sur son île natale de Kos, en Grèce
La section Santé d’Égalité & Réconciliation réunit des professionnels actifs couvrant à peu près tous les secteurs de la santé (praticiens médecins ou non médecins, journalistes, auteurs, chercheurs) qui se donnent pour ambition d’être les sentinelles des dérives du système de soins moderne. La section Santé se veut aussi un outil pragmatique présentant des solutions concrètes pour rester en bonne santé.
« Se soigner », ou « être soigné », est une sorte d’invariant : nous y passerons tous. Vague à l’âme inconfortable, symptôme chronique invalidant au quotidien ou épreuve du diagnostic de la maladie dite « incurable », nous aurons tous maille à partir avec le concept de santé pris au sens large, la nôtre ou celle d’un être cher. Le passage est douloureux dans tous les sens du terme.
Douloureux physiquement, parce que ça fait mal, jusqu’à prendre parfois tout le champ de la conscience. Douloureux, parce qu’on prend de plein fouet ce que les sociétés de l’avoir ont fait de pire : rationnaliser et décortiquer la souffrance humaine afin de la rentabiliser. Douloureux, parce que ça coûte cher et que c’est de moins en moins bien remboursé. Douloureux, quand on constate l’échec retentissant de la médecine sur les pathologies neuro-dégénératives, les cancers, les maladies chroniques. Douloureux quand il s’agit d’un être cher, que nous devrions protéger et face auquel nous nous sentons démunis et impuissant. Douloureux, parce que les problèmes de santé engendrent, au pire moment de faiblesse et de doute, des questions angoissantes liées au sens de notre trajectoire humaine. Douloureux quand on se raccroche à l’espoir des « Progrès de la médecine » comme à une bouée de sauvetage pour remettre à demain le sentiment de notre propre finitude. Douloureux, parce que notre quotidien matérialiste a un peu renvoyé la mort-qui-fâche dans les contreforts de la conscience, au profit de l’illusion du jeunisme et de la performance à tout crins.
Le réveil est parfois un peu brutal.
Un accompagnement holistique suppose une grande disponibilité et une grande écoute. Il y a le symptôme, mais aussi la douleur et la souffrance des malades. Et en supplément, leurs prises de conscience successives. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que ces prises de conscience ne renvoient pas seulement à la connaissance de soi, mais qu’elles débordent aujourd’hui sur la compréhension des rouages qui régissent notre monde contemporain.
Voici quelques prises de conscience « types », pourrait-on dire, repérées au fil des réflexions des patients. Nous les avons observées se construire peu à peu, presque toujours teintées de sentiments de colère ou de trahison. La plupart du temps parcellaires, il arrive que ces prises de conscience s’étayent suffisamment pour devenir les étapes identifiables d’un cheminement logique, qui, en s’enchaînant les unes aux autres, mènent à une vision globale extrêmement lucide.
Étape 1 – Doute sur l’orthodoxie médicale « scientiste »
Le vernis de l’orthodoxie médicale, c’est la science, le progrès des Lumières, contre l’obscurantisme des méthodes non conventionnelles. « Ce n’est pas scientifique » est la petite phrase qui clôt en général le débat. Paradoxalement, cette fermeture, au-delà du mot qui fait très sérieux, révèle bien une attitude proche de la croyance et du dogme dans la bouche de ceux qui s’en gargarisent. Marisol Touraine a très bien illustré cette façon de faire, en coupant le sifflet du Professeur Joyeux avec son désormais célèbre : « La vaccination, ça ne se discute pas ! » Ah bon, vraiment ? « Pas très démocratique », avons-nous entendu, et pas très rationnel ! La science se discute justement, avec des hypothèses et des expérimentations qui normalement doivent confirmer ou infirmer l’hypothèse de départ. C’est en tout cas la définition de la méthode expérimentale de Claude Bernard, le père de la médecine moderne.
Un des tout premiers déconditionnements des malades passe donc par la récupération de leur esprit critique. Il ne suffit pas d’utiliser le mot « science » pour être rigoureux. En médecine, on peut d’ailleurs être parfaitement scientifique et n’avoir aucun résultat. Les patients voudraient pouvoir « discuter » avec leur médecin, d’une part de ce qui est logique ou vrai, d’autre part de ce qui fonctionne vraiment. Mais le dialogue n’est jamais facile face à une blouse blanche autoritaire et paternaliste. À défaut d’argument ou de résultat, l’autoritarisme est d’ailleurs bien la seule chose qu’il reste pour justifier dix ans d’étude difficiles. Beaucoup de malades choisissent de ne plus rien dire, mais n’en pensent pas moins. Les plus moqueurs disent avec un clin d’œil : « Il croit que c’est son traitement qui marche ! » Cela instaure un climat de non-dit fort regrettable pour l’intérêt de tous, en premier lieu pour le confort des malades.
Étape 2 – Doute sur les réelles compétences de la médecine
Car derrière les exploits techniques de pointe, et la modernité des appareils, la médecine hospitalière ne propose pas grand-chose au patient lambda. Molière en son temps se moquait des médecins qui ne disposaient que de la saignée et du lavement. Or nous n’en sommes pas si loin. Malgré la foison de marques, formes galéniques et génériques, qui peut donner l’illusion d’une grande richesse dans l’art médical, le panel des possibilités est finalement réduit : il existe le top ten des médicaments les plus prescrits, qui ressemble à un horizon stéréotypé infranchissable. Certains de nos patients jouent à « deviner » ce que leur médecin traitant va prescrire, avec un bon taux de réussite. C’est bien normal : le symptôme, toujours le même, appelle le même traitement, ou presque.
Si une molécule ne marche pas ? On en change ! C’est à peu près la seule inventivité. Ainsi, nous avons reçu nombre de femmes ayant en 10, 20 ou 30 ans essayé absolument tous les anxiolytiques et antidépresseurs du marché, souvent sans progrès notable d’ailleurs. Pareil pour les pathologies cardiovasculaires, où les patients ont l’impression que le médecin, devant sa table de mixage virtuelle, pousse les curseurs des classes de médicaments au petit bonheur la chance. Cela illustre bien le manque de compréhension des mécanismes globaux. Si la réflexion portait sur les causes du symptôme, qui sont multifactorielles, on aurait sans doute plus de variabilité. Mais la tendance est plutôt au rétrécissement de la liberté de prescription et à l’établissement de normes médicales. Ainsi certains patients hésitent à consulter : « Ai-je vraiment besoin de retourner voir mon docteur pour ça ? »
Étape 3 – Doute sur l’interventionnisme médical
Car ils repartent avec un traitement et une batterie de tests complémentaires, c’est quasi sûr. Désir de faire quelque chose pour son patient (les plus cyniques nous ont dit « matériel médical à rentabiliser ») ou aveu d’impuissance, le gaspillage d’analyses et la surmédicalisation sont la règle. D’ailleurs comment faire différemment dans le laps de temps si court de la consultation ?
Il existe des approches dites complémentaires, souvent tout autant symptomatiques, et heureusement parfois utiles. Mais cela a un coût. Combien de patients nous ont apporté les résultats de leur recherche de sensibilité alimentaires (environ 200 euros l’analyse non remboursée) ? Il y a certes un progrès : mieux vaut réfléchir à son alimentation, élément central d’une bonne santé, que de prendre des molécules chimiques à effets secondaires. Mais cette analyse vaut-elle vraiment son prix, quand on sait que les sensibilités varient beaucoup dans le temps ? Et quand on sait que la seule réponse à ce test sera l’éviction des substances suspectées pendant un an ? N’est-ce pas une demi-solution accessible seulement aux plus riches ?
Étape 4 – La logique capitaliste touche tous les secteurs
Ainsi nos clients découvrent que leur santé, leur souffrance, est un marché qui rapporte. On en parle sur BFMTV, on mise sur les secteurs innovants, on cherche le bon placement (« Naturalex, comme disait une économiste de la chaîne, est une valeur sûre qui surfe sur l’engouement du public pour le naturel »).
Les consommateurs que nous sommes participent à cela. Nous sommes un peu tous friands de nouveautés et sensibles aux effets de mode. Il faut juste garder à l’esprit que cette curiosité naturelle sera dûment exploitée, avec le label « bio » bien sûr ! Connaissez-vous le petit tabouret (environ 70 euros) à placer sous ses pieds aux toilettes pour respecter la physiologie de la défécation ? Avant cette remarquable innovation, on conseillait simplement le marchepied plastique de chez IKEA (3,99 euros), voire deux gros annuaires rassemblés dans une housse de tissu… On fait du shopping thérapeutique, on se passe les adresses sur les blogs, on consomme du produit, on compare les marques. Et, comme on peut le faire face au dernier gadget made in China qui encombre notre appartement, nos patients se posent parfois la question : « Ce traitement (cet objet) est-il vraiment utile, finalement ? »
Il serait plus noble d’intégrer notre équilibre corporel, émotionnel et mental comme base incontournable d’une bonne santé. Le symptôme qui signifie la rupture de l’équilibre serait pris pour ce qu’il est : le clignotant du tableau de bord dont il faut tenir compte, tout en faisant confiance en la capacité guérisseuse du corps. Repos, diète légère, introspection… Wait and see !
Étape 5 – Est-ce pour ma santé ou pour la santé des actionnaires ?
La majorité des patients sait désormais, depuis les gros scandales de ces dernières années et la parution de livres « grand public », que le lobbying tisse sa toile partout. C’est un maillage complet qui va du sponsoring (pardon, du « partenariat ») des universités à la presse professionnelle et aux grands congrès mondiaux en passant par les associations de malades. Il est de notoriété publique que les données scientifiques sont falsifiées, les chiffres tordus, les études choisies en fonction du message que l’on veut faire passer. Il s’agit bien de mensonge et de propagande, pour paraphraser les titres de la collection du journaliste scientifique Thierry Souccar.
Oui, les médicaments, ainsi que les compléments alimentaires naturels, sont un commerce lucratif. Constat désolant, mais conséquence prévisible, car il s’agit de compagnies privées et par définition non philanthropes. Car le « Capital » est intrinsèquement, par essence, non éthique : business is business ! Les malades s’insurgent : « Il n’y a pas de structures pour réguler tout ça ? » Vous voulez dire : à part la main invisible d’Adam Smith ?
Étape 6 – Les médecins prisonniers du système libéral
Bruno Toussaint, de la revue Prescrire, explique qu’il y a évidemment plusieurs niveaux de complicité des médecins. Il y a l’expert décomplexé qui se fait payer son article sans état d’âme sur une base tarifaire définie. Cela a le mérite d’être clair. Mais il existe aussi le spécialiste naïf qui croit pouvoir rester indépendant et garder son esprit critique, même en étant payé par l’industriel. Or nous savons que les conclusions des recherches scientifiques sont statistiquement quatre fois plus favorables à un industriel lorsque c’est lui qui les finance. Dans ce cas, le problème vient non pas des intentions du chercheur, mais bien de l’organisation de la recherche (on pourrait peut-être y voir une déclinaison particulière du syndrome de Stockholm…). Bien évidemment, des médecins sauvent des vies tous les jours. Les médecins qui travaillent humblement, en toute discression, avec dévouement, humanité et réussite existent bel et bien. Mais ce sont les ripoux et les naïfs qui prennent tout le devant de la scène, parce que produits et mis en avant par le système.
Certains médecins sont complices donc, mais tous sont victimes. Victimes, car pas plus bêtes que les autres, ils constatent dégâts, échecs et impasses. (Dominique Voynet avait révélé publiquement que les parents faisant le moins vacciner leurs enfants travaillaient dans le secteur médical !) Certains ont le courage de changer leur regard et leur pratique. C’est long et difficile, lorsqu’il faut se désenvoûter d’un conditionnement tenace. D’autres dépriment, le même genre de déprime que les agriculteurs prenant conscience qu’ils empoisonnent la population. La plupart mettent des œillères, courbent le dos et continuent… Ce qui a fait dire à une patiente souffrant d’une maladie chronique : « Des fois, je le plains mon docteur, il veut bien faire, ça se voit. »
Étape 7 – La collusion de l’État
On s’interroge : que fait donc la structure-pour-réguler-tout-ça ? On veut y croit encore un peu : le secteur public devrait avoir l’intérêt général et le bien de tous comme seules préoccupations. Vœu pieux malheureusement contredit par la collusion de plus en plus visible entre les acteurs politiques et les hauts cadres du secteur privé. On comprend que le politique et le monde des affaires étaient faits pour se rencontrer dans la société libérale qui est la nôtre : conflits d’intérêt en tous genres, parlementaires exerçant en même temps des fonctions d’avocats d’affaires, anciens ministres recyclés dans le privé (ou inversement, ce qui est pire).
Des structures d’État créées avec l’argent du contribuable, comme le Programme national nutrition santé (PNNS), servent d’outil de lobbying à des grands groupes agro-alimentaire (industrie laitière, céréalière, etc.). Ainsi, la falsification scientifique à des fins mercantiles est aujourd’hui « couverte » par l’État. Le PNNS a été analysé par la Cour des comptes comme coûteux et relativement inefficace en matière de prévention santé. Cela se voit trop et les conclusions deviennent inévitables. Le grand public, sur le qui-vive car touché dans sa chair, se demande si la santé de tous et les économies du contribuable sont vraiment la préoccupation principale de ministère du même nom.
Étape 8 – Mais qu’est-ce qui nous rend donc tous malades ?
Après la colère du dévoilement du dessous des cartes, nos patients passent à l’amertume du constat d’impuissance. Car malheureusement, les conséquences ne s’arrêtent pas à une question de gros sous. Nous abordons une crise sanitaire mondiale, grave, dont la population et surtout les générations futures font déjà ou feront les frais. Aujourd’hui, ce sont des maladies non infectieuses, non transmissibles, qui sont la principale cause de mortalité dans le monde. Or, qu’est-ce qui a changé depuis l’après-guerre ? Les modes de production, les cultures intensives, et les habitudes de vie. C’est bien le mode de vie occidental qui est en cause, à tel point qu’on parle du cancer, comme de « la maladie du PIB ».
Par réaction en chaîne, l’alimentation a radicalement changé, elle aussi. En effet, notre alimentation moderne, dans son écrasante majorité, provient de l’agriculture intensive. Les aliments sont pauvres et dévitalisés (épuisement des sols) et dénaturés (matières premières hybrides, aliments transformés…). Elle inclut l’utilisation des OGM et par voie de conséquence la dépendance aux pesticides. Toutes ces molécules se retrouvent dans notre alimentation, et viennent alourdir la note des pollutions en tout genre (xénobiotiques, perturbateurs endocriniens, métaux lourds…) responsables d’un véritable empoisonnement de la population.
D’autres dégâts sont imputables à la crise libérale mondialisée. Car bien évidemment, la santé dépend aussi d’une écologie psychique, du stress et des conditions sociales. Le contexte de crise creuse de plus en plus les inégalités sociales entre les plus riches et les plus pauvres. Ainsi, le climat d’insécurité lié à la précarité de l’emploi, au chômage ainsi que la perte de cohésion du tissu social de solidarité affectent les plus démunis. Le concept d’espérance de vie en bonne santé (sans incapacité) est parfaitement corrélé aux inégalités sociales. Qui peut encore prétendre que nous sommes égaux face à la santé ?
Étape 9 – Cela ne peut pas continuer comme ça... mais que faire ?
De fil en aiguille, les patients réalisent que nous sommes bel et bien à un tournant critique pour l’humanité. Une crise écologique sans précédent qui se décline en 4 aspects majeurs : crise sanitaire mondiale, chute de la biodiversité, épuisement des ressources naturelles et dérèglement climatique. Les conséquences de cette crise globale et intergénérationnelle sont impossibles à prévoir, et la survie de l’humanité n’est même pas garantie ! Le véritable enjeu est de nature politique, car la résolution de cette crise écologique implique une réforme radicale de l’organisation et de la réglementation de l’activité économique mondiale. Nous avons donc un problème !
Les maladies contemporaines sont des maladies dites de « civilisation », cette même civilisation qui sous-tend le modèle économique actuel. Si nous voulions infléchir la tendance, il faudrait donc changer de braquet. Or, ce changement pénaliserait le système qui fait gagner plus d’argent aux plus riches. Notre défi contemporain implique de compter avec la mondialisation, qui n’a que faire de l’intérêt général et ne raisonne qu’en termes de profit. Nous avons donc à nouveau un problème !
Étape 10 – Moi en tout cas, je ne vais plus à Auchan !
La majorité des patients souhaitent passer à l’action. Car à notre échelle individuelle, nous pouvons toujours agir : circuits court, réseaux de solidarité, ré-information citoyenne, etc. Le film Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent est un bon exemple. C’est une réponse constructive à la parution en 2012 dans la revue Nature de cet article percutant démontrant que l’espèce humaine est en voie de disparition. Mais quelques-uns seulement sont conscient de l’échelle de grandeur de ces solutions alternatives : les monnaies complémentaires, par exemple, sont une goutte d’eau dans le désert aride du système bancaire mondialisé. Et peut-être sont-elles tolérées par le système, justement parce qu’elles sont globalement insignifiantes. Le film lui-même expose cet aveu d’impuissance. Malgré la beauté du processus démocratique en Islande et les espoirs citoyens suscités, depuis plus de quatre ans maintenant la situation est verrouillées… par les institutions ! Les mouvements de « résistance » citoyens qui fleurissent sont pour l’instant sans grands effets sur le fonctionnement économique et politique global, si ce n’est la prise de conscience d’une partie de la population.
Étape 11 – Les élus représentent-ils toujours le peuple ?
Alors que beaucoup s’arrêtent à l’étape 10, d’autres vont plus loin et s’interrogent sur notre démocratie. La belle définition d’Abraham Lincoln, « un gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple », leur semble aujourd’hui une nostalgie poétique quand les valeurs démocratiques d’égalité et de solidarité entre les citoyens sont malmenées et les acquis du CNR, symbole d’une économie basée sur un service public fort, fortement menacés. Aujourd’hui on comprend de plus en plus que dans les faits, marchés financiers et Constitution européenne non démocratique usurpent le pouvoir de la Ve République en permettant à la classe dirigeante de s’affranchir du consentement citoyen. La question de la légitimité démocratique et de la souveraineté populaire , bien enterrée avec nos 55 % de NON lors du référendum du 29 mai 2005, reviennent sur le devant de la scène avec de douloureuses interrogations : qui se fait écho de la voix du peuple aujourd’hui ?
C’est très inquiétant pour le malade, qui comprend que la notion d’utilité publique est centrale pour faire face à cette crise. Sans régulation, le capitalisme joue avec le feu. On parle par exemple du concept d’« ignorance toxique », c’est-à-dire l’autorisation faite à la mise sur le marché de substances non encore évaluées. De sorte que nous ne pouvons sérieusement calculer l’espérance de vie des bébés nés aujourd’hui : on ne sait tout simplement pas calculer l’impact de ses molécules sur la santé de ceux qui y ont été et qui y seront de plus en plus confrontés.
Étape 12 – Qui tient les manettes du politique ?
Ainsi, nous entendons parfois les termes de « régime oligarchique mondialisé » ou « puissance de la Banque mondiale ». Termes peut être difficilement définissables par nos patients, mais le sens global est compris : il s’agit bien du partage des pouvoirs économique, politique et médiatique d’une minorité qui s’arroge le droit de décider pour la collectivité. Nos patients savent illustrer leurs inquiétudes par l’exemple concret du traité de libre-échange transatlantique (TTIP), aux conséquences tout à fait assimilées : la remise en cause dangereuse des lois européennes en matière d’environnement et le principe de sécurité alimentaire (bœuf aux hormones, viande d’animaux clonés, OGM…). C’est en outre un mécanisme permettant aux grandes entreprises d’intenter des poursuites agressives contre les États eux-mêmes, dès lors qu’ils gêneraient leur expansion. Dur renversement de perspective : le criminel inconscient impose sa loi, et le gendarme est un acteur d’opérette.
Il y a les gagnants du système (ceux qui s’enrichissent ou qui tirent des bénéfices du système), et les perdants (ceux qui le subissent sans pouvoir rien faire, c’est-à-dire grosso modo « nous »). En clair, l’austérité n’est pas pour tout le monde. Le système actuel profite au 1 % de la population mondiale, qui possède 50 % des richesses mondiales. Comme dit Waren Buffet, l’un des hommes les plus riches du monde : les 1 % ont gagné la lutte des classe ! Si gouverner, c’est assurer la sécurité des personnes (principe de précaution) et la sûreté des biens (nos actifs bancaires !), nous pouvons sérieusement nous poser la question de savoir si nous sommes bien gouvernés et par qui…
Ainsi nombre de nos patients ont en quelques années changé radicalement leur regard non seulement sur notre système de soin, mais surtout sur le type de société qui le met en place. Affûter sa conscience politique dans ses conditions ne se fait pas sans douleur. D’abord vécue dans sa chair, cette « crise de foi » isole des autres également. Car malheureusement, elle ne sera vraiment comprise que par des personnes ayant elles-mêmes effectué un parcours similaire. Il faut avoir expérimenté cette réalité tangible incontestable, par le déni d’abord, puis par le non-choix ou la contrainte, pour passer du concept abstrait – sur lequel on peut gloser à loisir – à la compréhension intime du phénomène. Cette prise de conscience se fait à rebours de la pensée dominante véhiculée par les médias au garde-à-vous face à une classe politique en réalité unifiée. Force est de constater que les détails du TTIP ou l’analyse de la BRRD (Directive sur le redressement et la résolution des crises bancaires) sont rarissimes dans les réseaux médiatiques habituels, où au contraire toute forme de contestation est assimilée à une dérive complotiste (la dérive sectaire ne fait plus recette !). Ainsi coincés entre une colère légitime et une étiquette usurpée, ne sachant plus où porter leur combat, certains ont choisi de jeter l’éponge et se retirent du monde dans une yourte, ou une ferme en Ardèche.
Gardons espoir et vision d’avenir pour nos enfants. Soyons les PDG de notre petite entreprise corporelle. Évitons les investissements à court terme et risqués (nouveau médicament innovant ou chirurgie mutilante) et cherchons à reproduire une façon de vivre qui nous rende à la fois heureux et en bonne santé.
Mens sana in corpore sano !
Après cette introduction générale, la section Santé d’E&R se penchera dans son prochain article sur le chaînon nutritionnel manquant du XXe siècle (et comment y remédier au XXIe !).
* Les pratiques non conventionnelles sont des techniques qui ne sont ni validées ni enseignées dans le système de soin moderne occidental. Elles sont utilisées à la fois par des médecins et des non-médecins.