Cette analyse prospective me laisse un goût mitigé. LEAP 2020 table sur des turbulences transitoires au sein de l’Eurozone (celles que nous sommes en train de traverser) débouchant sur un renforcement de la monnaie unique perçue par le reste du monde comme la seule alternative viable à un Dollar US moribond.
Cette prédiction se focalise sur les aspects financiers (monnaie et dette publique) mais elle passe sous silence les aspects économiques (croissance, balance commerciale).
Les plans d’austérité induits par les dettes publiques de la plupart des pays européens vont indubitablement entraîner récession puis déflation. Nous en sentons dors et déjà les prémices (gel des salaires, rétrécissement de l’état-providence, inéluctable hausse des impots, etc).
Dès lors, si d’un point de vue financier l’Eurozone présente une carrosserie plutôt saine comparée à l’épave américaine, ce véhicule est pour autant dépourvu de carburant.
L’économie européenne est fortement tertiarisée et hormis de rares secteurs dits "de pointe" elle ne peut ex-nihilo se réinventer un destin industriel suffisamment ambitieux. Les BRICS (surtout la Chine et l’Inde) lui dament déjà le pion dans bien des domaines.
La seule issue serait de fortement réduire les salaires pour rivaliser avec la main d’œuvre bon marché asiatique. Cumulez réductions salariales et démantèlement total de l’état providence, rajoutez à cela un soupçon d’immigration et une bonne rasade de corruption des élites : vous avez là un cocktail détonant qui réduit à néant le retour en grâce de l’Eurozone tel que prévu par LEAP 2020.
Plus que jamais, je suis persuadé que notre planche de salut réside dans la fin de l’Euro et dans le retour à un protectionnisme bien senti. Cette une voie qui n’est pas sans danger, mais elle a le mérite de nous laisser maîtres de notre destin.