Un manifestant armé et un policier ont été tués vendredi soir dans des violences intervenues dans l’est de l’Arabie séoudite. L’AFP le tient de l’agence officielle séoudienne SPA. Qui précise que « tard vendredi », une patrouille de police a été la cible de tirs de la part de quatre « émeutiers armés » circulant à motocyclette dans la région de Qatif, ville de l’est séoudien, sur le Golfe persique, face à l’Iran et à moins de 100 kilomètres au nord du Bahrein. Une région où sont concentrés l’essentiel des quelque deux millions de chiites que compte le royaume wahhabite. Un des policiers a été tué, un autre blessé, et un des agresseurs a été abattu à son tour.
Concentration explosive de chiites, de pétrole et d’ennemis géostratégiques
Ce n’est certes pas la première fois que cette communauté donne des signes tangibles de mécontentement et de révolte contre l’autocratie des Séoud. Les manifestations se succèdent dans cette partie de l’Arabie séoudite, point éloignée du volcan chiite du Bahrein.
Justement, les quatre homme armés avaient, si l’on en croit des témoins évoqués par l’AFP, avaient auparavant participé à une manifestation commémorant l’anniversaire de l’imam Hassan, petit-fils du prophète Mahomet, et figure historique et religieuse prépondérant du chiisme.
C’est en revanche, à notre connaissance, la première fois qu’il est questions d’attaques à main armée de forces de l’ordre dans ce pays tenu d’une main de fer, et lui-même super-gendarme régional de l’ordre wahabbo-américain.
La première fois que la protestation de la communauté chiite contre sa marginalisation sociale et politique dégénère en activisme violent. Et même si les 10% de chiites séoudiens ne constituent pas une force susceptible de faire chuter à elle seule la maison Séoud, ils sont quand même suffisamment nombreux pour la déstabiliser, d’autant que les chiites ne sont pas les seuls mécontents en Séoudie, une parte importante de la population ne profitant pas autant de la manne pétrolière que les milliers de princes que compte ce royaume.
D’autant, aussi, que la minorité chiite est concentrée dans des districts orientaux et littoraux où sont également implantés la quasi-totalité des gisements pétroliers. Districts qui sont les plus proches aussi du royaume du Bahrein où la dynastie sunnite alliée aux Séoud est confronté, elle, à la révolte ouverte, sinon toujours violente, de ses chiites (70% de la population, dans ce cas). La métaphore politique du baril de poudre – ou de pétrole – prêt à exploser rejoint ici la réalité géographique et géologique ! À suivre…
Erdogan contre son armée
Autre pays leader régional de la croisade anti-Bachar, au point d’abriter ou d’entretenir l’essentiel de l’ASL et des bandes islamistes, la Turquie d’Erdogan, par ailleurs engagée dans une guerre de cent ans contre les indépendantistes kurdes, combat aussi contre… sa propre armée : on sait que des purges, d’inspiration islamiste et gouvernementale, ont déjà frappé depuis des mois le corps des officiers d’une armée longtemps garante des principes de laïcité institués par Mustapha Kemal Ataturk.
Et ce samedi 4 aout un conseil militaire vient d’annoncer le limogeage de pas moins de 55 généraux et amiraux turcs, dont 40 se trouvent déjà en prison ! Encore libres ou déjà embastillés, ces officiers supérieurs sont accusés par la justice et le gouvernement AKP de préparer un coup d’État contre l’actuel gouvernement, et d’avoir participé à une campagne sur internet visant à discréditer Erdogan et ses amis. Erdogan qui a approuvé, bien sûr, la décision du conseil militaire.
Il semble qu’Erdogan et son AKP soient engagé dans une stratégie de verrouillage de la société turque, étape nécessaire sur la voie de leurs ambitions internationales. Mais processus risqué qui risque effectivement de donner des idées de putsch à certains militaires non encore chassés de l’armée, et en tous cas d’accroître la tension politique intérieure entre le pouvoir et toues ses opposition, au moins unies contre lui.
Au fait, si tant de postes de généraux turcs se libèrent, Erdogan va pouvoir recaser utilement les 25 ou 27 généraux syriens qui, à en croire les milieux gouvernementaux d’Ankara, se seraient réfugiés ces derniers mois en Turquie. À quand une « Armée turque libre » ?