(Suite) Réné Guénon - La crise du monde moderne
une base appropriée : c’est l’Église catholique. Il suffirait de restituer à la doctrine de
celle-ci, sans rien changer à la forme religieuse sous laquelle elle se présente au
dehors, le sens profond qu’elle a réellement en elle-même, mais dont ses
représentants actuels paraissent n’avoir plus conscience, non plus que de son unité
essentielle avec les autres formes traditionnelles ; les deux choses, d’ailleurs, sont
inséparables l’une de l’autre.
R. Guénon, la crise du monde moderne
Ce serait la réalisation du Catholicisme au vrai sens du
mot, qui, étymologiquement, exprime l’idée d’ « universalité », ce qu’oublient un peu
trop ceux qui voudraient n’en faire que la dénomination exclusive d’une forme
spéciale et purement occidentale, sans aucun lien effectif avec les autres traditions ;
et l’on peut dire que, dans l’état présent des choses, le Catholicisme n’a qu’une
existence virtuelle, puisque nous n’y trouvons pas réellement la conscience de
l’universalité ; mais il n’en est pas moins vrai que l’existence d’une organisation qui
porte un tel nom est l’indication d’une base possible pour une restauration de l’esprit
traditionnel dans son acception complète, et cela d’autant plus que, au moyen âge,
elle a déjà servi de support à cet esprit dans le monde occidental. Il ne s’agirait donc,
en somme, que d’une reconstitution de ce qui a existé avant la déviation moderne,
avec les adaptations nécessaires aux conditions d’une autre époque ; et, si certains
s’en étonnent ou protestent contre une semblable idée, c’est qu’ils sont eux-mêmes,
à leur insu et peut-être contre leur gré, imbus de l’esprit moderne au point d’avoir
complètement perdu le sens d’une tradition dont ils ne gardent que l’écorce.