Mais, surtout, il trahit la frustration de millions d’Espagnols face au chômage qui atteint un taux record de 21,19% et frappe près de la moitié des moins de 25 ans, aux coupes salariales, et aux retombées de la crise économique.
Le mouvement, à la veille du week-end électoral pendant lequel toute manifestation politique est interdite, place le gouvernement en position délicate, l’obligeant à choisir entre la méthode policière, très risquée, ou une souplesse qui ne manquerait pas de lui attirer des critiques.
"Nous allons appliquer la loi pour garantir les droits et la liberté de l’ensemble des citoyens", a déclaré le ministre de l’Intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba, refusant de répondre à la question d’une éventuelle évacuation.
Dans la nuit, la Commission électorale avait déclaré illégaux les rassemblements prévus samedi et dimanche.
Le chef du gouvernement, José Luis Rodriguez Zapatero, a alors assuré que le gouvernement ferait preuve de "compréhension", qu’il "agirait correctement, de manière intelligente".
A 00H05 samedi, les manifestants de la Puerta del Sol ont appelé la foule à se figer symboliquement dans un "cri muet", un morceau de ruban adhésif collé sur la bouche.
Autour du campement se regroupent chaque soir des milliers de personnes, encadrées par une présence policière restée jusqu’à présent visible mais très discrète, en dépit de la foule qui grossit de jour en jour.
Le mouvement, dans des proportions moindres, a gagné la plupart des villes d’Espagne. Et en quelques jours, il s’est structuré.
Un camp de bâches en plastique montées sur des structures en bois et de tentes de camping a surgi autour de la fontaine de la Puerta del Sol, avec des "stands" consacrés à la cuisine, l’accueil, les soins médicaux, et aussi la communication où de tout nouveaux "porte-parole" tentent d’affiner le message, parfois flou, des contestataires.
Chaque jour, les jeunes qui passent la nuit dans le camp sont rejoints au matin par une foule de sympathisants, dont beaucoup de retraités, qui viennent écouter, débattre, apporter de la nourriture et aider.
Face à ce succès grandissant, les porte-parole du mouvement n’excluent plus de le poursuivre au-delà de dimanche. "Des assemblées vont se réunir, et décider", expliquait Juan Lopez.
Dans la file d’attente devant le stand où l’on peut venir signer la pétition de soutien, Maria-Jesus Garcia, une fonctionnaire de 40 ans, racontait vendredi être venue "à cause du chômage. Surtout celui des jeunes".
"Je vais lire la pétition, et je vais signer", disait-elle. "Mais ils doivent continuer après les élections. S’ils s’arrêtent, cela n’aura servi à rien".