Pompiers et personnels de santé marchent côte à côte dans les rues de Lyon ce 14 novembre pour dénoncer leurs conditions de travail. Rémy Chabbouh, sapeur-pompier et secrétaire national de Sud, parle d’« une dernière manif avant d’autres modes d’action » et assure que nombre de ses collègues sont prêts à rejoindre les Gilets jaunes.
C’est une période à très haut risque pour le gouvernement. Ce 14 novembre marque une journée de manifestation des personnels de santé à travers plusieurs villes de France. Médecins, infirmières, étudiants en médecine, c’est l’ensemble du secteur qui veut crier sa colère et dénoncer un hôpital public sous pression budgétaire constante, qu’ils jugent au bord de l’explosion.
#Lyon Arrivée de la manifestation des hospitaliers et des sapeurs-pompiers pour la défense de l'#hopitalpublic à l'Agence régionale de santé Auvergne Rhône Alpes pic.twitter.com/JuVXf4rz3Y
— Le Progrès Rhône (@leprogresrhone) 14 novembre 2019
À Lyon, ils ont été rejoints par les pompiers qui, après une grève l’été dernier, ont manifesté en masse à Paris le 15 octobre contre leurs conditions de travail. Un rassemblement dont les images d’affrontements entre soldats du feu et policiers avaient fait le tour des médias.
Ne se sentant pas entendus par le gouvernement, ils ont décidé de marcher à côté de leurs collègues du secteur de la santé. Rémy Chabbouh, secrétaire général du syndicat Sud, participe à la manifestation lyonnaise. Selon lui, il s’agit de la dernière avant « d’autres modes d’action ». Il s’est confié à Sputnik France.
Sputnik France : Vous battez le pavé avec les personnels de santé aujourd’hui. Assistons-nous à la convergence des luttes ?
Rémy Chabbouh : « La convergence des luttes, nous l’espérons. En ce qui concerne les personnels de santé et les pompiers, nous sommes sur un domaine bien spécifique, avec des autorités parallèles. Nous avons les mêmes contraintes de personnels et de financement. Notre parcours de manifestation du jour prévoit une halte à l’agence régionale de santé (ARS). Figurez-vous qu’aujourd’hui, quand les sapeurs-pompiers effectuent un transport d’ambulance, il est commandé par le SAMU, qui est sous l’autorité de l’ARS. Les pompiers ont donc aujourd’hui des interlocuteurs communs avec les personnels de santé dans lesquels j’inclus les infirmières, aides-soignantes, médecins ou urgentistes. »
Vous dites n’avoir pas été entendus par le gouvernement après la manifestation nationale du 15 octobre. Selon vous, il est temps de passer à d’autres modes d’action. Lesquels ?
« Aujourd’hui, nous concernant, c’est la dernière manifestation traditionnelle avec parcours d’un point A à un point B et déclaration en préfecture. Nous avons prévu d’autres modes d’action à compter de début décembre. Étant organisateur, je peux vous en parler. Nous comptons investir pour plusieurs jours, voire plusieurs semaines, une célèbre place parisienne. Nous partons déjà sur une période allant du 2 au 6 décembre. L’installation sera durable, avec barnums et lits. C’est une nouvelle forme d’action, qui a pour but d’amener à une convergence aussi bien des professions qui ont les mêmes contraintes que nous, que de la population en général. Le fait d’avoir une sorte de village statique va permettre de voir grossir nos effectifs, qui vont débuter avec environ 70 pompiers. Nous espérons une montée en puissance pour atteindre deux cents, trois cents, voire mille personnes ou pourquoi pas au-delà. »
Samedi 16 novembre marquera le premier anniversaire du mouvement des Gilets jaunes. Ces derniers appellent tous les corps de la société en colère à les rejoindre. Est-ce que cela pourrait être le cas des pompiers ?
« Effectivement, toute une frange des sapeurs-pompiers estime aujourd’hui que les syndicats ne sont plus audibles. Quand on méprise les syndicats et que l’on ne les écoute pas, toute une partie des collègues se radicalise et veut procéder avec d’autres modes d’action. Aujourd’hui, beaucoup de pompiers souhaitent rejoindre les rangs des Gilets jaunes, avec une liberté d’action qu’aujourd’hui les syndicats n’ont plus. Il faut déclarer les manifestations et les parcours plusieurs jours auparavant, il faut déclarer les grèves, les rassemblements, etc. À l’heure actuelle, les modes d’action efficaces sont ceux qui sont imprévisibles. Les Gilets jaunes l’ont prouvé. Donc oui, de nombreux sapeurs-pompiers sont prêts à rejoindre les Gilets jaunes. De plus en plus. Il serait judicieux que les autorités redonnent du poids aux interlocuteurs institutionnels comme les syndicats et les fédérations, de façon à recadrer les échanges. Car en ce moment, c’est vraiment la pagaille. »