Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté samedi dans toute l’Europe, dont environ 100.000 en Allemagne, pour dénoncer les atteintes à l’internet contenues selon eux dans l’accord multilatéral ACTA sur la contrefaçon.
La plupart du temps jeunes, portant parfois le masque blanc et noir au sourire sarcastique de Guy Fawkes -contestataire britannique du XVIIe siècle- devenu l’emblème des cybermilitants, les opposants à ACTA ont défilé dans le calme dans les grandes villes européennes.
En Allemagne, où les températures oscillaient entre -20 et 0 degrés, malgré le soleil, ils ont été 16.000 manifestants à Munich, 10.000 à Berlin, 5.000 à Hambourg (nord), 4.000 à Dortmund (ouest), 3.000 à Francfort (centre), 3.000 à Dresde (est), selon les organisateurs et la police.
Avait notamment appelé à manifester dans ce pays le jeune parti contestaire des Pirates, qui a le vent en poupe en Allemagne depuis son succès en septembre dernier aux élections régionales de Berlin, à l’issue desquelles il a fait son entrée au parlement de la ville-Etat. Cette formation originaire de Scandinavie -elle a deux députés au parlement européen pour la Suède- prône notamment la démocratie directe sur internet.
"Nous avons largement dépassé nos objectifs de participation en Allemagne", a déclaré un porte-parole des Pirates.
Vendredi, Berlin avait annoncé suspendre pour le moment la ratification de l’accord ACTA, précisant qu’aucune décision définitive n’avait été prise.
Négocié entre l’Union européenne, les Etats-Unis, le Japon, le Canada, la Nouvelle-Zélande, l’Australie, Singapour, la Corée du Sud, le Maroc, le Mexique et la Suisse, ACTA vise à lutter contre la contrefaçon au sens large, de celle des médicaments et autres marchandises, au téléchargement illégal sur l’internet.
C’est ce dernier volet qui suscite des protestations massives. Les détracteurs d’ACTA le jugent trop imprécis, laissant la voie à des abus de la part des propriétaires des droits d’auteurs.
Pour tenter de démonter les accusations d’opacité formulées par les opposants, la Commission européenne a publié sur internet un long document détaillant les circonstances dans lesquelles se sont déroulées les négociations sur l’accord multilatéral.
Outre l’Allemagne, la mobilisation contre ACTA était également assez forte samedi dans les ex-pays communistes, où les internautes considèrent ce document comme une grave atteinte à leur liberté.
A Sofia, plus de 3.000 personnes ont défilé dans les rues et autour du siège du parlement bulgare, scandant "Non à ACTA !" et "Mafia !".
En Roumanie, quelques milliers de personnes s’étaient rassemblées dans différentes villes du pays malgré la neige et des températures dépassant les moins 10°C. "Pluie, neige, nous vaincrons !", ont-ils scandé sur la Place de l’université de Bucarest.
A Budapest, environ 400 manifestants, mobilisés par le Kalozpart (Parti des Pirates) à partir du réseau social en ligne Facebook, s’étaient réunis près du parlement hongrois, munis d’affiches "Stop Acta !".
A Vilnius, quelque 600 Lituaniens protestaient devant le siège du gouvernement. Environ 3.000 Tchèques, ont manifesté samedi à Prague et dans d’autres grandes cités de la République tchèque.
Près de 6.000 Autrichiens ont défilé à Vienne et dans les villes de Graz, d’Innsbruck et de Linz. A Paris, ils étaient plusieurs centaines de manifestants. "C’est sous couvert d’anonymat que la révolution est née", proclamaient des pancartes, allusion aux actions spectaculaires des pirates informatiques agissant sous le sigle d’"Anonymous" qui se sont multipliées ces dernières semaines dans plusieurs pays.