Vous nous connaissez : on n’est pas du genre à déboiter la maison France, le madinefouense, mais dès les premières images de Valérian, on sait malheureusement qu’on est dans un « LucBesson ».
Valérian et la cité des mille plagiats
Luc Besson ne s’intéresse qu’à une chose : la multiplication des tableaux où évoluent ses personnages. Puisant ses références dans tout le cinéma de science-fiction (Star Wars, Blade Runner, Star Trek, Avatar, The Edge of Tomorrow, Total Recall, tout y passe) et même plus (une touche de James Bond, un zest de Ziggy Stardust, mâtiné de Starmania…), il bourre son film de tout ce qui lui passe par la tête.
C’est pas nous qui le disons mais Le Monde, donc respect. Un LucBesson, ça a l’apparence d’un film, mais ça rappelle plein d’autres films – oh Star wars, oh Avatar, oh Le 5e élément, oh Contact (la scène sur la plage de sable blanc) ! – , ça ressemble à un film, mais ça n’est pas un film : c’est un Frankenstein, un assemblage de trucs qui ont marché, histoire de minimiser le risque commercial. Mais à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.
Certes, Besson a investi 200 millions dans le projet Valérian (sa société a perdu 120 millions en bourse en 2016-2017), mais la minimisation du risque commercial diminue parallèlement le risque artistique. Pas question de se distinguer avec un scénario pointu et une réalisation originale, ce qui est pourtant la marque de fabrique de la partie vivante du cinéma américain. Besson, pour des raisons de retour sur investissement, a besoin de plaire aux Américains, et au public américain. Sa boite EuropaCorp porte mal son nom, puisqu’elle produit un cinéma américanophile, et c’est le public US qu’il drague. Le problème, c’est que Luc Besson est au cinéma ce que Johnny est au rock : une reprise pas toujours dans le coup.
Luc ou le cinéma pour les nuls
Mais ne soyons pas mauvaises langues : Le 5e élément a déplu aux Américains et il est devenu « culte » (selon la presse), et Besson a fait beaucoup d’argent avec Taken 1, 2 et 3 ou plus récemment Lucy (483 millions d’euros). La marque de fabrique bessonnienne, entre navets et blockbusters, c’est le scénar squelettique, conçu pour un public pas trop exigeant.
Son héroïne dans Valérian n’est pas une actrice mais un mannequin. Pas grave, car Cara Delevingne dispose de deux expressions : l’une avec un visage qui n’exprime rien, l’autre avec un visage qui n’exprime rien mais avec les sourcils froncés, ce qui indique une contrariété ou un danger. On n’incriminera pas les acteurs car c’est le scénario infantilisant et la réalisation plate qui limitent leur jeu. Dans d’autres mains, cette fadeur peut prendre des couleurs...
Luc dans GQ de juillet 2017 :
« Mon métier, c’est de raconter des histoires, alors je ne pouvais pas laisser passer cette fausse histoire qu’est le FN. D’ailleurs, lors du débat de l’entre-deux tours les masques sont tombés, ne restait que la haine. Les gens tentés par le FN sont des victimes abusées. [...] On n’a pas tous les mêmes niveaux de connaissances, moi-même je n’ai pas le bac, mais justement il faut prendre le temps de leur expliquer qu’on leur ment Et puis mon métier c’est le mensonge : si je mentais aussi dans la vie, à la fin je serais qui ? »
À ce niveau de comprenette, rien d’étonnant à ce que le scénario de Valérian soit déclaré insipide par les critiques américains :
« Les Razzies (qui récompensent les pires films chaque année, NDLR) n’ont pas besoin d’attendre la fin de l’année pour désigner le gagnant de 2017 », écrit l’un de ses critiques. Plus loin, le magazine américain [Hollywood Reporter] atomise l’intrigue qu’il qualifie d’« incertaine, ennuyeuse, indéfinissable, indigeste, et bientôt, un excellent sédatif. Quiconque serait capable de résumer ce qui se déroule dans ce scénario en 25 mots ou moins mériterait un petit prix. »
Les lauriers que Luc Besson a tressés dans GQ aux critiques cinéma américains, réputés « meilleurs » que les critiques français, n’auront servi à rien... De ce côté-là, c’est plié. Le film a fait un mauvais démarrage. De ce côté-ci de l’Atlantique, on ne peut pas décemment démolir Besson, qui représente la première puissance dans le domaine de la production. Alors on édulcore, on minimise, on euphémise... Pour les uns, Valérian est une espèce de Versailles d’inventivité – « un défilé de cartes postales intergalactiques » pour Le Monde –, pour les autres un sacré « pari » (économique) au niveau européen. Résumé : une prouesse technique autant que commerciale. Quant à la grâce, elle repassera.
Sans doute est-il question de sauver les survivants d’un génocide qui aurait décimé 6 millions d’âmes sur une planète semblant sortie d’une sorte de Mario Kart croisé avec My Little Pony.
Ah, une concession aux potentats d’Hollywood, tout de même. Et au lobby LGBT, avec la bisexuelle (sa grande qualité) Cara Delevingne, qui symbolise la parité entre acteur masculin et acteur féminin, pardon, actrice féminine. Et même une petite supériorité de la femme. Car Valérian est une ode au vivre-ensemble et aux minorités, comme Banlieue 13 avec ses tribus, qui seraient l’avenir. On sent le bon gros communautarisme bien vendeur pointer son nez. Luc, dans le GQ britannique, explique qu’il obéit bien à la loi du genre :
« Je pense que je porte la même attention aux femmes et aux hommes. Il est vrai que dans l’histoire récente, ces 50 dernières années au cinéma, c’était l’homme le héros et la fille qui pleurait sur le balcon. J’ai toujours pensé que c’était injuste. »
Une sacrée avancée !
Cara Delevingne, à part le cinéma, défile et parle de sa sexualité. Dans Paris Match le 30 juin 2017 elle définit son genre :
« Une fois que j’avais parlé de ma fluidité, les gens me disaient : "Ah donc tu es gay".Ce à quoi je réponds "Non, je ne suis pas gay". Beaucoup de mes amis hétérosexuels ont une façon de penser vraiment archaïque. Ils me disent : "Donc tu es bien homosexuelle ?" Ils ne comprennent pas. Si je leur dis "Il y a un garçon qui me plaît," ils me répondent "Mais, tu es gay". Je leur dis "Non, vous êtes vraiment pénibles !" Si quelqu’un est en couple avec une fille pendant un moment, ou si un garçon sort avec un garçon, je n’ai pas envie qu’ils soient étiquetés. Imaginez si j’épouse un homme. Est-ce que les gens diraient : "Elle nous a menti" ».
Voilà, on aimerait bien dire du bien d’un film de Besson, mais ce dernier ne nous facilite pas la tâche, en confondant cinéma populaire et cinéma pour incultes. Et puis, ce fatras de bien-pensance, ces six millions d’âmes, cette « actrice » porte-drapeau des LGBT, ce manichéisme gênant comme un pet monstrueux de ministre goy dans un dîner du CRIF en plein discours larmoyant du président (du CRIF), ces dangereux emprunts américains (à défaut d’être russes)... On espère, pour des raisons de soutien patriotique, que son film rentrera dans ses frais. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.