Le gouvernement de centre-gauche slovène, en place depuis six semaines seulement, prépare fiévreusement un plan d’action pour éviter un recours à une aide internationale, alors que la pression des marchés augmente sur le petit pays de la zone euro.
Le Premier ministre Alenka Bratusek doit livrer la semaine prochaine à Bruxelles un programme détaillé de réformes visant à assainir le système bancaire, stabiliser les finances publiques et relancer une économie entrée en récession en 2011.
L’exercice, déjà difficile, s’est encore compliqué après la relégation mardi de la note souveraine du pays dans la catégorie "spéculative" par l’agence de notation Moody’s.
L’annonce a fait l’effet d’un couperet et contraint le pays balkanique à suspendre provisoirement une émission obligataire en dollars, de peur de voir les investisseurs lui demander des taux d’intérêt trop élevés.
En avril, la Commission européenne a pressé Mme Bratusek de mettre en œuvre rapidement les réformes votées par l’ancien gouvernement et d’introduire de nouvelles mesures. Elle a promis de lui présenter ce plan le 9 mai.
Le secteur bancaire, qui croule sous les créances douteuses - sept milliards d’euros, soit 20% du Produit intérieur brut (PIB) selon le Fonds monétaire international - est le problème numéro un de la Slovénie.
Selon Moody’s, le gouvernement va devoir encore injecter de nouveaux fonds dans les banques, en grande majorité publiques, représentant entre 8 et 11% du Produit intérieur brut (PIB) du pays. Et pour cette agence, la probabilité que la Slovénie ait besoin d’une aide internationale a augmenté.
Le gouvernement slovène de centre-droit, tombé en février après des soupçons de corruption contre le Premier ministre Janez Jansa, avait fait voter une loi créant une "bad bank", structure de défaisance devant rassembler les actifs toxiques des banques.
Situation différente de celle de Chypre
Dans le plan d’action, dont certaines mesures ont déjà été dévoilées par Mme Bratusek, cette "bad bank" doit entrer en vigueur en juillet. Les trois principales banques du pays, toutes publiques, auront besoin d’une recapitalisation d’au moins 900 millions d’euros d’ici à la fin de l’année, selon ses estimations.
Même si les spéculations contre ce pays de 2 millions d’habitants issu de l’ex-Yougoslavie ont redoublé après le sauvetage de Chypre, la situation des deux États diffère fortement.
"La Slovénie n’est pas Chypre. Les comparaisons sont complètement fausses et ignorent les fondamentaux économiques", avait expliqué mi-avril Alenka Bratusek, dans une tribune au Wall Street Journal.
Le secteur bancaire ne constitue que 130% du Produit intérieur brut (PIB), alors que le secteur bancaire chypriote représente 800% du PIB de l’île.
Certes les finances publiques se sont dégradées. En 2012, le déficit public slovène s’est élevé à 3,7% du PIB, et le gouvernement table désormais sur 5,0% de déficit cette année.
Mais l’endettement total du pays, s’il augmente rapidement, reste bien en-dessous de la moyenne européenne. Il s’est établi à 54,1% du PIB en 2012 selon l’institut Eurostat, contre 90,6% pour la zone euro.
Pour stabiliser le budget, le plan d’action prévoit de nouvelles coupes dans les salaires de la fonction publique, une augmentation de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ou encore la création d’un "impôt de crise" temporaire qui toucherait l’ensemble des citoyens.
Une ou deux entreprises publiques devraient également être privatisées, dont une banque, d’ici à la fin de l’année.
Mais le plan est critiqué dans le pays, certains y voyant un simple recyclage des mesures de l’ancien gouvernement.
Le programme est "beaucoup plus celui de Jansa, que celui de Bratusek", indique à l’AFP le professeur d’économie de l’Université de Ljubljana, Maks Tajnikar. "Il s’agit toujours d’un plan d’austérité, qui est suicidaire selon moi, mais Bratusek visiblement n’ose pas opérer un changement par rapport à ce qui a été fait en Europe", ajoute-t-il.
Récemment, la Slovénie est parvenue à placer des titres à court terme à des taux raisonnables, ce qui lui avait permis de souffler un peu. Mais c’était avant la dégradation de Moody’s. Le prochain test sera son émission obligataire en dollars, interrompue mardi mais qui a repris dès le lendemain et qui pourrait être bouclée vendredi.