La semaine dernière, Laurent Fabius était invité par Jean-Jacques Bourdin dans sa matinale. Il y a proféré d’énormes mensonges sur le retour aux monnaies nationales et le protectionnisme. L’occasion de démonter ce qu’il a avancé et de montrer que la dernière ligne de défense du système est la peur.
Le démontage de l’euro, menace pour les Français ?
Le ministre des Affaires étrangères est un roublard. En 2007, sa passe d’arme avec Jean-Louis Borloo sur la TVA sociale entre les deux tours de l’élection législative aurait coûté des dizaines de sièges à la majorité d’alors. Mais ce faisant, Laurent Fabius ne recule devant aucun mensonge pour faire de l’effet. Au micro de Jean-Jacques Bourdin, il a affirmé que le retour aux monnaies nationales provoquerait un renchérissement de 25 % des emprunts des français. Une affirmation doublement fausse.
Elle est fausse car absolument aucune étude ne valide le fait que le franc baisserait de 25 % par rapport à l’euro. Il existe aujourd’hui trois études réalisées par des banques de scénarios de retour aux monnaies nationales : ING, Nomura et Natixis. Ces trois banques sont favorables à la monnaie unique et ne sont guère suspectes de présenter le retour aux monnaies nationales sous un jour favorable. Et leur conclusion est que le franc resterait stable par rapport à l’euro car la position de notre pays est intermédiaire entre l’Allemagne d’une part et l’Italie et l’Espagne d’autres parts.
Mais Laurent Fabius ment également sur la manière dont le retour aux monnaies nationales se passe. Il est bien évident que quand nous reviendrons aux monnaies nationales, l’ensemble des actifs et des passifs de l’économie nationale seront convertis en franc à une parité de 1 pour 1. Une personne qui gagne 1 500 euros gagnera 1 500 nouveaux francs. Son emprunt de 20 000 euros deviendra un emprunt de 20 000 nouveaux francs. La baguette qu’il achetait à 1 euro vaudra 1 nouveau franc. Seul le prix de certains produits importés montera. Pour plus de détail, vous pouvez lire ce papier détaillé.
Le mensonge et la peur
Mais Laurent Fabius ne s’est pas arrêté là en matière de mensonges. Il a avancé doctement que comme 20 à 25 % de nos ouvriers travaillent pour l’exportation, ils se trouveraient au chômage si nous mettions en place des mesures protectionnistes. Ridicule ! Comme si nous avions le choix entre soit une ouverture totale de nos frontières ou une fermeture complète. La réalité est bien complexe puisque presque tous les pays font du protectionnisme : nous pour la culture, l’Allemagne avec ses normes, les États-Unis sur les pneus ou la sidérurgie, l’Asie et l’Amérique du Sud pour leur industrie.
Cela ne signifie pas que ces pays sont fermés. On peut parfaitement protéger certains secteurs tout en restant globalement ouvert. Le Japon n’a pas sanctionné la Corée du Sud pour la fermeture de son marché automobile, tout comme la Chine n’a pas sanctionné l’Argentine pour rapatrier la production de jouets ou de téléphones portables. En outre, comment la France a un déficit commercial de plus de 65 milliards, nous n’avons pas grand chose à perdre. Une baisse de notre déficit créera immanquablement de l’activité pour les secteurs que nous protégerons de la concurrence déloyale.
Enfin, le ministre a défendu les mesures prises à l’échelle européenne pour soutenir la croissance. Passons sur le fait qu’elles sont prises avec notre argent. Ensuite, les 6 milliards pour lutter contre le chômage des jeunes sont une goutte d’eau : 0,03 % du PIB par an pendant 2 ans ! Il a ensuite demandé la mise en place du plan de croissance de juin dernier, ce qui révèle en creux que ce n’était que de l’affichage et que rien n’a été fait depuis un an, sachant que de toutes les façons, ce n’est qu’un « pistolet à eau contre un rhinocéros qui charge » pour reprendre l’expression de Paul Krugman.
Décidément, Laurent Fabius ne fait pas honneur à la politique. Comme Pierre Moscovici, son seul moyen de répondre à ceux qui proposent une alternative consiste à mentir sciemment pour faire peur aux Français. Le système économique actuel ne tient plus qu’à cela : le mensonge et la peur.