Le conseiller d’État valaisan fraîchement élu Oskar Freysinger a déployé dans sa cave un drapeau militaire du IIe Reich allemand, utilisé comme emblème néonazi aujourd’hui. Il affirme ne pas s’en être rendu compte.
C’était officiellement le drapeau impérial de guerre de l’armée du Deuxième Empire (Reich) allemand dès 1871. Aujourd’hui, cet étendard tricolore noir, blanc et rouge, orné de la croix de fer et de l’aigle impérial, est devenu l’un des emblèmes des néonazis. Et il en existe un exemplaire chez Oskar Freysinger.
En effet, l’émission « Reporter », de la télévision suisse alémanique SRF, a montré dimanche soir ce drapeau historique déployé au plafond dans la cave du conseiller national UDC et conseiller d’État valaisan fraîchement élu, rapporte le Tages-Anzeiger mardi.
Le politicien a expliqué l’avoir acheté il y a 15 ans à Lübeck, en Allemagne, lors d’une exposition sur un sous-marin. Les couleurs et les symboles lui ont plu, a-t-il raconté. « Pour moi, il s’agit avant tout d’éléments décoratifs qui n’ont rien à voir avec une idéologie. »
Ce drapeau impérial a été utilisé par l’empire fédéral allemand ou Reich à des fins de propagande. L’une des images les plus célèbres de la Première Guerre mondiale montre un marin sur un navire en perdition brandissant l’étendard guerrier. Celui-ci restera en usage jusqu’à la fin de la guerre 1918. Les couleurs noir-blanc-rouge seront réintroduites en 1933 avec la fondation du Troisième Reich, soit l’État allemand nazi, avant que le parti n’opte pour le célèbre drapeau à croix gammée en 1935. Mais le drapeau du IIe Reich flottera encore sur les navires de guerre d’Hitler lors des cérémonies.
Drapeau pas interdit
Contrairement à la croix gammée nazie interdite en Allemagne après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le drapeau tricolore du IIe Reich n’a jamais connu une telle mesure. Raison pour laquelle on le trouve encore fréquemment chez les néonazis. « Il est utilisé aujourd’hui par ceux qui veulent exprimer leur appartenance à l’extrême-droite », explique Sven Lüken, du Musée historique allemand à Berlin.
Le drapeau impérial a également flotté en Suisse, notamment chez des supporters bâlois lors d’un match de football entre Zurich et Bâle en 2007. L’UEFA avait alors condamné l’incident et l’Association suisse de football avait exigé que ce genre de drapeaux soient à l’avenir interdits de stade, sous peine de lourdes sanctions.
Mais Oskar Freysinger, qui enseigne l’allemand au niveau gymnasial en Valais, affirme qu’il ne savait rien de tout cela. J’ai acheté ce drapeau pour des considérations purement esthétiques, je le trouvais simplement beau. Il se défend de l’avoir acquis pour l’idéologie d’extrême-droite qu’il représente. En outre, ce qu’il accroche à ses murs chez lui ne regarde personne, estime-t-il.
« Consternation »
Mais Ronnie Bernheim, président de la Fondation contre le racisme et l’antisémitisme, se dit « consterné » qu’un tel drapeau puisse être déployé chez un conseiller national et conseiller d’État. « En tant que politicien et enseignant, Oskar Freysinger se doit d’être un exemple. Comment peut-il arborer chez lui un drapeau sous lequel les pires violations des droits de l’homme ont été commises ? », s’insurge-t-il dans le Tages-Anzeiger.
« Si Freysinger a laissé une équipe de télévision filmer un tel étendard, il ne s’agit plus dès lors d’une affaire privée », estime Ronnie Bernheim. Le drapeau célèbre publiquement, de manière involontaire peut-être, le néonazisme, selon lui. Mais le politicien valaisan ne se laisse pas pour autant impressionner : le drapeau n’étant pas interdit, il continuera de décorer sa cave, a-t-il conclu.