« Si le gouvernement syrien ne peut garder le pouvoir, il y a une très forte probabilité que, dans le pays, les radicaux et les représentants d’organisations terroristes se renforcent« .
Pour n’être pas nouveau, cet avertissement de la diplomatie russe, formulé cette fois, mercredi 14 septembre, par Ilia Rogatchev, directeur du département « nouvelles menaces » (!) du ministère des Affaires étrangères, prend tout son sens, au moment où Nicolas Sarkozy et David Cameron, avec leur directeur de conscience géopolitique BHL, célèbrent en Libye la victoire, au moins ponctuelle, d’une coalition hétérogène où figurent notamment des ex(?) membres d’al-Qaïda et des toujours sympathisants de l’islamisme radical.
Le président Medvedev lui-même avait récemment déclaré qu’il y avait des « extrémistes » et même des « terroristes » au sein de l’opposition syrienne. « Des choses désagréables en Libye », et à éviter pour la Syrie
M. Rogatchev s’exprimait dans le cadre d’une conférence sur la coopération internationale anti-terroriste à l’université de Saint-Petersbourg. Mais on peut dire qu’il ne s’adressait pas au seul public de la conférence. C’est bien aux apprenti-sorciers euro-américains qu’était destiné ce rappel. Car de la Syrie, on est très vite passé à la Libye : « Il se passe des choses désagréables en Libye, a martelé M. Rogatchev, des entrepôts énormes d’armes ont été pillés.
Et on ne sait pas précisément qui les a désormais« . Et le représentant du ministère russe des Affaires étrangères d’enfoncer durement le clou dans les oreilles de Sarkozy & consorts : »Il y a une très forte probabilité que les armes volées soient tombées entre les mains de la division régionale d’al-Qaïda« .
Le parallèle entre les deux pays est très présent dans la vision géopolitique russe : en Libye, les nations occidentales, interprétant très librement une résolution de l’ONU vouée à protéger des populations civiles, ont carrément appuyé une faction contre le régime en place, jugé pas assez accommodant avec l’axe Washington-Londres-Paris-Bruxelles-Tel Aviv, et ont perpétré ni plus ni moins un « coup d’Etat géopolitique » par rebelles interposés.
Des rebelles dont on ne sait pas grand chose, sinon qu’ils sont divisés, extrémistes pour beaucoup, et manipulables ou achetables pour presque tous. Et ce scénario libyen, Sarkozy & co ont à l’évidence essayé ces derniers mois de le jouer aussi en Syrie. Sauf que contrairement à Kadhafi, Bachar al-Assad a pu compter sur le soutien non seulement de la Russie, de la Chine et de l’Iran mais d’une majorité de son peuple. L’infernal trio-Sarkozy-Cameron-Lévy n’est pas prêt de parader à Damas.
On devrait voir assez vite si le cas d’école libyen fournit d’intéressants développements, genre guerre civile généralisée et rampante à l’irakienne, ou partition sous influence américaine à la soudanaise – ou à la kosovar. Dans les deux cas, les rebelles libyens auront bien mérité, comme les opposants syriens d’Antalya, du Big Brother américain.