Dix siècles ensemble : 1 000 ans de relation franco-russe
1er novembre 2024 09:01, par Mathieu ClémentComme quoi on ne voit pas le monde tel qu’il est, mais tel que l’on est soi-même.
Faire appartenir les Romanov à la dynastie des rurikides est assez semblable à faire appartenir les Bourbons à la dynastie des Valois. La numismatique nous renseigne que les Valois et les Bourbons n’avaient pas le même profil. Ne pas souligner la rupture, en affirmant, par exemple, qu’Ivan IV le Terrible fut le dernier Rurikide, fait l’impasse sur le Temps des Troubles, et sur le règne du Tsar Basile Shouïsky, un rurikide, entre 1606 et 1610, qui finit sa vie en captivité polonaise pour avoir préféré l’alliance suédoise à l’alliance polonaise, et cela fait l’impasse sur la signification du bref passage de Henri Iii, dernier des Valois, sur le trône polonais à Cracovie.
Se désoler que la France resta seule face en 1870 face aux teutons c’est faire l’impasse sur le traité de non agression germano-russe, colonne vertébrale du système du chancellier Bismarck, qui ne pouvait garantir la neutralité de l’Empire Russe que s’il était attaqué, ce qu’il obtint grâce à la tristement célèbre dépêche d’Ems, pour venir finalement former l’unité allemande à Versailles, en laissant la capitale à la Commune, tout en étant à Ferrières. Les officiers supérieurs de l’armée prussienne reçurent la croix de Saint-Georges deuxième classe, ce qui indique une certaine permanence de la sainte-alliance. Les mémoires du chancellier von Bülow, jeune hussard en 1870, sont instructifs.
Evidemment, loger 1000 ans en une demi-heure, cela suppose un choix de pas japonais, des sauts par dessus ceux où l’on préfère ne plus faire un pas, ni même un pas décalé.
Passer d’Ivan le Terrible mort en 1584, avec des taux stratosphériques de mercure dans le sang, directement et sans transition au premier Romanov intrônisé en 1613, c’est peut-être ne pas comprendre pourquoi son père passa directement en 1619, des geôles polonaises à Moscou pour y prendre la tête de l’Eglise Orthodoxe Russe en qualité de Patriarche en en coupant pas mal chez les tenants de l’alliance suédoise.
Ce serait presque à se demander l’intérêt qu’il y a à négliger le rôle de la Pologne pendant ces trente ans cruciaux, ou qu’il y a à ne pas se demander pourquoi Jacques Clèment périt, un peu comme Lee Harvey Oswald, avant que le sang de Henri III sur sa dague ait séché.
Moscou, Paris valurent-elles une bonne messe ? vertueuse ?