En adoptant, à une courte majorité, un article introduit par la droite, le Sénat est revenu sur le dispositif qui permet aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins. Il le remplace par une « aide médicale d’urgence », concentrée sur les maladies graves.
Le débat sur l’aide médicale d’urgence (AME) s’est invité dans les débats sur le projet de loi asile et immigration du Sénat. Ce dispositif, qui permet aux étrangers en situation irrégulière, qui en font la demande, d’accéder à des soins (à condition de résider en France depuis plus de 3 mois et de ne pas dépasser un certain niveau de revenus), est dans le viseur de la droite depuis plusieurs années, qui veut le recentrer uniquement sur les soins d’urgence.
Au troisième jour de l’examen du texte, les sénateurs ont adopté ce jeudi soir l’article 10AA, transformant l’aide médicale d’État en une « aide médicale d’urgence ». Avec une courte majorité. 144 sénateurs ont voté en faveur de la mesure, 137 contre, et 62 se sont abstenus. La mesure n’a pas fait l’unanimité, puisque par exemple le président (LR) de la commission des Affaires sociales Alain Milon s’est prononcé contre. Le groupe LR s’est surtout retrouvé isolé, lâché par ses alliés de l’Union centriste mais des Indépendants – l’équivalent des « constructifs » au Sénat – qui ont préféré s’abstenir.
La nouvelle aide serait prévue dans quatre situations
La modification avait été introduite en commission des Lois par le sénateur Roger Karoutchi. Cette nouvelle aide offrirait une prise en charge uniquement dans le traitement des « maladies graves et des douleurs aiguës », les vaccinations réglementaires, les soins liés à la grossesse ou encore la médecine préventive.
Les deux groupes de gauche, le RDSE (à majorité radicale) et le groupe La République en marche, de même que le gouvernement, ont tenté de faire adopter chacun, en vain, un amendement supprimant l’article. La sénatrice communiste Laurence Cohen a dénoncé une mesure « extrêmement grave » et une « atteinte aux acquis sociaux et aux droits des étrangers malades ».
« Une vieille lune » de la droite
Le sénateur LREM Richard Yung a, lui, parlé d’un article d’ « injuste » et « presque cynique ». « C’est une vieille lune, une sorte de marotte » de la droite, s’est-il exclamé, faisant référence aux débats budgétaires chaque année, au cours desquels la droite sénatoriale tente de réduire les crédits de l’AME.