Une excellente mise au point de Thierry Meyssan, décidément un penseur éclairant pour notre temps. Pour comprendre le rapport entre le religieux et le politique dans le monde arabo-musulman, je conseille La Grande Discorde : Religion et politique dans l’Islam des origines, de Hichem Djaït, un grand classique, ou encore, L’Éclosion de l’Islam de Rochdy Alili. On y découvre, oh surprise, que le religieux n’a joué qu’un role annexe dans la première vague d’expansion de l’Islam. Il s’agissait, pour l’essentiel, de la conquête de la Péninsule arabe, puis de la Syrie, puis de l’Anatolie, et du Maghreb, par une confédération de tribus arabes, qui profitèrent pour cela de la guerre entre Byzance et la Perse. Le fait que l’union de ces tribus, qui avaient à l’origine chacune leurs dieux mais s’arrangeaient déjà pour que ces dieux vivent en paix à la Mecque, se soit faite sur la base d’un monothéisme inspiré par le judaïsme (le paradigme de la descendance d’Ismaël) et le christianisme (arien et nestorien) était secondaire à ce stade. La conquête arabe ne se distinguait pas fondamentalement de celle des Huns, par exemple : les arabes n’ont aucunement cherché, durant un siècle, à convertir les peuples conquis, mais simplement à les exploiter (et d’ailleurs les conquêtes faisaient suite à des années de razzias). Ces Arabes voyaient leur religion comme la religion des Arabes, sans plus. L’organisation politique sur des bases dynastiques et tribales était similaire à celle de tous les autres conquérants. Cela dit, il est certain que les Arabes ont eu un sens politique bien supérieur aux Huns, et que leur monothéisme, qui a permis par la suite d’absorber entièrement les Syriens, Berbères, Perses, Turcs, etc, a été décisif pour transformer cette conquête en civilisation.