Rattachée aux Emirats arabes unis quand ces derniers étaient sous la tutelle britannique, l’île d’Abu Moussa est contrôlée depuis 1971 par l’Iran, c’est à dire après la décision du Royaume-Uni de quitter la région.
Depuis, Abu Dhabi et Téhéran se disputent la souveraineté de ce territoire de 12 km2 situé à l’entrée du détroit d’Ormuz en raison de son importance stratégique et des réserves de pétrole qu’il est supposé receler.
Le 11 avril, à la veille d’une rencontre entre l’Iran et le groupe 5+1 (membres permanent du Conseil de sécurité de l’ONU et l’Allemagne) au sujet du programme nucléaire iranien, le président Mahmoud Ahmadinejad s’est rendu sur cette île dans le cadre d’une tournée dans la province d’Hormuzgan, afin d’y réaffirmer son caractère « perse », attesté selon lui par des « documents historiques ».
Seulement, cette initiative n’a pas été du goût d’Abu Dhabi. « Cette visite est une flagrante violation de la souveraineté des Emirats arabes unis et un rejet de tous les efforts déployés en vue d’un règlement pacifique de l’occupation iranienne de trois îles émiraties (ndlr, Abu Moussa, et les îles de la petite et de la grande Tombe) » a ainsi réagi le ministre émirati des Affaires étrangères, le cheikh Abdallah Ben Zayed al-Nahyane.
« Cette visite ne change rien au statut juridique des (trois) îles, qui font partie intégrante du territoire émirati », a-t-il poursuivi. « L’initiative de M. Ahmadinejad témoigne des fausses allégations de l’Iran qui se dit soucieux d’établir des relations de bon voisinage et d’amitié avec les Emirats » a encore accusé le ministre.
Et, en guise de protestation, les Emirats ont rappelé leur ambassadeur en poste à Téhéran, à des fins de « consultation ». Et cela n’a pas semblé perturber le régime iranien. « La visite du président Mahmoud Ahmadinejad sur l’île d’Abou Moussa (…) constitue une affaire strictement interne » a fait valoir le vice-ministre des Affaires étrangères, en charge des pays arabes et de l’Afrique, tout en insistant sur le fait que ces îles contestées « ont toujours appartenu à l’Iran et continueront à lui appartenir ».
Cela étant, cette visite du président Ahmadinejad a été qualifiée de « provocation » par Abdel Latif al-Zayani , le secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe (CCG), qui rassemble les pétromonarchies sunnites de la région (Arabie saoudite, Oman, Koweït, Bahreïn, Émirats arabes unis et Qatar), lesquelles voient une main iranienne dans les mouvements d’humeur des minorités chiites faisant partie de leurs populations.
« Cette visite est une violation flagrante de la souveraineté des Emirats et ne change rien à la réalité historique et à la légalité de l’appartenance des trois îles aux Emirats arabes unis » a ainsi déclaré Abdel Latif al-Zayani. « Il s’agit d’un acte de provocation irresponsable qui contrarie la politique de bon voisinage du CCG à l’égard de l’Iran ainsi que ses efforts pour une solution pacifique du différend soit par la négociation soit par l’arbitrage international » a-t-il poursuivi.
Avec l’intention prêtée à Israël de planifier une opération militaire contre les sites nucléaires iraniens, les agitations chiites à Bahreïn et en Arabie Saoudite, les ingérences de Téhéran en Irak, cette rivalité entre les Emirats arabes unis et l’Iran, dont, par ailleurs, l’influence s’étend en Syrie et au Liban, constitue un autre foyer de tension dans une région stratégique qui n’en manque pas.