anglophone parce qu’elle n’était pas américaine mais canadienne. Le dernier auteur américain nobélisé fut Toni Morrison en 1993, peut-être parce que, noire et femme, elle n’était pas l’écrivain, homme et blanc tant honni par les Suédois progressistes et tiers-mondistes. »
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