Jouer de la malchance est un métier, un art, de la philosophie !
L’un des trublions de la vie française, « gauchiste » selon ses bons amis, vient de disparaître. André Glucksmann, l’homme aimé des médias pour ses coups de gueule, est mort. Quelle a été sa vie ? À part sa colère d’origine, il y a toujours quelque chose de mauvais quelque part, sinon en l’homme, dans de foutues idées d’abolition du salariat, il n’y a pas grand-chose à en dire. Aucune œuvre ni politique ni littéraire ne lui survivra. C’était un esprit simple. Micro soldat moine à plateau. Une sorte de santon. Considérant que chacun a sa propre idée du bien, et en effet chacun dispose d’un corps, heureux à qui l’amour a fait ce legs, son enfance fut bonne, seul le mal, et plus particulièrement le Mal absolu qui lui aussi chantonne dans sa salle de bain, l’absolu Dior j’adore, le luxe, il ne le hait point, peut, selon lui, le Mal, Glucksmann, sinon unir réunir le pape, les chefs d’état et de gouvernement européens, les flics et les juges de l’anti-terrorisme, les journalistes en vue et les défenseurs du « suicide », du « déclin » et du « gâchis français », le prix Nobel d’économie auvergnate et son tuyau de bookmaker : couper le robinet de la dépense publique, que le tigre soit castré et qu’il loue le marché, sans oublier le pack de sportifs, de végétariens, de plombiers et bien sûr de ménagères qui rêvent d’un grand nettoyage. Bref tous ceux qui, au-delà de leurs différences, au fond, petites, ont intérêt sinon des intérêts communs, à avoir peur de l’avenir non tiré des cartes, même si pipé, biseauté, trafiqué et donc, en dernière analyse, l’avenir fabriqué, jour après jour, par leurs soins, mais dont ils refusent énergiquement la paternité. Le mal c’est pas eux ! Absolument ! L’enfer, c’est les autres ! Tout à fait ! Le Mal est sparadrap infernal. Oh Dédé ! Comme ton imagination ad hoc est fulgurante !