Les propos de Silvio Berlusconi affirmant que Mussolini a fait beaucoup de bonnes choses, à l’exception notable des « lois raciales » antisémites, ont déclenché dimanche une vague de protestations à travers la péninsule, tant au sein de la communauté juive que dans le monde politique.
« Les lois raciales représentent la pire faute d’un leader, Mussolini, qui en revanche a fait de bonnes choses dans tant d’autres domaines », a affirmé l’ex-chef de gouvernement, qui s’exprimait à Milan en marge d’une cérémonie à l’occasion de la journée de la mémoire de l’holocauste.
En outre, l’Italie « n’a pas les mêmes responsabilités que l’Allemagne », a relativisé le Cavaliere, alors que la chancelière Angela Merkel avait estimé samedi que l’Allemagne avait « une responsabilité permanente pour les crimes du national-socialisme ». Le régime de Benito Mussolini, au pouvoir de 1922 à 1943, a adopté à partir de 1938 une série de mesures connues sous le nom de « lois raciales », qui notamment excluaient les juifs de l’armée et de l’enseignement et limitaient leur droit de propriété.
Lors de la Seconde Guerre mondiale, plus de 7.000 hommes, femmes et enfants juifs italiens furent exterminés dans les camps de la mort. « Les déclarations de Silvio Berlusconi sont non seulement superficielles et inopportunes, mais aussi (...) privées de sens moral et de fondement historique », a dénoncé le président de l’Union des communautés juives italiennes, Renzo Gattegna. « Les persécutions et les lois racistes antisémites italiennes sont nées bien avant la guerre et ont été appliquées en toute autonomie sous la responsabilité pleine et entière du régime fasciste, par la suite allié et complice volontaire et conscient de l’Allemagne nazie », a-t-il rappelé.
« De telles déclarations doivent être rejetées et démontrent à quel point l’Italie a encore du mal a accepter sérieusement sa propre histoire et ses propres responsabilités », a-t-il conclu. Plusieurs responsables politiques de gauche ont également exprimé leur indignation. « Les paroles de Berlusconi sont une honte et une insulte à l’histoire et à la mémoire. Qu’il s’excuse aujourd’hui même auprès des Italiens », a réagi dans un tweet le président du groupe du Parti démocratique (PD, gauche) à la Chambre des députés. Le Cavaliere n’est « ni plus ni moins que la caricature » de Mussolini, a commenté Antonio Di Pietro, leader de l’Italie des Valeurs (IDV).
« Il est tout simplement dégoûtant que justement le jour de la Mémoire Berlusconi se mette à réhabiliter l’action du dictateur qui a entraîné l’Italie dans la Seconde Guerre mondiale », a dénoncé Debora Serracchiani, députée européenne du Parti démocrate (gauche), dans un communiqué. « Berlusconi prend ainsi une très lourde responsabilité morale et politique : il jouit d’un large écho médiatique et se trouve à la tête d’un parti qui voudrait gouverner, et il accrédite aujourd’hui la version d’un Mussolini en partie acceptable », a-t-elle ajouté. Le Cavaliere et son parti le Peuple de la Liberté (PDL) sont en pleine campagne pour reconquérir le pouvoir aux élections législatives des 24 et 25 février, pour lesquelles le Parti démocratique est donné favori. Face au tollé, le chef du groupe PDL à la Chambre, Fabrizio Cicchitto, est monté au créneau pour défendre le fondateur de son parti.
« La dictature fasciste n’a jamais atteint l’horreur de celle des nazis et de celle de Staline », a-t-il cherché à relativiser, affirmant que « le débat instrumentalisé qui s’est ouvert détourne le sens des paroles de Berlusconi, qui se référait évidemment aux politiques d’aide sociale et de soutien aux familles » du Duce.