La publication des bans a lieu aujourd’hui : dans son dernier numéro, le Nouvel Obs confie sa rédaction en chef à Daniel Cohn-Bendit. Sous prétexte de Copenhague. Mais oui, c’est ça…
Le Nouvel obs avancerait-il masqué ? Sous prétexte de proposer à ses lecteurs un « numéro spécial Copenhague », voilà que l’hebdo décide de confier à Daniel Cohn-Bendit la rédaction en chef du magazine paru aujourd’hui. Donner les manettes d’un canard à un people ? Rien de nouveau sous le soleil, diront certains : la « presse papier » en crise use régulièrement de ce « concept marketing du pauvre » pour tenter de freiner l’érosion de ses ventes. Sauf que Daniel Cohn-Bendit n’est pas un people (car c’en est bien un) comme un autre. La direction de l’Obs aurait-elle oublié qu’il est aussi et surtout un responsable politique en campagne ? En campagne pour Copenhague, mais également pour les régionales ! La menace qui plane sur la planète serait-elle trop grande pour avoir à l’esprit ce genre de considérations ?
Tu parles, Charles. Copenhague n’est qu’un prétexte. « Dany le rose pâle », une fois son costume de « rédacteur en chef » sur les épaules, a visiblement eu le droit de commenter tous les sujets sans exclusive. Même ceux qui n’ont rien à voir avec la conférence des Nations unies sur le changement climatique. Un article sur « Pourquoi Bayrou y croit toujours » ? Le réanimateur de l’écologie politique en France met son grain de sel dans un petit encadré intitulé : « Ce qu’en dit Dany ? » Un débat entre l’eurodéputé écologiste Jean-Paul Besset et le député socialiste Pierre Moscovici ? À un contre un, ce serait trop équilibré. Heureusement Cohn-Bendit est là, encore une fois, pour donner son avis et prêter main forte à Besset. De belle manière même : « Ces réactions et même la relative agressivité d’un homme a priori intelligent comme Pierre Moscovici, sont éloquentes, écrit Cohn-Bendit, Je suis frappé par l’incapacité du vieux logiciel social-démocrate à comprendre qu’au cœur de la question sociale se trouvent aussi les inégalités écologiques (…) ».
Tout ça dans un de ces petits encadrés « Ce qu’en dit Dany ». Imagine-t-on un seul instant des encadrés intitulés « Ce qu’en dit Titine » ou « Ce qu’en dit Nico » ? Daniel Cohn-Bendit, lui, on peut l’appeler « Dany », on peut lui ouvrir ses colonnes comme si de rien était. Parce qu’il est sympathique et que ça ne créera pas autant de remous, se dit-on, que l’interview « surprise » de Nicolas Sarkozy par Denis Olivennes au début de l’été dernier. Pourtant, cette fameuse interview qui avait mis le feu dans les rangs des journalistes et le numéro de l’Obs paru aujourd’hui auront, in fine, le même résultat : servir les intérêts de notre bon Président ! Le premier en dégradant passablement l’image de l’hebdomadaire dit « de gauche » capable de tomber dans les rets de Nicolas Sarkozy comme un vulgaire Bernard Kouchner. Le deuxième en offrant une tribune sans commune mesure à un Daniel Cohn-Bendit grapilleur de voix du PS, le parti pourtant référence des lecteurs de l’Obs.
D’autant plus que Denis Olivennes y va aussi de son couplet. Dans son édito en page 5, lui qui dirige le magazine emblématique de la deuxième gauche loue les vertus de... la « deuxième écologie » incarnée par « Dany » : « Quand la première [écologie] est sectaire, préférant avoir raison seule dans le désert plutôt que de transiger pour avancer, écrit Olivennes, la seconde [écologie] est, au contraire, ouverte. Et elle recherche le rassemblement. Quand elle a, au surplus, le visage joyeux et fraternel de Daniel Cohn-Bendit (sauf s’il traite ses adversaires de “minables”, ce qui ne se fait pas !), elle a toutes les chances de séduire. Les caciques de Solférino devraient y réfléchir sérieusement. (…) Si l’écologie ouverte et progressiste (…) est capable de formuler un projet complet de société, elle pourrait bien faire au vieux Parti socialiste le coup que celui-ci fit au Parti radical il y a soixante-dix ans : lui passer devant. » Mais que les « vieux » lecteurs de l’Obs ne s’offusquent pas, il s’agit juste d’un « numéro spécial Cohn-Bendit Sarkozy Copenhague ». Ben voyons…