À la suite du référendum en Crimée qui a vu cette région de l’Ukraine demander son rattachement à la Russie, Laurent Fabius s’était lancé dans des menaces sur la livraison de deux porte-hélicoptères de classe Mistral à la marine russe.
« Si Poutine continue ce qu’il fait, nous pouvons envisager d’annuler les ventes », a lancé lundi, très imprudemment, le chef de la diplomatie française, habitué aux sorties tonitruantes et grotesques.
Depuis, le gouvernement a fait marche arrière en informant par la voix du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, que « la livraison du premier bâtiment a lieu au mois d’octobre, donc la question de la suspension se posera au mois d’octobre ».
Quelques mois pour faire oublier les propos de l’encombrant patron du Quai d’Orsay, mais qui n’ont pas échappé aux officiels russes :
« Notre collègue [Laurent Fabius] n’est peut-être pas au courant du nombre d’emplois créés en France grâce à notre partenariat. La France commence à trahir la confiance qu’on place en elle comme fournisseur fiable. Remplissez vos obligations contractuelles et livrez les navires dans les délais prévus ou rendez-nous notre argent et les poupes de ces navires, assemblées sur nos chantiers navals de la Baltique ! », a déclaré le vice-Premier ministre russe Dmitri Rogozine.
Les porte-hélicoptères BPC Mistral sont des bâtiments de projection et de commandement qui assurent les fonctions de transport, état-major, débarquement et soins. La Marine nationale en possède trois : le Mistral, le Tonnerre et le Dixmude, basés à Toulon.
Un contrat d’une valeur de 1,2 milliard d’euros pour la construction de deux porte-hélicoptères de classe Mistral a été signé entre Paris et Moscou. Ces navires sont en cours de construction dans les chantiers STX à Saint-Nazaire, sous-traitants de la DCNS, permettant la création de 1 000 emplois à temps plein pour quatre ans.
Les deux navires s’appellent Vladivostok et Sébastopol, le premier doit être livré à la marine russe à la fin de cette année, le second en 2015.
Si la France s’aventurait à rompre ce contrat, elle en subirait de graves conséquences en termes de crédibilité et en termes financiers. La Coface (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur) devrait ainsi verser jusqu’à 1 milliard d’euros aux autorités russes.
Le Groupe unifié de construction navale russe (OSK) a déclaré être en mesure de réaliser elle-mêmes ce type de navire :
« Si les partenaires français renonçaient à tenir leurs engagements, nous pourrions construire nous-mêmes ce navire – nous avons déjà reçu la majeure partie des documents sur le Mistral. Si les Français rompaient le contrat et refusaient de nous rendre l’argent alors ils perdraient leurs droits sur ces documents. Nous pourrions donc construire ces navires par nos propres moyens, si la marine était toujours intéressée par ce projet. La conception demandera près de deux ans, le Mistral n’a rien de complexe – c’est une barge avec un moteur et un dock pour les hélicoptères et les chars. Après l’approbation du projet, la construction nécessitera près de 18 mois. »
Pour l’avenir des relations franco-russes, la crédibilité de la parole de notre pays et pour la préservation de l’emploi en Loire-Atlantique, espérons que cette affaire ne soit qu’une énième outrance verbale d’un ministre incompétent, dont on ne peut que souhaiter la retraite de la vie politique, à l’issue du remaniement post-défaite électorale.