Le décret est sans ambiguïté : « La république du Haut-Karabakh cesse d’exister. » Après leur défaite en 24 heures face à l’offensive azerbaïdjanaise, les autorités de la république séparatiste autoproclamée du Haut-Karabakh ont annoncé son auto-dissolution le 1er janvier prochain. Ce territoire majoritairement peuplé d’Arméniens enclavé au sein de l’Azerbaïdjan avait fait sécession il y a plus de trente ans à la chute de l’URSS ; il réintègre maintenant le territoire dont il a toujours fait partie au regard du droit international.
L’Arménie, qui n’est pas intervenue lors de cette dernière attaque sur le Haut-Karabakh, dénonce un nettoyage ethnique. L’Azerbaïdjan n’a cependant pas besoin d’intervenir directement en ce sens, les départs d’Arméniens se faisant d’eux-mêmes. Plus de la moitié des 120 000 habitants de l’ancienne enclave ont fui en quelques jours, craignant les représailles, même si Bakou avait promis le respect de leurs droits.
Manquant de moyens, le gouvernement arménien n’a pour l’heure relogé que moins de 3 000 personnes, soit une infime partie des nécessiteux, ce qui laisse présager une crise humanitaire sans aide de l’étranger. D’autant que les arrivées ne vont pas cesser de sitôt. Comme les choses se passent, la présence arménienne au Haut-Karabakh pourrait bientôt n’être plus que relictuelle, sinon nulle.
L’Azerbaïdjan réfute bien sûr les accusations de nettoyage ethnique. Non seulement il a été dit que les habitants étaient libres de rester ou partir, mais maintenant qu’ils partent en masse, ils sont appelés à demeurer chez eux. Le gouvernement les invite à « faire partie de sa société multiethnique » et se dit prêt à l’organisation d’une visite de l’ONU.
Il y aurait aussi des « arrestations illégales » à la frontière auprès de ceux qui ont choisi de rejoindre l’Arménie. Les habitants mais aussi les combattants ayant déposé les armes sont libres de partir, mais les personnes recherchées et faisant l’objet de poursuites judiciaires sont arrêtées par les gardes frontières.
De son côté, la Russie, qui s’est de fait rapprochée de l’Azerbaïdjan pour des questions économico-stratégiques, et est accusée par l’Arménie de ne pas avoir pleinement joué son rôle d’interposition dans ce conflit, et maintenant d’avoir permis le cesser-le-feu ayant entériné la défaite des séparatistes, ne voit pas dans cet exode un nettoyage ethnique.
Voilà qui ne va pas réconcilier Erevan de Moscou. L’Arménie poursuit sa démarche de rapprochement de la sphère occidentale et a décidé de rejoindre la Cour pénale internationale, celle-là même qui a émis un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine et que Moscou ne reconnaît pas. Une décision jugée « inamicale », de la part du Kremlin, qui espère toutefois « que ces décisions ne vont pas avoir d’impact négatif sur [leurs] relations bilatérales ».